La commission procède à l'audition de M. Pierre Pelouzet, médiateur des relations interentreprises, placé auprès du ministre du redressement productif et de la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique.
Nous recevons M. Pierre Pelouzet qui, en novembre dernier, a été nommé médiateur des relations interentreprises, placé auprès du ministre du redressement productif, pour une durée de deux ans.
Dans sa lettre de mission, le ministre souligne que, depuis plusieurs décennies, la compétitivité et le développement des entreprises françaises sont altérés par les mauvaises relations entre clients et fournisseurs. Il vous assigne donc comme objectif principal de favoriser leur rééquilibrage en pérennisant le dispositif de médiation mis en place par votre prédécesseur, M. Jean-Claude Vollot, que nous avions entendu en avril 2011. Vous avez aussi pour missions de mettre en place une veille sur les relations contractuelles, d'animer la charte des relations inter-entreprises et de formuler des propositions de modification législatives ou réglementaires.
Trois mois après votre prise de fonction, pourriez-vous dresser un premier bilan de votre action et de l'état des relations interentreprises dans un contexte économique difficile, sans doute peu propice à la pacification des relations entre clients et fournisseurs ? En ce qui concerne la définition de votre mission, je remarque que vous êtes en charge de l'ensemble des relations interentreprises et non plus seulement, comme votre prédécesseur, des relations propres au secteur industriel et à la sous-traitance. Quelle est la signification concrète de cette évolution ?
Vous l'avez rappelé, ma nomination auprès du ministre du redressement productif est intervenue le 22 novembre 2012, par décret du Président de la République. Comme en témoigne mon parcours professionnel, je suis issu du monde de l'entreprise et mon expérience concerne plus particulièrement la fonction « achat » dans des grands groupes du secteur pétrolier (Exxon), du bâtiment et du transport (SNCF). J'ai également été Président de l'Association des acheteurs et fervent militant de la modification des comportements dans les relations entre grandes, petites et moyennes entreprises. Ces fonctions m'avaient amené à rencontrer le médiateur du crédit ainsi que mon prédécesseur, à participer à l'élaboration de la charte des relations interentreprises et au lancement de l'association Pacte PME destinée à favoriser le développement des entreprises de taille intermédiaire.
Comme vous l'avez également souligné, la définition officielle de la mission du médiateur a changé pour être adaptée à la réalité concrète. En effet, la médiation interentreprises, compte tenu de son efficacité, s'est très rapidement étendue au-delà du seul cadre de l'industrie : aujourd'hui la moitié des saisines proviennent du monde économique non industriel.
La mission première du médiateur est de transformer en profondeur les relations entre les entreprises et les mentalités. La nature de ces relations n'est pas d'une qualité suffisante pour garantir un niveau de compétitivité optimal dans un certain nombre de filières.
Je résumerai en quelques mots notre plan d'action pour 2013. Il s'inscrit dans le prolongement des constatations et des conclusions du rapport de M. Louis Gallois sur la compétitivité, selon lesquelles la médiation est un outil important pour favoriser la compétitivité de notre économie.
Le premier axe, pour 2013, est de renforcer les bases de la médiation interentreprises. Cette dernière apparait d'ores et déjà comme un mécanisme qui garantit confidentialité, rapidité et efficacité. 80 % des médiations se terminent par un succès. Leur bénéfice se fait aussi sentir dans la durée : six mois après une médiation, on constate que, dans l'immense majorité des cas, les relations se sont structurellement améliorées et s'accompagnent d'un accroissement d'activité économique. Je rappelle ici que les modalités de saisine de la médiation répondent à un objectif de simplicité : il suffit de remplir un dossier sur notre site internet. Le demandeur est ensuite contacté par un de nos médiateurs, qui sont au nombre d'une dizaine au plan national et d'une trentaine au niveau régional, pour traiter les dossiers au plus près du terrain. Je précise que nous distinguons plusieurs niveaux de saisine qui vont du cas le plus simple, par exemple, une PME confrontée à un grand groupe, au plus complexe, comme les médiations de branche telles que celle que nous avons menée entre les plasturgistes et leurs grands fournisseurs de l'industrie chimique. Entre les deux, nous traitons également les saisines collectives déclenchées par un syndicat professionnel ou une fédération.
