En effet !
Nous regrettons d’avoir dû inscrire dans notre ordre du jour réservé ce débat sur les conclusions de la mission d’information, conclusions qui furent publiées le 26 juin 2012, car ce débat, qui avait toute sa place dans une semaine sénatoriale de contrôle, n’a jusque-là jamais pu être inscrit à ce titre, malgré nos demandes réitérées lors des conférences des présidents.
N’arrivant pas à obtenir satisfaction sur une demande pourtant tout à fait légitime, il ne nous semblait pas pour autant raisonnable d’attendre plus longtemps avant de débattre des conclusions de ce rapport. Au passage, je rappelle que ces conclusions avaient fait l’objet d’un report de quelques mois pour ne pas interférer avec la période électorale du printemps de 2012, mais aussi pour obtenir l’ensemble des données sur le produit des nouvelles impositions pour 2011, données que les membres de la mission n’avaient d’ailleurs pu se procurer dans leur intégralité, malgré ce délai supplémentaire.
Avant d’aborder les conclusions et les propositions du rapport, je reviendrai rapidement sur les conditions d’adoption de cette réforme de la fiscalité locale, ou du moins de ce qui nous avait été présenté comme telle, dont la mesure emblématique avait été la suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par la contribution économique territoriale, prévus par l’article 2 du projet de loi de finances pour 2010.
Il y eut une longue discussion, parfois fastidieuse mais parfois passionnante, à l’Assemblée nationale et plus encore au Sénat, discussion toujours bien ancrée dans la mémoire de ceux qui l’ont vécue, voire pour certains « subie ». Il n’est néanmoins pas inutile, à mon sens, d’y revenir aujourd’hui. D’ailleurs, monsieur le ministre, j’ai relu ces débats ainsi que votre contribution personnelle très intéressante en première comme en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.
Les membres de notre groupe, comme nombre de sénatrices et de sénateurs de tous bords, ont très majoritairement – mais pas unanimement, je salue à cet égard mon collègue Gilbert Barbier – porté un regard critique sur une réforme qui a été élaborée de manière trop précipitée, dans le flou et sans véritable concertation avec les élus locaux et les parlementaires.
D’ailleurs, le manque de clarté de cette réforme ainsi que de nombreuses erreurs et approximations avaient à l’époque conduit les rapporteurs généraux des deux chambres à récrire intégralement l’article 2 du projet de loi de finances pour 2010. Le Sénat avait consacré plus de treize heures en séance publique aux 514 alinéas d’un amendement resté célèbre de notre excellent collègue Philippe Marini, alors rapporteur général du budget.
À l’époque, des parlementaires de tous les groupes avaient regretté, selon leur degré de solidarité ou de non-solidarité avec le Gouvernement, l’absence totale ou quasi totale de simulations, en particulier concernant les effets de la réforme pour les collectivités territoriales, mais également pour l’État et les entreprises.
Cette réforme, adoptée sans qu’en soit évalué suffisamment l’impact, méritait donc, comme cela était d'ailleurs prévu dans le texte, d’être observée avec la plus grande attention une fois mise en œuvre. Les travaux de la mission ont permis d’en dresser un bilan au moins partiel.
Aujourd’hui, plus de trois ans après, force est de constater que les travaux des parlementaires de la mission commune d’information ont été rendus plus difficiles du fait de la non-communication des éléments chiffrés qui avaient été demandés.
Hélas, monsieur le ministre, je crains que l’absence de simulations, qui entrave de fait le travail des parlementaires et leur capacité à élaborer le droit de façon éclairée, n’appartienne pas uniquement au passé. Lors de l’examen de la loi de finances pour 2013, nous nous rappelons le vif émoi causé dans cet hémicycle par l’adoption à l’Assemblée nationale, sans que le Sénat puisse se prononcer – mais la faute n’en incombe pas au Gouvernement –, d’un certain nombre de modifications substantielles concernant les finances des collectivités territoriales. Je pense au passage du texte – rapide, puisqu’il n’y eut pas de débat ! – à l’Assemblée nationale, le 14 décembre dernier.
Ces modifications, et ce n’est pas sans rapport avec le travail de notre mission, concernaient notamment les fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et des droits de mutation à titre onéreux. Là aussi, nous ne pouvons que regretter la persistance d’une certaine politique d’absence de communication des simulations nécessaires.