Intervention de Edouard Fernandez-Bollo

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 janvier 2013 : 1ère réunion
Séparation et régulation des activités bancaires — Table ronde

Edouard Fernandez-Bollo, secrétaire général adjoint de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) :

L'Autorité de contrôle prudentiel ne peut qu'être favorable à toutes les initiatives qui permettent l'accroissement de la sécurité du système. Pour cela, il faut avant tout que ceux qui prennent les risques, c'est-à-dire les acteurs privés, les comprennent, les identifient, les limitent et les contrôlent. C'est à l'aune de ces critères que l'ACP porte un jugement sur ce texte : il accroît les mécanismes d'identification et de contrôle des risques là où ils sont pris, dans l'activité quotidienne des établissements, et constitue donc un progrès. En effet, par la définition positive des activités, sur laquelle la direction générale du Trésor a insisté, il va imposer aux établissements une définition beaucoup plus précise de la nature de l'activité qui est faite, desk par desk. Au-delà de la mesure quantitative des risques pris - et donc de la limitation prudentielle par rapport à l'appétit vis-à-vis du risque que développe un établissement en particulier - le texte implique une prise en compte de la finalité du risque pris. Car un des apports de ce texte est d'intégrer la finalité comme l'un des éléments essentiels de la définition des risques.

Il s'agit d'un apport très positif car il incitera les établissements à faire des efforts de classification, de mesure et de clarification de leurs activités. Tout cela contribuera à un accroissement global de la sécurité du système. S'il convient certes de distinguer le risqué et le moins risqué, il importe surtout de déterminer les risques contrôlés et ceux qui ne le sont pas. En effet, le risque en soi n'est pas mauvais et c'est le métier des banques de prendre des risques. Ce qui est mauvais, c'est le risque non contrôlé, mal mesuré, mal défini. Il faut, comme le fait cette loi, continuer à essayer d'introduire une composante qualitative de la finalité des opérations dans tous les systèmes de contrôle interne des banques.

L'ACP va d'abord s'intéresser à ce que font les banques, ce qui est prudent pour l'une ne l'est pas nécessairement pour une autre. Il va falloir que les banques définissent un appétit au risque de plus en plus précis et cette loi va apporter un complètement non négligeable de précision. Il est exact qu'on ne peut pas définir la procédure a priori, surtout si on veut atteindre un certain degré de précision.

Je souhaiterais également insister sur la liquidité, qui est une des grandes questions mises en avant par la crise ; à cause de sa complexité, on n'avait pas réussi à se mettre d'accord sur un standard international en matière de liquidité. L'une des grandes innovations de Bâle III concerne le ratio de liquidité. S'agissant des effets de la loi, il faut être conscient que les questions de liquidité sont beaucoup plus importantes que la question des fonds propres, que je ne veux pas du tout négliger cependant. En effet, comme il a été dit tout à l'heure, mettre davantage de fonds propres en face d'un crédit rend plus cher le crédit et incite à la distribution du crédit en dehors du système bancaire. Mais la liquidité est l'enjeu essentiel de la réforme de Bâle III pour les banques françaises, pour lequel elles doivent encore parcourir du chemin, alors qu'elles sont par ailleurs très bien capitalisées.

Les dispositions législatives proposées en matière de séparation ne sont pas une fin en soi, mais un instrument pour veiller à la stabilité financière et contribuer à l'objectif de sécurité. Cependant, il faut veiller à ce que l'instrument lui-même soit adapté à sa fin et ne produise pas des effets nuisibles à une gestion plus prudente des risques. Pour nous, le projet de loi respecte cet équilibre : on impose des contraintes importantes aux établissements, y compris des contraintes de ségrégation. Surtout, le suivi de la filiale - et c'est la nouveauté - va être tout à fait indépendant : la filiale sera considérée comme une entité à part, ce qui signifie que la filiale devra avoir une liquidité à part. Les actifs liquides qui seront mis dans la filiale pour qu'elle respecte la liquidité à part ne seront pas disponibles pour le respect de la liquidité de la maison-mère. Il est donc très important que chaque entité définisse sa gestion prudente de trésorerie. Mais il ne faudrait pas que ça multiplie par deux les contraintes de liquidité des banques françaises.

Pour finir, je voudrais souligner, même si je suis bien conscient que ce n'est pas l'objet de cette table ronde, que cette réforme a bien une logique d'ensemble. Cette partie de la loi sur la séparation a également pour objet de favoriser la résolution de crises. C'est l'articulation des deux qui permettra de résoudre les difficultés qui peuvent toujours surgir dans le système bancaire.

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