Nous intervenons donc dans un champ économique très vaste mais qu'il convient cependant à la fois d'élargir et de mieux couvrir. En effet, la médiation interentreprises, qui n'a que trois ans d'âge, souffre encore d'un déficit de notoriété. On peut estimer que seules 30 à 40 % des PME connaissent l'existence de la médiation et que près de la moitié de ces dernières n'oseraient pas s'engager dans une saisine par crainte de mesures de rétorsion. Il nous faut donc agir pour mieux faire connaitre la médiation et pour conjurer la peur des représailles qui n'est, en pratique, pas fondée. Compte tenu du nombre de conflits potentiels ou avérés, on doit pouvoir multiplier par cinq ou dix les saisines dont le nombre effectif avoisine le millier depuis la création de la médiation interentreprises. J'ajoute que la précocité de la saisine est essentielle pour ne pas laisser les conflits s'envenimer : les 20 % de taux d'échec de la médiation correspondent, la plupart du temps, à un recours trop tardif à notre dispositif.
Notre deuxième axe de travail consiste à lutter contre les 36 mauvaises pratiques qui ont été identifiées dans le rapport Vollot de 2010. Les plus graves concernent le non respect des délais de paiement, la rupture brutale des relations commerciales, le détournement de propriété intellectuelle, les conditions imposées lors de la formation du contrat, la modification unilatérale de ses clauses, les pénalités de retard abusives ou encore la définition de prix non révisables pour des fournitures incluant des intrants soumis à de brusques fluctuations de cours.
Aux cotés de M. Martial Bourquin, dans le cadre de la mission temporaire qui lui a été confiée par le Premier ministre, nous pourrons évaluer, au regard de ces mauvaises pratiques, la pertinence des outils législatifs existants et la qualité de leur application. Ce doit être l'occasion de mieux mettre en valeur l'intérêt de la médiation interentreprises, de renforcer l'effectivité des normes en vigueur et de faire évoluer le cadre contractuel en diffusant des contrats types adaptés aux besoins de chaque filière, pour endiguer les mauvaises pratiques existantes.
Notre troisième grand objectif vise à rééquilibrer les relations interentreprises. Je le souligne à nouveau, le manque de solidarité entre les grands groupes et les PMI/PME, a été présenté par M. Louis Gallois dans son rapport comme une des faiblesses structurelles de notre économie et, pour remédier à cette situation, nous disposons de plusieurs outils. Le premier est la charte des relations interentreprises qui a été signée, pour l'instant, par 369 firmes et constitue une véritable référence de bonnes pratiques. Pour aller plus loin, nous avons lancé un label des relations entre clients et fournisseurs à la fin de l'année dernière. Il s'agit, pour les entreprises signataires de la charte, d'accepter qu'un regard extérieur - en l'occurrence celui du Groupe Vigeo, qui intervient en tant que « tiers de confiance » - évalue dans un rapport la qualité de la mise en oeuvre des bonnes pratiques définies par la charte. Depuis la fin de l'année dernière quatre entreprises (Thalès, Legrand, Société générale et SNCF) ont été labellisées et nous allons amplifier progressivement cette démarche.
Nous sommes également impliqués dans la structuration et le renforcement des filières afin de diffuser les bonnes pratiques en y créant des instances de médiations spécifiques via des comités et des contrats négociés à l'intérieur de celles-ci.
Enfin, nous souhaitons soutenir les initiatives permettant aux grands groupes d'aider les PME innovantes à devenir des entreprises de taille intermédiaire performantes à l'exportation, en s'inspirant du modèle allemand. A ce titre, nous nous inscrivons dans la démarche du « pacte PME ». Les entreprises publiques ont signé une charte dans ce sens.
Pierre Pelouzet inscrit sa mission dans la continuité de l'excellent travail réalisé par son prédécesseur, Jean-Claude Vollot, et je m'en réjouis, car il ne faut pas relâcher l'effort entrepris pour rééquilibrer les relations interentreprises.
