L’article 5 élargit le champ de l’insaisissabilité du patrimoine de l’entrepreneur individuel, au-delà de la résidence principale, à tout bien foncier bâti ou non bâti, résidence secondaire comprise.
Cette disposition, sous certains aspects, vise en fait quelque peu à appâter le chaland, si vous me permettez cette expression. En effet, l’article 5 lève l’un des obstacles considérés comme importants à l’activation de l’esprit d’entreprise : celui des risques personnels encourus par l’entreprenant entrepreneur.
Il s’agit de faire en sorte que, en cas de difficulté particulière et de liquidation éventuelle de l’entreprise, rien ne puisse permettre la mise en cause du patrimoine personnel de l’entrepreneur pour gager le passif.
Cette disposition n’est évidemment pas sans poser de problème. Ainsi, comme le souligne la CGPME elle-même, elle pourrait avoir pour conséquence de rendre les banques encore plus frileuses dans l’octroi des prêts aux PME à un moment où les contraintes qui pèsent sur les emprunteurs sont renforcées.
Rendre certains biens, comme les résidences secondaires, insaisissables diminue en effet l’assiette des garanties. La même remarque vaut également, on s’en doute, pour les entrepreneurs disposant d’un patrimoine immobilier étendu et producteur de revenus locatifs.
Un tel mécanisme risque donc d’être pénalisant en matière d’accès au crédit car, aux yeux des banques, les entrepreneurs individuels ne seraient plus convenablement garantis. Le principe de renonciation partielle à l’insaisissabilité ne nous paraît pas de nature à pouvoir les rassurer. Ne faudrait-il pas prendre le temps de réfléchir au problème de l’effet boomerang de cette disposition ?
Par ailleurs, il convient d’envisager ses dérives possibles. Est-il normal que les biens acquis lorsque l’entreprise prospère deviennent insaisissables lorsqu’elle périclite ? D’une certaine façon, cette disposition revient à privatiser, sous une nouvelle forme, les profits et à faire supporter les pertes à la collectivité.
Dès lors, ne conviendrait-il pas de limiter l’insaisissabilité aux biens acquis avant la création de l’entreprise ou encore aux seuls apports ? Est-il normal qu’une telle mesure s’applique à tous les entrepreneurs individuels sans exception, quelle que soit la valeur de leurs biens mobiliers et immobiliers ?
Le montant de ces biens ne devrait-il pas être plafonné ? Est-ce à la collectivité d’assumer les conséquences de la faillite d’une entreprise alors que son patron possède plusieurs résidences secondaires, dispose, comme nous l’avons dit, de revenus locatifs, ou est assujetti à l’ISF ?
Nous ne pouvons donc voter cet article, source d’inégalités évidentes de traitement entre les entrepreneurs individuels, et qui ne propose, de surcroît, pas de solution acceptable au problème de l’accès au crédit des petites et très petites entreprises.