Intervention de Xavier Musca

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 janvier 2013 : 1ère réunion
Séparation et régulation des activités bancaires — Table ronde

Xavier Musca, directeur général délégué de Crédit agricole SA :

Selon moi, la première question est donc de savoir si nous devons aller vers une plus grande fragmentation des règlementations ou si nous devons essayer de nous inscrire dans un mouvement à tout le moins européen. Je regrette à titre personnel que ce soit le choix de suivre notre propre voie qui ait été retenu. Par ailleurs, à l'heure de l'Union bancaire, qui est un progrès, nous aurions pu souhaiter que les règles de fonctionnement des banques s'appliquent au minimum aux banques de la zone euro. Je m'inquiète de la mise en place d'une réglementation française là où il eut été souhaitable d'avoir une réglementation européenne.

Mon second point d'inquiétude a été évoqué par Pierre de Lauzun et concerne les conséquences de Bâle III. Le financement des entreprises européennes se faisait entre 1999 et 2008 à hauteur de 27 % par le recours au financement obligataire. Depuis 2008, c'est à hauteur de 41 %. C'est toute la question du market making : autorise-t-on les banques à aider les entreprises à se financer sur les marchés ? Pour nous, l'enjeu essentiel est bien de préserver notre capacité à accompagner les entreprises. Lorsque l'Etat français émet de la dette, il réunit un pôle de banques qu'on appelle les « spécialistes en valeur du Trésor » (SVT) à qui il vend par avance cette dette, puis il leur demande de distribuer cette dette. C'est du market making. Il y a quelques jours, la banque à laquelle j'appartiens a cédé des titres à une banque espagnole qui s'appelle Bankinter ; si nous vendions sur le marché nous provoquerions une fluctuation désordonnée du cours, nous perdrions de l'argent, tout comme tous les autres détenteurs de ces titres. Nous avons donc demandé à quelques banques d'acheter ces titres et ensuite de les céder au fil de l'eau. Le market making est donc une activité utile pour l'économie. La conséquence d'une pénalisation de ces activités serait la disparition du marché des acteurs français et le renforcement de la prédominance des banques américaines, qui représentent déjà 50 % du marché mondial. Les banques françaises ont vécu de façon très douloureuse le retrait brutal des financements américains, à l'automne 2011, qui nous a mis en danger. Je juge donc inopportun tout mouvement qui pourrait conduire à accroitre notre dépendance vis-à-vis d'acteurs non nationaux.

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