Le récent rapport de l'Observatoire des délais de paiement est à cet égard éloquent. Le coût pour les PME lié aux retards de paiement par rapport aux délais que prescrit la loi de modernisation de l'économie (LME) est chiffré à 11 milliards d'euros pour 2012. Alors que la mise en oeuvre de cette loi a d'abord permis un raccourcissement des délais, on assiste de nouveau à un allongement important depuis deux ans. C'est une situation qui n'est pas tenable. Il est regrettable que, trop souvent, les entreprises victimes de pratiques commerciales abusives n'osent pas saisir le médiateur par crainte d'une rupture abrupte des relations commerciales. Il nous faut réussir à résoudre ce problème d'omerta.
Comment avancer ? La médiation est utile mais pas suffisante. Je crois qu'il faut adopter des mesures législatives nouvelles. J'y réfléchis, en relation étroite avec le médiateur, dans le cadre de la lettre de mission que m'a confiée le premier ministre. Soyons clairs : il ne faut pas complexifier et rigidifier le droit des affaires, encore moins le pénaliser : la CGPME, que j'ai récemment reçue avec le groupe d'études sur l'industrie, me l'a instamment demandé. Cependant, on peut mettre en place des mesures simples et claires pour faire évoluer les esprits et les pratiques. Je prendrai deux exemples :
- pourquoi ne pas confier aux commissaires aux comptes, dans le cadre du rapport annuel qu'ils établissent, la mission de mettre en évidence la façon dont les entreprises s'acquittent de leurs obligations légales en matière de délais de paiement ? Si ces obligations ne sont pas remplies, cela figurerait dans le rapport et cela constituerait un signal d'alerte permettant au médiateur ou, le cas échéant, à la direction générale de la concurrence, la consommation et la répression des fraudes (DGCCRF) d'intervenir ;
- pourquoi ne pas aussi, et cela va avec ma précédente proposition, rendre systématique la conclusion de contrats écrits entre les entreprises ? Aujourd'hui, trop souvent, de simples bordereaux de commandes servent de support aux relations commerciales. De nombreux différends et difficultés découlent de cette imprécision. Comment en effet connaître et faire respecter les droits et les devoirs de chacun s'ils ne sont explicités nulle part ? La méfiance et les abus prospèrent sur ce flou contractuel -un flou bien français, je le souligne, car dans d'autres pays, comme en Allemagne ou aux États-Unis, les exigences en matière de précision des contrats sont bien plus fortes que chez nous.
La clarification du cadre contractuel est indispensable pour établir une relation de confiance et créer une culture de la coopération -une culture de filière comme le disait à l'instant le médiateur. J'y insiste : il ne s'agit pas de légiférer dans un esprit punitif. La sanction doit être une arme de dissuasion. La bonne loi est celle qui crée les conditions de la confiance et permet d'inverser la logique des comportements, de rompre avec la tendance spontanée à régler les difficultés économiques et financières sur le dos des plus faibles et, en définitive, de créer une dynamique collective de coopération. C'est cela le vrai moteur de la compétitivité.
Je pense moi-aussi que la médiation interentreprises souffre encore d'un manque de notoriété. Cet outil intéressant doit encore monter en puissance.
Concernant les délais de paiement, je tiens à rappeler certaines des conclusions du rapport que j'ai réalisé en décembre 2009 et qui visait à dresser un premier bilan de la LME : la réduction de ces délais a été une mesure appréciée des entreprises et on a bien assisté à un raccourcissement significatif dans un premier temps. Ensuite, c'est vrai, l'aggravation de la situation économique depuis deux ans a de nouveau tendu les relations interentreprises. Je tiens à souligner toutefois que certaines filières rencontrent des difficultés plus importantes que d'autres -je pense tout particulièrement au BTP, où la complexité de la chaîne des intervenants et des intermédiaires est propice à l'apparition des problèmes aigus en matière de délais de paiement. À cet égard, je voudrais interroger le médiateur pour savoir si un assouplissement des règles est envisageable dans cette branche d'activité.
Concernant les relations commerciales entre clients et fournisseurs, il est vrai que, de façon générale, elles restent difficiles. Le déséquilibre du rapport de forces économique dissuade trop souvent les plus faibles de faire valoir leurs droits et, s'ils osent se plaindre, ils font face ensuite à des mesures de rétorsion. Le découragement est donc bien présent. Alors faire évoluer les textes, pourquoi pas, mais comment ? Dans quel sens ?
Comme vient de le dire ma collègue, l'existence et les mérites de la médiation interentreprises sont encore trop ignorés des entreprises. Il faut donc consentir un effort pédagogique important pour la faire connaître. Cela passe peut-être par le resserrement du maillage territorial de la médiation et une plus grande proximité des médiateurs vis-à-vis des entreprises et des territoires grâce à une plus grande implication des syndicats de branche ou des réseaux consulaires.
Le problème numéro un auquel il faut s'attaquer est celui des délais de paiements. Leur allongement concerne toutes les filières d'activité. Les ruptures abusives de contrats constituent la deuxième grosse difficulté à traiter. Tout le monde est d'accord sur ce constat. Il faudra sans doute se saisir de tous les outils disponibles pour faire évoluer les pratiques : la médiation, les chartes de bonne conduite et, éventuellement aussi, l'adoption de mesures législatives nouvelles.
La création d'un médiateur de l'entreprise fait partie des propositions qui figuraient dans le rapport sur les entreprises de taille intermédiaire (ETI) que j'ai remis au Premier ministre en 2010. La médiation interentreprises en est la concrétisation et je soutiens évidemment ses efforts. En particulier, je connais et je salue l'implication personnelle de Patrick Pelouzet dans cet outil efficace et dans « Pacte PME ».
Je reste convaincu que le principal handicap économique de la France réside dans son incapacité à créer des écosystèmes d'entreprises coopératifs. C'est un élément de la performance qui nous fait défaut. Les relations de sous-traitance se réduisent trop souvent à une relation de maltraitance.
Je m'étais posé la question, dans mon rapport sur les ETI, de savoir s'il fallait réviser la loi de 1975 sur la sous-traitance ou s'il fallait privilégier une approche plus moderne comme la médiation. J'estime que cette seconde solution est la meilleure, à condition toutefois que la médiation dispose de moyens suffisants. Pensez-vous, à cet égard, que les moyens dont vous disposez sont à la hauteur de la tâche qui vous est assignée ? On l'a déjà souligné : le réseau des médiateurs régionaux est très mal connu et la médiation doit davantage se rapprocher des territoires. Les ETI et les PME sont en région et la médiation doit donc elle-même être davantage présente dans les territoires. Une action forte est à mener en ce sens.
Enfin, je me demande s'il ne faudrait pas en venir à la mise en place d'un système de cotation publique des grandes entreprises permettant de mettre en évidence leur impact positif ou négatif sur l'écosystème de leur filière. L'affichage de la responsabilité économique des grands groupes par rapport aux sous-traitants me semble un levier puissant pour faire évoluer les pratiques.
Dans le secteur industriel, et plus particulièrement la construction navale, une multitude de PME sous-traitantes interviennent généralement sur les gros chantiers aux côtés de l'entreprise principale, qui réalise parfois à peine la moitié de la valeur ajoutée totale de la commande. Cela montre que la performance industrielle est collective. L'intérêt bien compris et la responsabilité de la grande entreprise est donc de garantir la pérennité de ce tissu productif. Pourtant, on observe qu'en bas de cycle économique, chaque entreprise est plutôt laissée à elle-même, ce qui menace la capacité collective à rebondir lorsque le cycle d'affaires reprend.
Le développement de notre force industrielle implique donc que nous apprenions à créer des coopérations dans la durée, capables d'assurer le passage des phases économiques défavorables. Cela n'est pas facile, il faut en convenir. Renforcer le tissu industriel dans une filière, cela passe notamment par la capacité à faire grandir les PME pour les transformer en ETI. Il y a, nous le savons tous, un déficit du nombre d'ETI dans notre pays : elles sont 4 600 en France contre 12 000 en Allemagne. Une des difficultés, c'est que cette croissance de la taille implique souvent des changements au niveau de la structure du capital, en passant de PME indépendantes à des ETI intégrées dans des groupes. La crainte de la dilution voire du transfert du contrôle du capital font souvent obstacle à ce mouvement. Je voudrais avoir votre sentiment sur cette question, monsieur le médiateur.
