Intervention de Ladislas Poniatowski

Réunion du 13 février 2013 à 14h30
Système énergétique sobre tarification de l'eau et éoliennes — Discussion d'une proposition de loi en nouvelle lecture

Photo de Ladislas PoniatowskiLadislas Poniatowski :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen de la présente proposition de loi instaurant une tarification progressive de l’énergie nous inspire de nombreux regrets en raison de la précipitation, de l’impréparation et de l’amateurisme qui ont prévalu lors de sa présentation devant les assemblées et qui conduisent immanquablement à son échec.

En effet, ce texte, déposé le 7 septembre 2012, poursuit deux objectifs auxquels la plupart des formations politiques peuvent souscrire sans grande difficulté. Même la nôtre, madame la ministre !

Le premier objectif est d’accélérer la transition énergétique des ménages en jouant sur deux leviers : une diminution de l’énergie consommée et une meilleure isolation des logements. Or c’est justement la tarification progressive de l’énergie qui permettra d’amorcer cette transition énergétique.

Le second objectif est d’accompagner la hausse inéluctable des prix de l’énergie, de façon à permettre aux ménages de se préparer aux tensions sur les marchés énergétiques, tensions qu’ils constateront sur leurs factures, hélas assez rapidement.

Ces deux objectifs sont ceux que les auteurs de la proposition de loi nous présentent dans l’exposé des motifs. Et force est de reconnaître qu’il nous est difficile de ne pas y souscrire.

J’ajouterai simplement qu’il n’est pas aisé de dessiner des perspectives fiables à vingt ans et plus sur ce que seront les cours des différentes matières premières et donc sur ce que sera alors le coût de l’énergie.

Je ne m’attarderai pas plus longtemps sur la finalité de ce texte, car cette finalité, même si le degré de considération pour les questions environnementales peut varier d’un gouvernement à l’autre, chacun dans cette assemblée tend à la faire sienne. C’est bien pourquoi il est regrettable que nous ne puissions pas trouver un accord sur ce texte.

Cependant, la maladresse de la majorité sur la forme et la légèreté des auteurs du texte sur le fond nous empêchent d’émettre un jugement favorable à l’endroit de cette proposition de loi.

Je dirai d'abord un mot de la forme.

Nos collègues de l’Assemblée nationale se sont plaints, à raison, de ne pas avoir eu le temps d’examiner ce texte avec toute l’attention qu’il méritait. Comme il s’agit d’une proposition de loi, nous n’avons pas pu, du moins en première lecture, bénéficier de l’expertise du Conseil d’État, ni même – Jean-Claude Lenoir l’a rappelé – d’une étude d’impact. Pourtant, s’il existe bien des textes qui nécessitent une étude d’impact, ce sont ceux qui créent des dispositifs d’incitation à adopter des comportements vertueux, quel qu’en soit l’objet. Il nous est donc impossible de connaître l’impact financier des dispositions de la proposition de loi, impossible d’appréhender la progressivité de la tarification, puisque nous ne disposons d’aucune simulation, et impossible enfin d’évaluer les tarifs sociaux. À cela s’ajoute le refus d’une phase d’expérimentation ; je regrette que vous le mainteniez aujourd'hui.

Nos collègues de la majorité peuvent s’attendre à ce que nous ne nous montrions pas particulièrement bienveillants envers ce mécanisme de malus-bonus qui est au cœur de la proposition de loi, mais qui n’en reste pas moins une totale abstraction. Cette impréparation, volontaire ou non – mais j’ai désormais tendance à préférer la seconde hypothèse –, devint explicite lorsqu’un groupe de travail de crise fut mis en place sur l’initiative de la majorité et que le Conseil d’État fut enfin saisi. Même s’il s’agit d’un aveu, nous nous félicitons que le texte ait fait l’objet d’une cure de jouvence, ou plutôt, dirai-je sans mesquinerie aucune, d’une « cure de précision ».

Enfin, et il s’agit autant d’une critique sur la forme que sur le fond, critique qui vous a déjà été formulée, madame la ministre : pourquoi ne pas avoir attendu le grand débat national sur la transition énergétique de février ? Pourquoi ne pas avoir intégré des dispositions visant à introduire un mécanisme semblable d’incitation à la consommation raisonnée dans une grande loi sur la transition énergétique qui aurait également traité de l’habitat et de la consommation énergétique des entreprises ?

Mais peu importe. Aujourd’hui, nous prenons acte de votre choix de demander au Parlement de se prononcer sur un texte dont vous admettez que ses dispositions ne sont pas encore prêtes.

Venons-en donc au cœur de cette proposition de loi : le dispositif de malus-bonus. Ce dispositif, qui doit entraîner une prise de conscience des Français quant à leur mode de consommation domestique d’énergies de réseau, devra attribuer un volume de base pour chaque résidence. Les consommateurs bénéficieront d’un bonus si leur consommation est inférieure à cette base et se verront appliquer un malus en cas de dépassement.

Cette idée selon laquelle les consommateurs dispendieux financeront les consommateurs vertueux n’est pas déplaisante. En effet, le principal levier de la transition énergétique – nous en reparlerons plus tard – est la baisse de la consommation des ménages français plutôt que les éventuels arbitrages entre différentes sources de production d’électricité.

Cependant, j’entamerai ma réflexion sur l’article 1er en rappelant que celui-ci rompt avec la péréquation tarifaire dans la mesure où il introduit ce concept de bonus-malus…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion