Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 5 février 2013 à 9h30
Questions orales — Application de la législation sur les « devis modèles » relatifs aux obsèques

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Il y a plus de vingt ans, ayant eu l’honneur d’être nommé secrétaire d’État aux collectivités locales dans un ministère que, cher Manuel Valls, vous connaissez bien, j’ai trouvé sur mon bureau un dossier auquel je ne m’attendais pas : la réforme du monopole des pompes funèbres.

Comme l’avait très bien montré un rapport de trois inspections générales, il existait dans ce domaine un système tout à fait fallacieux, conjuguant un pseudo-monopole biaisé avec une concurrence faussée. Nous nous sommes donc mis au travail, avec le soutien de Pierre Bérégovoy tout particulièrement. Finalement, le Parlement a adopté la loi du 8 janvier 1993 modifiant le titre VI du livre III du code des communes et relative à la législation dans le domaine funéraire. Cette loi a instauré la concurrence entre les différents opérateurs agréés et redéfini le service public dans ce domaine extrêmement sensible.

Au cours de la dernière lecture de ce texte, j’ai acquis la conviction que certaines dispositions auxquelles je tenais beaucoup, relatives aux prix et, notamment, aux devis types, relevaient du domaine réglementaire. Autrement dit, un règlement national ou municipal pourrait prévoir l’établissement de devis modèles.

Pourquoi ces devis types sont-ils indispensables ? Malheureusement, chaque famille française peut être frappée par un deuil. Or, en pareille occasion, il faut prendre beaucoup de décisions en moins de vingt-quatre heures. Bien entendu, toutes les entreprises du secteur doivent fournir des devis – la loi le prévoit. Mais qui, touché par le décès d’un être cher, va se plonger dans la lecture de devis longs de quarante pages, écrits en petits caractères et largement incompréhensibles, en tout cas difficilement comparables ?

J’ai toujours représenté aux professionnels du domaine funéraire, que je connais bien, que la transparence était dans l’intérêt de tous. Or pour que celle-ci soit assurée, il faut que l’on puisse très simplement connaître les prix proposés par les divers opérateurs agréés pour des prestations clairement définies.

N’étant pas parvenu à mes fins il y a quelque temps, je suis revenu à la charge au Sénat – vous me connaissez, monsieur le ministre… Avec le concours de nombreux parlementaires, en particulier de M. Lecerf et, à l’Assemblée nationale, de M. Gosselin, nous avons réussi à faire voter à l’unanimité par le Sénat et par l’Assemblée nationale la loi du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire.

Entre autres mesures très importantes, touchant notamment à la crémation, cette loi fait obligation à tous les opérateurs funéraires agréés de déposer chaque année dans les mairies des devis modèles par lesquels ils s’engagent à fournir, à un prix fixé pour l’année, des prestations de référence. Du temps de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, nous sommes parvenus, après un long dialogue, en particulier avec les services de la direction générale des collectivités locales, à la parution de l’arrêté du 23 août 2010, qui définit ces prestations de manière extrêmement claire.

La loi ayant été votée et l’arrêté ayant été publié, toutes les entreprises agréées ont aujourd'hui l’obligation d’indiquer dans les mairies, dans l’ordre prévu par l’arrêté, les prix qu’elles pratiquent pour chacune des prestations. Quant aux mairies, en vertu de la loi, elles sont tenues de mettre ces devis modèles à la disposition des citoyens, soit à la mairie, soit, plus simplement, sur leur site Internet.

Or j’ai malheureusement constaté que ces dispositions étaient assez peu appliquées. L’agrément des entreprises qui ne respectent pas la loi ne leur est pas retiré, et un certain nombre de communes omettent, peut-être par méconnaissance des dispositions de la loi, de mettre les devis modèles à la disposition de leurs habitants.

Si je vous interpelle sur ce sujet, monsieur le ministre, c’est parce que je suis convaincu que la transparence des prix est nécessaire. Les prix de certaines cérémonies d’obsèques, qu’il s’agisse d’inhumation ou de crémation, peuvent être très élevés. Il existe aujourd'hui une tendance au low cost, mais ces prix très bas correspondent à des prestations qui ne respectent pas toujours – je pèse mes mots – la dignité qui s’impose lors de ces cérémonies. Il faut de la clarté et de la rigueur, afin de garantir le respect du service public et des familles ; cela passe par les mesures de transparence que j’ai évoquées.

Monsieur le ministre, je pense que vous avez beaucoup réfléchi à ces questions, et je vous remercie par avance de la réponse que vous pourrez m’apporter.

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