Plusieurs l'ont déjà souligné : la médiation souffre d'un déficit de notoriété. Elle se heurte aussi au fait qu'il est difficile pour les PME économiquement dépendantes d'y avoir recours contre de grands groupes. Il est donc indispensable de la banaliser, ce qui passe par une communication beaucoup plus forte à l'échelle des régions, des départements et même des bassins d'emploi.
Mon troisième point concernera la formation. Élargir la formation dont bénéficient les salariés des grands groupes en direction des PME, n'est-ce pas aussi un moyen de diffuser, de créer une culture de filière et de coopération ? Cela peut faciliter la mobilité des personnels et contribuer à renforcer les liens.
La médiation traite des effets et non pas des causes. Il faut s'attaquer d'abord à ces dernières, lesquelles résident dans un rapport de forces défavorable aux PME. Notre tissu industriel est trop dualiste : d'un côté, beaucoup de PME et de TPE, de l'autre des grands groupes qui, le plus souvent, hormis peut-être dans l'aéronautique, ne sont pas des leaders à l'international capables d'organiser leur filière pour chasser en meute. Je crois donc qu'il faut ramener à ses justes proportions les effets de la médiation. Quelle médiation mettre en oeuvre par exemple dans le secteur de l'agroalimentaire où 80 % du chiffre d'affaires des fournisseurs est réalisé auprès de quatre grands distributeurs ? Les PME ne s'attaqueront jamais à eux. Cette disparité des rapports de forces perdurera si on ne la traite pas par la loi. Les Allemands l'ont bien compris du reste : les délais de paiement, c'est 45 jours fin de mois, sans discussion possible.
Le second point que je voudrais soulever concerne le rôle des banques. Les banquiers n'assurent plus le financement du fonds de roulement des entreprises. Si le problème des délais de paiement prend une telle acuité, c'est aussi parce que les banques ne refinancent pas les créances commerciales.
Enfin, concernant la nécessaire proximité territoriale de la médiation, je rappelle qu'il existe des outils comme les chambres de commerce et d'industrie (CCI), des métiers et de l'artisanat et d'agriculture. Il existe aussi des syndicats professionnels de branche et des relais au niveau des pôles de compétitivité. Tous ces acteurs ont une bonne connaissance des entreprises : pourquoi ne pas les mobiliser ?
Je suis également d'avis qu'il faudra en passer par la loi pour encadrer et rééquilibrer les relations interentreprises. Même dans le secteur de l'aéronautique, qui se porte bien nous dit-on, les relations entre donneurs d'ordre et PME sont très rigides et empreintes d'incohérence : les mêmes donneurs d'ordre qui ne soutiennent pas les PME de leur filière et qui les poussent à délocaliser à un certain moment vont intervenir dans un deuxième temps pour les remettre à flot parce qu'ils se rendent compte qu'ils ont laissé se détériorer un outil qui leur est indispensable pour répondre au carnet de commande. Où est la logique ? Il faut une prise de conscience qui, à mon sens, ne peut passer que par une action législative.
Très souvent, TPE et PME ne se connaissent pas, alors même qu'elles sont situées sur le même territoire : on se fournit donc parfois très loin en produits qui pourraient trouver à proximité simplement par méconnaissance de ce qui existe. Je crois que c'est aussi un des rôles de la médiation : renforcer les liens territoriaux entre entreprises pour former ces fameux clusters qui jouent un rôle déterminant dans la compétitivité. Les clubs d'entreprises, dont les CCI sont souvent à l'origine, devraient être davantage mobilisés dans ce sens.
Pour ce qui est des délais de paiement, il faut s'adresser aux banques qui ne jouent pas pleinement leur rôle, à savoir aider les TPE et PME à faire face à leurs problèmes de trésorerie. Cela requiert, je le pense aussi, de passer par la loi.
En effet, il faudrait un texte complétant la loi de modernisation de l'économie (LME).
