Vous avez raison, ma chère collègue.
La loi a donc allongé le délai de prescription, le portant à un an, mais pas dans tous les cas. Elle a laissé subsister des différences de traitement sans fondement, par négligence, dirons-nous, pour ne pas dire par manque de considération pour un certain type de discrimination, dont la gravité n’a pas été évaluée à son juste degré. Il nous incombe d’apporter aujourd’hui la correction réparatrice !
Depuis 2004, la législation relative à la liberté de la presse prévoit ainsi des délais de prescription différenciés pour les régimes des crimes et délits de discrimination commis par voie de presse à l’encontre d’une personne, selon la nature de cette discrimination : lorsqu’elle est fondée sur l’origine, l’ethnie, la race ou la religion, le délai de prescription est d’un an depuis 2004 ; lorsqu’elle est fondée sur le sexe, l’orientation sexuelle ou le handicap, le délai est alors de trois mois, car il n’a pas été modifié par la loi de 2004.
Il est urgent de remédier à cette inégalité de traitement, car la loi de 2004 a introduit une hiérarchisation dans les discriminations, considérant que les discriminations, les diffamations et les propos injurieux à raison de l’origine, de la race ou de la religion présenteraient un caractère de particulière gravité, justifiant un traitement spécifique, tandis que ces mêmes infractions à raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap ne relèveraient pas du même degré de protection.
Cette différence de traitement porte atteinte au principe d’égalité devant la loi. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est constante en la matière : les dérogations au principe d’égalité devant la loi ne peuvent se justifier que par un motif d’intérêt général, ce qui ne saurait être le cas en l’espèce, ou par une différence objective de situation, ce qui impliquerait de démontrer, par exemple, qu’une injure faite à une personne à raison de son handicap est moins grave qu’une injure faite à une personne à raison de sa couleur de peau. J’observe au passage qu’il est aujourd’hui établi qu’il n’y a pas de races, mais seulement une unique espèce humaine. La référence à la notion de race devrait d’ailleurs disparaître prochainement de la Constitution.
La présente proposition de loi a donc pour objet d’abolir cette atteinte à l’égalité. D’ailleurs, les débats de société actuellement en cours, donnant lieu à des propos excessifs, sont la preuve qu’il est indispensable de rester vigilants, pour éviter que ne soit jetée une ombre sur l’égalité des droits pour toutes et tous.
L’article 2 de la proposition de loi vise à faire bénéficier les personnes victimes de propos discriminatoires à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap du délai de prescription d’un an.
Nous sommes évidemment extrêmement favorables à ce texte, qui constitue un pas supplémentaire vers la justice, réparant une anomalie de notre droit et établissant une cohérence qui sera protectrice pour toutes les victimes de diffamations ou d’injures. Nous voterons donc en faveur de son adoption. §