Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales est une priorité du Gouvernement, comme l’ont par exemple montré les mesures qui ont été prises dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.
Je sais que, à l’instar des députés, les sénateurs sont très impliqués sur ces questions. D'ailleurs, je me réjouis que, hier soir, à l’Assemblée nationale, un amendement à la loi bancaire, imposant aux banques une transparence de leurs activités, pays par pays, ait été adopté en commission, avec le soutien du Gouvernement. La France pourrait ainsi être le premier pays au monde à imposer une telle transparence, laquelle, comme chacun le sait, est un outil puissant de lutte contre les paradis fiscaux.
Comme vous le savez, lors du sommet du G20 de Londres du 2 avril 2009, l’OCDE a établi et fait publier les listes grises et noires de « paradis fiscaux », listes désormais bien connues. La France a alors engagé des négociations avec les pays figurant sur ces listes : ont été conclus des avenants, lorsqu’il existait déjà une convention fiscale entre la France et les États concernés, et des accords d’échange de renseignements fiscaux, dans les autres cas.
Depuis mars 2009, la France a signé deux conventions fiscales, onze avenants et vingt-huit accords d’échange de renseignements. Au total, cent quarante-deux accords ont été conclus, faisant de notre pays l’un des plus entreprenants dans l’action internationale en faveur de la transparence fiscale.
C’est dans ce contexte que s’inscrivent l’accord relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale entre la France et les Pays-Bas pour ce qui est d’Aruba, lequel, comme chacun le sait, est un territoire au large du Venezuela, et l’avenant à la convention entre la France et le Sultanat d’Oman en vue d’éviter les doubles impositions, qui font l’objet des projets de loi aujourd’hui soumis à votre approbation.
Ces accords ont pour objet principal la mise en place d’un cadre juridique permettant un échange de renseignements effectif et sans restriction. Ces accords prévoient notamment la levée du secret bancaire, ce qui, évidemment, est un élément essentiel. En outre, ils sont conformes aux standards internationaux les plus récents en matière de transparence et d’échange d’informations fiscales, et particulièrement aux modèles de convention élaborés par l’OCDE. Certes, ces standards pourraient encore être améliorés, mais c’est un premier pas important en matière de lutte contre les pratiques fiscales dommageables.
Je souligne qu’Aruba a déjà été évalué par la revue par les pairs au sein du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, enceinte internationale chargée d’apprécier le degré de transparence fiscale des États. Ce rapport d’évaluation, adopté en avril 2011, lui a permis de passer en « phase 2 », programmée en 2014. Le cadre juridique d’Aruba lui permet de se conformer à l’accord d’échange de renseignements signé avec la France. Rappelons également que l’île s’est conformée aux standards internationaux en matière de transparence fiscale, ce qui a permis son inscription sur la liste « blanche » de l’OCDE.
Quant au Sultanat d’Oman, s’il n’a pas été évalué par le Forum fiscal mondial, il n’a pas non plus été identifié par celui-ci comme une juridiction présentant un risque particulier en matière de transparence fiscale.
Cela étant dit, je tiens à préciser que l’essentiel n’est pas de signer ou de ratifier de tels accords : l’essentiel est bien évidemment de les faire appliquer. À cet égard, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous assurer que toutes les précautions nécessaires sont prises par la France afin que ces accords soient effectivement suivis d’effets et mis en œuvre. Le Gouvernement est extrêmement attentif sur ce point.
Je souhaiterais également insister sur le fait que la signature et l’approbation de ces accords ne sont évidemment pas une fin en soi mais s’inscrivent dans le cadre de la mise en place d’un véritable dispositif global de lutte contre les pratiques fiscales dommageables et risquées. En effet, c’est au moyen de ces accords que la France consolidera les règles d’échange de renseignements avec ses partenaires et confortera chacun d’entre eux dans leurs engagements en faveur de la transparence fiscale.
La liste française des États et territoires non coopératifs constitue, quant à elle, un levier d'action complémentaire. En effet, si le Forum fiscal mondial devait rendre une évaluation défavorable ou si l'assistance administrative prévue par ces accords ne se déroulait pas de manière satisfaisante, l'inscription ou la réinscription de ces États sur la liste française reviendrait à l'ordre du jour.
La France est en mesure de prononcer de lourdes sanctions fiscales à l’encontre des États figurant sur cette liste. Ces sanctions se traduisent notamment, comme vous le savez, par moins d'investissements sur place et, pour nos entreprises, par le refus du bénéfice du régime mère-fille au profit de leurs filiales situées sur ces territoires.
En conclusion, je voudrais insister sur le fait que l’application de ces accords, qui appuient la politique fiscale menée par la France, sera suivie avec la plus grande attention par le Gouvernement et par les services de l’État.