Madame la ministre, le 12 octobre dernier, au Sénat, l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante organisait un colloque pour un monde sans amiante à l’occasion de la Journée internationale des victimes de l’amiante, sous la présidence de notre collègue Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.
À cette occasion, des médecins, des chercheurs, des militants associatifs et des responsables politiques, venus de quarante-deux pays, s’étaient réunis.
L’ensemble des participants à cette riche et émouvante initiative s’étaient rassemblés autour d’un objectif commun : créer une véritable multinationale des victimes de l’amiante, selon leurs termes, pour faire face aux industries multinationales qui continuent d’utiliser ce matériau, malgré ses effets dévastateurs sur la santé publique.
À travers le monde, ce sont ainsi chaque année 2, 5 millions de tonnes d’amiante qui sont produites et qui provoquent la mort de plus de 90 000 personnes par an selon l’Organisation mondiale de la santé.
Pour sa part, la France a prononcé l’interdiction de l’amiante en 1997, soit trop tardivement, hélas ! pour désamorcer cette véritable bombe à retardement pour la santé publique dans notre pays qui pourrait coûter la vie à plus de 100 000 personnes d’ici à 2025.
Quant à l’Union européenne, elle a emboîté le pas de la France en interdisant l’amiante dans ses pays membres au 1er janvier 2005.
Cependant, le lobby de l’amiante et les intérêts économiques à court terme de certains pays de l’Union européenne s’accommodent mal de cette interdiction. Sous leur pression, une dérogation à cette interdiction a donc été introduite.
L’annexe XVII du règlement européen REACH – pour Registration, Evaluation and Autorisation of Chemicals –, toujours en vigueur, permet ainsi aux États membres de l’Union européenne d’autoriser la mise sur le marché et l’utilisation de diaphragmes contenant de l’amiante chrysotile dans les cellules d’électrolyses existantes. L’Allemagne, notamment, s’est ainsi engouffrée dans la brèche en important, en 2010, 60 tonnes de fibres d’amiante à l’état brut.
Cette réintroduction de l’amiante expose des populations européennes à un risque inacceptable pour leur santé et brouille le message de l’Union européenne.
En effet, comment l’Union européenne peut-elle prôner l’interdiction de l’amiante dans le monde, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé et, dans le même temps, continuer d’en importer ?
La production astronomique d’amiante dans des pays industriels comme la Russie, la Chine, le Brésil ou le Canada constitue pourtant un défi pour l’Union européenne. Il est en effet effroyable de constater que 125 millions de travailleurs, dont la plupart vivent dans le tiers-monde, sont encore aujourd’hui exposés.
Les participants à ce colloque ont lancé un vibrant appel en faveur d’une interdiction mondiale de l’amiante et ont rappelé l’urgence qu’il y a à mettre fin aux doubles standards entre les pays industrialisés et les pays en voie de développement, les premiers exportant l’épidémie de cancer de l’amiante vers les seconds.
Madame la ministre, quelles mesures diplomatiques le Gouvernement entend-il prendre pour que la France joue un rôle prépondérant afin de débarrasser entièrement l’Europe et le monde de ce fléau qu’est l’amiante ?