La commission des affaires sociales a adopté un amendement du rapporteur général tendant à créer ce qu’il appelle lui-même une « clause de garantie ». Selon lui, celle-ci est censée permettre le respect de la règle constitutionnelle de non-report de la dette sociale sur les générations futures.
Évidemment, personne n’est favorable à ce que l’on transmette aux générations futures les déficits qui grèvent actuellement les comptes sociaux. C’est précisément la raison pour laquelle, à chaque PLFSS, notre groupe propose de revenir sur les exonérations et exemptions de cotisations sociales qui réduisent les recettes des comptes sociaux et qui les plongent chaque année un peu plus dans le rouge. Je rappelle qu’elles s’élèvent à 45 milliards d’euros !
Selon le rapporteur général, les deux alinéas que nous entendons supprimer prévoient en réalité « que, chaque année, la loi de financement devra assurer le respect de la règle d’affectation des recettes nécessaires au remboursement des dettes sociales » et que « si les recettes affectées par le Gouvernement ne permettent pas le respect de cette règle, il faudra que la loi de financement prévoie une augmentation […] de la CRDS. »
Après avoir plaidé chaque année – sans succès ! –pour une hausse de la CRDS, notre rapporteur général, qui ne manque pas de ténacité, propose tout simplement d’inscrire dans une loi organique le principe de l’automaticité de la hausse de la CRDS chaque fois que l’État n’apportera pas les ressources nécessaires. Quand on connaît le manque de détermination du gouvernement actuel et de sa majorité à apporter à la sécurité sociale tous les moyens dont elle a besoin, autant dire que cela revient à avaliser une hausse annuelle et non limitée dans le temps de la CRDS !
La question est sérieuse puisque, selon la tautologie énoncée à l’article 46 de la Constitution, les lois organiques sont les lois auxquelles la Constitution confère un tel caractère. Or elles ont, dans la hiérarchie des normes, une valeur supra-législative et infra-constitutionnelle, c’est-à-dire que le juge constitutionnel, saisi de l’irrecevabilité d’une loi, est en droit de l’analyser au regard des principes et objectifs des lois organiques. Cela revient presque à leur conférer une valeur constitutionnelle.
Mes chers collègues, tout cela ressemble à s’y méprendre à l’inscription dans la Constitution – et l’on sait que le Gouvernement pourrait un jour être tenté de faire une telle proposition – de l’interdiction du principe des déficits publics, ce à quoi nous sommes opposés.
La CRDS présente d’ailleurs une caractéristique qui plaît beaucoup à M. Jégou : Dans la mesure où son assiette est très large, une hausse relativement limitée de son taux dégage une hausse importante de son produit. Cela ne peut évidemment que séduire un expert financier comme M. Jégou…
Agir ainsi, c’est décider de rendre automatique l’augmentation du transfert du financement de la sécurité sociale des entreprises – on dédouanerait pratiquement ces dernières, comme le prône la droite – vers les ménages, qui supportent seuls, ou presque, le poids de la CRDS.
Maintenir cette mesure, c’est décider une augmentation automatique des prélèvements sur les foyers. Nicolas Sarkozy, qui disait ne pas vouloir augmenter les impôts, trahit donc une nouvelle fois ses engagements. Nous n’en sommes guère étonnés, car nous savons qu’il avance le visage masqué. Cela dit, il ne s’agit en fait que d’une demi-trahison puisque tout le monde a compris que sa promesse ne valait que pour les riches et les puissants. D’ailleurs, la CRDS demeure incluse dans le bouclier fiscal, ce qui est scandaleux.