Intervention de Catherine Tasca

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 19 février 2013 : 1ère réunion
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Audition de Mme Christiane Taubira garde des sceaux ministre de la justice et Mme Dominique Bertinotti ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé chargée de la famille

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Mesdames les ministres, vous avez été très sages de distinguer ce texte de celui qui sera présenté plus tard et dont nous n'avons pour le moment débattu que très partiellement.

En effet, même en l'état, le texte sur lequel nous allons avoir à prendre nos responsabilités ouvre des perspectives qui demandent réflexion. Je pense, notamment, à la question de l'adoption.

A mes yeux, comme à ceux de nombreuses personnes, le mariage d'un couple de même sexe ne pose aucun problème. Il s'agit en effet d'un contrat entre deux adultes. L'autoriser, c'est une question non seulement d'égalité, mais aussi de liberté.

Quant à la question de l'adoption, qui est traitée dès ce projet de loi, elle pose problème. Nous nous devons d'apporter des réponses en la matière. On l'a dit, dans la majorité des cas l'adoption sera intrafamiliale, chacun pouvant adopter l'enfant de son conjoint, ce qui est éminemment souhaitable. Cette disposition apporte à l'enfant élevé dans un tel cadre une sécurité réelle.

En revanche, dans la mesure où le droit de l'adoption n'est pas modifié en profondeur, la distinction entre adoption simple et adoption plénière est conservée, ce qui pose véritablement problème.

En effet, l'adoption plénière s'inscrit dans l'histoire du droit de la propriété. Lorsque l'on a la chance de pouvoir adopter un enfant, celui-ci devient pleine propriété de ses nouveaux parents. Dans notre monde moderne, une telle conception me paraît choquante. Selon moi, il est donc important d'évoquer ce sujet.

Ma seconde observation concerne la nécessaire protection des enfants, une préoccupation qui devrait guider nos travaux sur le second texte en préparation. Depuis le début de la discussion sur le projet de loi visant à autoriser le mariage aux couples de même sexe, on a un peu l'impression d'être au pays des Bisounours !

Les couples homosexuels ne seront ni pires ni meilleurs que les couples hétérosexuels. Ce qui est difficile à vivre, c'est le couple, la famille, quelle que soit l'orientation sexuelle. Quand on commencera à repenser la famille, il faudra peut-être sortir de la vision quelque peu angélique qui, jusqu'ici, a guidé nos débats, pour s'attacher à travailler sur la protection de l'enfant. Aujourd'hui, c'est le désir des adultes qui fait la loi, qui crée le droit. A partir du moment où nous ouvrons des horizons, comme beaucoup semblent le souhaiter, il nous faut traiter très sérieusement cette question.

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