Il conviendrait également de s'appuyer sur les chambres consulaires, pour tenter de régler en amont les problèmes avant d'en arriver à une phase contentieuse.
Enfin, par rapport à la proposition de Martial Bourquin, de donner un rôle accru aux commissaires aux comptes, prenons garde au fait que les commissaires aux comptes interviennent une fois dans l'année, à la fin, pour certifier les comptes. Or, c'est au cours de l'année, et non pas à la fin, qu'il faut intervenir. Je crois qu'une mesure législative dans ce domaine devrait prendre cela en compte.
L'idée serait de mettre en relief dans le rapport annuel les relations ente donneur d'ordre et sous-traitant, pour créer un système d'alerte. Le rôle des commissaires aux comptes est d'allumer le feu rouge pour faire en sorte que la médiation et la DGCCRF puissent intervenir plus facilement si nécessaire.
Il faudrait inscrire dans la durée les relations contractuelles entre donneurs d'ordre et sous-traitants. Il faut aller au-delà du bon de commande et passer à une véritable culture du contrat. La loi peut y aider.
Merci de ces commentaires et de ces questions.
Le sujet de la communication a été évoqué par plusieurs intervenants : comment faire connaître la médiation ? C'est un sujet qui me tient à coeur et dont vous connaissez la difficulté. Bruno Retailleau a appelé de ses voeux un classement des grands donneurs d'ordre publics : nous avons publié un tel classement en juin dernier dans le magazine Challenges. Cela n'a pas pour autant modifié les comportements. Nous essayons d'utiliser tous les outils de communication. Je souhaite par ailleurs effectuer le plus de déplacements possibles dans les territoires : dès ma nomination, je me suis ainsi rendu dans le Lot pour rencontrer les entreprises du secteur aéronautique. Oui à la communication, oui au travail avec les chambres de métiers. Je compte également sur vous pour faire connaître la médiation.
A ensuite été évoquée la problématique des délais de paiement et des autres mauvaises pratiques. Les délais de paiement constituent le premier motif de saisine, mais il s'agit d'une question relativement simple à résoudre car la loi existe et elle est claire. Il suffit parfois d'un coup de téléphone pour accélérer le paiement des factures. Ma première recommandation serait de rendre obligatoire la médiation.
D'autres pratiques posent plus de difficultés. La question des contrats a été évoquée : dans certains secteurs, notamment dans l'artisanat, on a longtemps fonctionné sans contrat. Cela peut aujourd'hui conduire à des situations très délicates. Il y a une vraie réflexion à mener sur le sujet. Je suis partisan d'un travail dans chaque filière pour déployer des contrats types. Je suis heureux de travailler avec Martial Bourquin sur ces questions.
Je suis d'accord aussi sur le fait qu'il faudrait étendre le rôle des commissaires aux comptes. Un indicateur d'alerte serait le bienvenu pour orienter de façon plus efficace le travail de la médiation et de la DGCCRF.
Le but premier de la mission de la médiation est de permettre un changement des mentalités. Ce n'est pas spectaculaire, c'est un travail au quotidien. Il y a, par exemple, des retards volontaires de paiements. Il y a également des cas d'incompréhension entre personnes qui n'ont pas la même unité de mesure : certains raisonnent en millions d'euros et ne comprennent donc pas l'importance de payer rapidement des factures portant sur quelques milliers d'euros. Je rencontre un maximum de gens, les syndicats, les fédérations, les PME, pour faire évoluer les comportements par le biais de classements, d'actions, de médiations, de la charte que vous avez citée, ainsi qu'au travers du travail des filières.
S'agissant du naval, à l'occasion du salon Euromaritime, nous avons fait signer la charte par la fédération et les PME et ETI du secteur, pour faire évoluer les comportements.
Enfin, pour tout ce qui concerne les relations avec les banques, je vous renvoie vers la médiatrice du crédit, qui est saisie par les entreprises ayant des difficultés pour trouver des financements auprès des banques. Il y a une vraie complémentarité entre nos deux missions. Il serait utile que vous l'entendiez.
