Intervention de Manuel Valls

Réunion du 5 février 2013 à 9h30
Questions orales — Sécurité et délinquance en nouvelle-calédonie

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Monsieur le sénateur, je prendrai un peu de temps pour vous répondre, car vous m’avez interrogé sur un problème important : la délinquance, parfois très violente, qui ne cesse de croître en Nouvelle-Calédonie, notamment parmi les jeunes.

Pour répondre aux exigences de sécurité légitimes de vos concitoyens et de leurs élus, mon collègue Victorin Lurel et moi-même sommes déterminés à garantir l’ordre républicain et à renforcer la tranquillité et la sécurité des populations dans tous les territoires des outre-mer.

La délinquance appelle des réponses au fond, qui prennent du temps, impliquent tous les leviers de l’action publique et mobilisent l’ensemble des acteurs concernés ; je pense notamment aux politiques de prévention et d’éducation. Reste que si la réponse policière n’est pas suffisante à elle seule, elle est indispensable. Accompagnée de la réponse judiciaire, elle doit être ferme et efficace.

Comme vous l’avez signalé, monsieur le sénateur, plusieurs formes de délinquance sont préoccupantes en Nouvelle-Calédonie. C’est le cas, par exemple, des vols avec violence, essentiellement commis par de jeunes majeurs ou des mineurs multiréitérants, souvent en état d’ivresse. Le fait est que la consommation excessive d’alcool par une partie de la jeunesse est l’une des causes importantes de la délinquance. Pour les seuls huit premiers mois de l’année, les services de police et de gendarmerie ont constaté 3 060 ivresses publiques et manifestes.

Pour lutter contre ce phénomène et contre la délinquance qui l’accompagne, les forces de l’ordre doivent agir dans plusieurs directions.

Policiers et gendarmes ont d’ores et déjà renforcé leur présence sur la voie publique ; s’il faut faire plus, nous le ferons. Divers dispositifs spécifiques ont été mis en œuvre pour renforcer l’action des forces de sécurité : des opérations anti-délinquance menées conjointement par la police, la gendarmerie et les douanes sont organisées chaque mois sur réquisition du parquet de Nouméa et des opérations mixtes de sécurité sont menées régulièrement par la police et la gendarmerie avec les polices municipales qui existent.

À Nouméa, des patrouilles renforcées sont organisées les nuits de fin de semaine en raison des rassemblements importants de jeunes gens alcoolisés sur le littoral. En outre, des mesures préventives de restriction de vente d’alcool sont prises le week-end entre midi et vingt et une heures ; vous me direz, monsieur le sénateur, si ces mesures sont bien appliquées.

Par ailleurs, l’alcool étant une des causes principales des accidents de la circulation, les opérations de contrôle d’alcoolémie ont été intensifiées. C’est ainsi que, depuis le mois de janvier dernier, près de 1 000 opérations ont été réalisées par les policiers et les gendarmes, conduisant à 30 000 dépistages préventifs. De plus, la gendarmerie a créé en août dernier un poste d’officier adjoint chargé de la sécurité routière afin d’aider les instances locales à développer des dispositifs adaptés. Mon administration, mon cabinet et moi-même sommes disposés à accueillir votre avis sur ce type de dispositifs.

La prévention est un élément essentiel de cette action. À Nouméa, le contrat local de sécurité signé au début de l’année dernière a fixé deux axes majeurs : la prévention de la délinquance des mineurs, qui passe par des diagnostics de sécurité dans les établissements scolaires ainsi que par le signalement et le suivi des jeunes en rupture de scolarité, et la lutte contre l’alcoolisme et la toxicomanie.

Dans ce cadre, une permanence de médecin a été mise en place à l’hôtel de police, du lundi au samedi. Des entretiens en addictologie, à la suite de suspensions de permis de conduire tendent également à se développer. Enfin, en Nouvelle-Calédonie comme en métropole, les brigades motorisées de la gendarmerie interviennent auprès des entreprises ou des établissements scolaires en matière de prévention contre l’alcoolisme.

Comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, ce phénomène d’alcoolisation, fréquemment conjugué à une consommation de cannabis cultivé localement, provoque des faits de délinquance souvent gratuits, commis par une frange de la jeunesse – dans de nombreux cas, des mineurs multiréitérants. Pour nombre de ces jeunes, venus de zones rurales, l’échec scolaire et le déracinement provoquent une désocialisation.

Certes, la Nouvelle-Calédonie ne connaît guère de trafic de drogue au sens métropolitain du terme, mais plutôt des deals relevant davantage du troc, le cannabis local étant devenu, me semble-t-il, un moyen de paiement pour acheter de l’alcool. Reste que la drogue constitue un problème. L’action des forces de l’ordre permet d’importantes saisies dans les zones urbaines, mais aussi dans le reste de l’archipel, avec l’appui de la section aérienne et du peloton de surveillance et d’intervention à cheval de la gendarmerie. Les douanes de l’aérodrome de Nouméa-Magenta sont également en première ligne dans ce combat et le parquet de Nouméa apporte une réponse pénale à chaque infraction à la législation sur les stupéfiants.

Une importante action est aussi menée sur le plan de la prévention, dans le cadre du partenariat établi entre les forces de police et de gendarmerie et l’éducation nationale. C’est ainsi qu’une vingtaine de formateurs anti-drogue de la police et de la gendarmerie ont mené, au cours de l’année 2011, quelque 56 opérations de sensibilisation au profit de près de 2 000 mineurs.

Tels sont, monsieur Vendegou, les moyens mis en œuvre pour s’attaquer aux maux que vous avez décrits. Soyez sûr que le Gouvernement est attentif aux problèmes que vous avez soulevés et que je reste à votre disposition, ainsi qu’à celle de tous les élus de Nouvelle-Calédonie, pour améliorer les dispositifs en vigueur, mesurer leur efficacité et mieux répondre aux attentes des habitants de l’archipel.

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