Intervention de Pierre Chavancy

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 15 janvier 2013 : 1ère réunion
Audition du général pierre chavancy chef de la division emploi à l'état-major des armées et de M. Axel Moracchini officier traitant « forces de souveraineté »

Pierre Chavancy, chef de la division emploi à l'État-major des armées :

L'évolution des forces de souveraineté est en effet très liée à celle des forces de présence, sujet auquel il convient d'être très attentif, comme l'actualité nous le rappelle. L'essentiel du chemin ayant été parcouru, nous sommes engagés dans une canule dont il est extrêmement difficile de sortir. Nous pouvons tout au plus varier de quelques degrés vers le haut ou vers le bas.

À quelles difficultés sommes-nous confrontés ? Outre les contraintes budgétaires propres au ministère de la défense, une difficulté pourrait consister en la remise en cause des décisions arbitrées en interministériel. Au sein du pôle aéronautique étatique qui a remplacé la base aérienne du Lamentin, les ministères ont chacun une quote-part d'utilisation des installations. Que se passe-t-il s'ils ne veulent plus payer ? La question vaut aussi pour des structures comme le centre maritime commun de Polynésie. Les arbitrages interministériels ont été tellement difficiles à rendre que des retours en arrière pourraient compromettre tout l'édifice.

Même si la marine nationale est la seule à posséder une capacité d'intervention hauturière, l'action de l'État en mer est fondamentalement interministérielle. La capacité de surveillance des espaces de souveraineté ne se limite pas aux seules capacités aéromaritimes : il faut y ajouter, d'une part, les moyens satellitaires ou radars ou électroniques, et d'autre part, la présence de l'armée de terre sur certains territoires comme les îles Éparses. En particulier, les moyens maritimes militaires pré-positionnés seront à terme quantitativement égaux à ceux de 2008 et qualitativement bien supérieurs.

Quelles sont les possibles évolutions ? Sous réserve des options retenues par le prochain livre blanc, les risques et menaces sont a priori inchangés, ce qui devrait justifier un maintien de la priorité stratégique donnée à la Guyane. La contrainte budgétaire ne pourra que s'accroître, ce qui conduit à opérer de nouveaux choix - et choisir, c'est aussi renoncer.

Dans une hypothèse haute, nous aurions la possibilité de combler quelques lacunes, telles que la disparition de l'Albatros, et de compenser les réductions temporaires de capacités liés à l'âge de certains moyens. Cela demeurerait de toute façon limité et ne se ferait pas à moindre coût. Une hypothèse moyenne consisterait pour nous à rester sur la trajectoire actuelle sans mener ces actions correctrices. Enfin, dans une dernière option que je n'ose imaginer, il nous serait demandé de contribuer encore davantage à l'effort de réduction de la dette publique. Cela signifierait une réduction drastique de nos capacités outre-mer avec principalement la mise en place de « points d'accueil » centrés autour d'une base navale, à la fermeture des bases aériennes avec mise en place de pôles aéronautiques étatiques, l'armée de terre étant condamnée à un rôle restreint. Je précise que le service militaire adapté (SMA), relavant du ministère des outre-mer est une troupe « désarmée ». En cas de catastrophe ou crise grave, il fournit des bras et des moyens mais, ne peut assurer de protection en armes.

En conclusion, la réorganisation menée depuis 2008 se traduit par un recentrage des différents ministères sur leur coeur de métier. Elle ne se limite pas à une simple logique de moyens car ceux-ci demeurent cohérents avec les missions de chacun. De nombreux arbitrages interministériels ont été rendus : la pente n'est adaptable qu'à la marge et au moindre coût.

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