Les collectivités territoriales n'ont certes pas à interférer avec votre action. Cependant, elles sont très souvent sollicitées en amont pour accompagner les implantations des ETI. Elles sont également sollicitées quand cela se passe mal. Il convient donc de ne pas les écarter systématiquement.
Par lettre en date du 6 février, notre collègue Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, m'a indiqué que sa commission envisageait de créer prochainement un groupe de travail restreint sur le secteur économique des jeux vidéo et a désigné M. André Gattolin. Elle propose d'y associer notre commission des affaires économiques.
Cette proposition me semble devoir retenir notre attention, et ce à deux titres :
- d'une part, en raison des conséquences, sur les entreprises françaises, de la délocalisation de cette industrie autrefois florissante, notamment au Canada où l'incitation fiscale est particulièrement avantageuse pour ce secteur d'activité ;
- d'autre part, parce que la « révolution numérique » a profondément modifié les usages des joueurs, les emplois, le modèle économique et l'environnement technologique de l'industrie du jeu vidéo sont donc aujourd'hui en profonde mutation.
Le groupe de travail aura donc pour objectif de comprendre les bouleversements rencontrés depuis le début des années 2000 par l'industrie du jeu vidéo afin d'envisager les moyens de recréer un environnement économique favorable à la croissance de cette industrie pour, peut-on l'espérer, redevenir la référence mondiale du jeu vidéo et retrouver la place de leader qui fût la nôtre.
Je vous propose de désigner notre collègue Bruno Retailleau.
La commission approuve cette désignation.
- Présidence de M. Martial Bourquin, président -
La commission procède à l'examen des amendements sur la proposition de loi n° 270 (2012-2013), adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes.
La commission a tout d'abord adopté, sur la proposition de M. Daniel Raoul, rapporteur, 16 amendements tendant à :
réaliser des coordinations juridiques aux articles 3, 7 bis et 12 quater ;
en conséquence de la décision du Conseil constitutionnel (DC 2012-658) du 13 décembre 2012, supprimer l'audition devant les commissions permanentes du Parlement des membres du collège de la Commission de régulation de l'énergie nommés par décret, proposée à l'article 5 ;
corriger également une erreur matérielle à l'article 5 et clarifier la rédaction du même article ;
faciliter le raccordement des réseaux des installations marines utilisant les énergies renouvelables, en complétant l'article 12 ter ;
à l'article 15, imposer la constitution de parcs d'au moins trois éoliennes ou d'une puissance minimale de six mégawatts pour les installations soumises à autorisation au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, tout en permettant l'extension des parcs remplissant cette condition.
Puis la commission examine les amendements de séance.
Les avis et les amendements adoptés sont retracés dans le tableau ci-dessous.
(article 48 du règlement) S/amdt 130 à l'amdt 63 M. Daniel Raoul, rapporteur Adopté 63 MM. Jean-Claude Lenoir et Ladislas Poniatowski et les membres du Groupe Union pour un Mouvement Populaire Favorable 64 MM. Jean-Claude Lenoir et Ladislas Poniatowski et les membres du Groupe Union pour un Mouvement Populaire Défavorable Article 12 quater Installations d'éoliennes en outre-mer 62 MM. Jean-Claude Lenoir et Ladislas Poniatowski et les membres du Groupe Union pour un Mouvement Populaire Défavorable Article 14 Expérimentation d'une tarification sociale de l'eau 120 M. Philippe Kaltenbach Défavorable 118 M. Philippe Kaltenbach Défavorable 125 M. Michel Teston au nom de la commission du développement durable Favorable 18 M. Christian Cambon et plusieurs de ses collègues Défavorable 119 M. Philippe Kaltenbach Défavorable 123 M. Jean-Claude Requier Avis du Gouvernement 126 M. Michel Teston au nom de la commission du développement durable Favorable 19 MM. Hervé Marseille et Christian Cambon Avis du Gouvernement Article 15 Suppression de la règle des cinq mâts 65 MM. Jean-Claude Lenoir et Ladislas Poniatowski et les membres du Groupe Union pour un Mouvement Populaire Défavorable 131 M. Daniel Raoul, rapporteur Adopté 26 M. Pierre Jarlier Irrecevable