Intervention de Martial Bourquin

Commission des affaires économiques — Réunion du 13 février 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Pierre Pelouzet médiateur des relations interentreprises placé auprès du ministre du redressement productif et de la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif chargée des petites et moyennes entreprises de l'innovation et de l'économie numérique

Photo de Martial BourquinMartial Bourquin, président du groupe d'études sur l'industrie :

Pierre Pelouzet inscrit sa mission dans la continuité de l'excellent travail réalisé par son prédécesseur, Jean-Claude Vollot, et je m'en réjouis, car il ne faut pas relâcher l'effort entrepris pour rééquilibrer les relations interentreprises.

Le récent rapport de l'Observatoire des délais de paiement est à cet égard éloquent. Le coût pour les PME lié aux retards de paiement par rapport aux délais que prescrit la loi de modernisation de l'économie (LME) est chiffré à 11 milliards d'euros pour 2012. Alors que la mise en oeuvre de cette loi a d'abord permis un raccourcissement des délais, on assiste de nouveau à un allongement important depuis deux ans. C'est une situation qui n'est pas tenable. Il est regrettable que, trop souvent, les entreprises victimes de pratiques commerciales abusives n'osent pas saisir le médiateur par crainte d'une rupture abrupte des relations commerciales. Il nous faut réussir à résoudre ce problème d'omerta.

Comment avancer ? La médiation est utile mais pas suffisante. Je crois qu'il faut adopter des mesures législatives nouvelles. J'y réfléchis, en relation étroite avec le médiateur, dans le cadre de la lettre de mission que m'a confiée le premier ministre. Soyons clairs : il ne faut pas complexifier et rigidifier le droit des affaires, encore moins le pénaliser : la CGPME, que j'ai récemment reçue avec le groupe d'études sur l'industrie, me l'a instamment demandé. Cependant, on peut mettre en place des mesures simples et claires pour faire évoluer les esprits et les pratiques. Je prendrai deux exemples :

- pourquoi ne pas confier aux commissaires aux comptes, dans le cadre du rapport annuel qu'ils établissent, la mission de mettre en évidence la façon dont les entreprises s'acquittent de leurs obligations légales en matière de délais de paiement ? Si ces obligations ne sont pas remplies, cela figurerait dans le rapport et cela constituerait un signal d'alerte permettant au médiateur ou, le cas échéant, à la direction générale de la concurrence, la consommation et la répression des fraudes (DGCCRF) d'intervenir ;

- pourquoi ne pas aussi, et cela va avec ma précédente proposition, rendre systématique la conclusion de contrats écrits entre les entreprises ? Aujourd'hui, trop souvent, de simples bordereaux de commandes servent de support aux relations commerciales. De nombreux différends et difficultés découlent de cette imprécision. Comment en effet connaître et faire respecter les droits et les devoirs de chacun s'ils ne sont explicités nulle part ? La méfiance et les abus prospèrent sur ce flou contractuel -un flou bien français, je le souligne, car dans d'autres pays, comme en Allemagne ou aux États-Unis, les exigences en matière de précision des contrats sont bien plus fortes que chez nous.

La clarification du cadre contractuel est indispensable pour établir une relation de confiance et créer une culture de la coopération -une culture de filière comme le disait à l'instant le médiateur. J'y insiste : il ne s'agit pas de légiférer dans un esprit punitif. La sanction doit être une arme de dissuasion. La bonne loi est celle qui crée les conditions de la confiance et permet d'inverser la logique des comportements, de rompre avec la tendance spontanée à régler les difficultés économiques et financières sur le dos des plus faibles et, en définitive, de créer une dynamique collective de coopération. C'est cela le vrai moteur de la compétitivité.

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