Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 6 février 2013 à 21h45
Titres de transport sur les compagnies aériennes figurant sur la liste noire de l'union européenne — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mers chers collègues, sans aucun doute, l’existence de la liste noire de l’Union européenne a contribué à l’amélioration de la sécurité aérienne en Europe.

L’instauration de cette liste noire, établie pour la première fois en 2006, ainsi que la création de l’Agence européenne de sécurité aérienne se sont accompagnées d’un renforcement des normes de sécurité, notamment d’un renforcement de la prudence par l’interdiction ou la restriction de certaines compagnies à risque pour les vols au départ et à destination de l’Europe.

Le texte que nous examinons vise à indiquer clairement à l’acquéreur d’un billet d’avion qu’une partie de son voyage, dite « de bout de ligne », sera réalisée par une compagnie aérienne figurant sur la liste noire au départ d’un pays tiers qui l’autorise.

Elle instaure donc une obligation d’information qui incombe au vendeur avant la conclusion du contrat de vente, obligation sanctionnée par 7 500 euros d’amende en cas de non-respect.

Si l’acquéreur souhaite tout de même voyager sur la compagnie en question, il sera ainsi en mesure de prendre cette décision en connaissance de cause. Cette mesure garantit donc que le vendeur et le client se sont bien entendus sur l’objet du contrat.

Combien de fois avons-nous voyagé sur des compagnies aériennes qui figuraient sur la liste noire sans le savoir ? Il ne vient pas à l’esprit de tout le monde de consulter une liste qui, pourtant, est actualisée régulièrement.

La présente proposition de loi accorde donc au consommateur le droit de savoir que la sécurité de l’avion n’est pas garantie selon les normes retenues par l’Agence européenne de sécurité aérienne.

Les travaux du rapporteur, notre excellent collègue Vincent Capo-Canellas, ont permis d’améliorer le texte de l’Assemblée nationale et de trouver des solutions à certains problèmes.

Je pense, notamment, à la suppression de l’obligation pour le vendeur de proposer des modes de transport alternatifs. Ce dernier ne peut, en effet, connaître tous les itinéraires d’autobus, d’autocar, de ferries et autres, à moins d’avoir fait le voyage de lui-même. En outre, comme cela a été souligné, ces modes de transports ne sont pas plus sûrs.

Ce dispositif requiert quelques adaptations pratiques. Ainsi, un délai d’un an est accordé pour la mise en place de l’obligation d’information afin d’actualiser les logiciels de réservation. Peut-être une simple obligation de fournir la liste des compagnies aériennes avant l’achat d’un billet d’avion avec confirmation de la réception par écrit de l’acquéreur aurait-elle été aussi efficace et bien moins compliquée à mettre en œuvre…

Pour autant, cela veut-il forcément dire que les avions des compagnies figurant sur liste noire ne sont pas sûrs ?

La liste noire présente clairement des limites. Elle met au même niveau des compagnies aériennes qui ne sont pas comparables. Par exemple, figure en annexe A de la liste noire, c’est-à-dire en interdiction totale d’exploiter, la compagnie Philippines Airlines. On la trouve également sur la liste noire américaine de la Federal Aviation Administration. Cela n’empêche pas cette compagnie d’effectuer des vols quotidiens directs vers les États-Unis, le Japon ou l’Australie !

Ainsi, nous avons sur une même liste, d’une part, des compagnies plus sérieuses avec de très rares accidents, causant moins de morts que certaines grandes compagnies, mais qui demeurent en liste noire, d’autre part, une myriade de petites compagnies composées de quelques aéronefs, parfois possédées par des milliardaires locaux, et qui subissent des accidents beaucoup plus graves et plus fréquents.

Il est plus facile de sortir de la liste noire que d’y entrer ! Cela pose des problèmes aux pays dont le tourisme est entravé par l’impossibilité de fournir un service considéré comme sûr.

Parallèlement, peut-on dire que les compagnies aériennes qui ne figurent pas sur la liste noire sont sûres ? Rien n’est moins démontré, car certaines demeurent hors liste, alors que des irrégularités ont été constatées.

De très nombreux facteurs interviennent lors d’un accident, et aucune compagnie ne peut être à l’abri : le risque zéro n’existe pas, cela a déjà été dit !

Le Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile, autorité française des enquêtes de sécurité sur les accidents et les incidents aériens, a bien relevé que la formation des pilotes présentait quelques défauts lors de l’examen des circonstances de l’accident du vol AF 447 Rio-Paris du 1er juin 2009, qui avait causé la mort de 228 passagers.

Bien entendu, il est impossible pour les autorités de contrôle de surveiller tous les avions avant le décollage.

Cependant, en dépit de l’impact très mesuré de la proposition de loi sur la sécurité aérienne proprement dite, de telles dispositions permettront de mieux garantir les droits des consommateurs. Elles contribueront sans aucun doute à la surveillance des compagnies douteuses, celles que j’appelle parfois, pour des raisons évidentes, les compagnies « Air Inch’Allah », et d’éviter ainsi que des voyages de rêve ne deviennent des destinations de cauchemar !

Cette proposition de loi constitue donc, monsieur le ministre, un progrès indéniable que le groupe RDSE ne peut que soutenir ! §

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