Il est nécessaire de revoir le règlement européen « Inco » concernant l'information du consommateur sur les denrées alimentaires. Avec Stéphane Le Foll, nous nous sommes rendus à Bruxelles la semaine dernière, mais seul le Royaume-Uni nous a soutenus pour demander à la Commission de remettre son rapport rapidement, afin que figure sur l'étiquette des plats préparés l'origine de la viande.
Le système de traçabilité a parfaitement fonctionné. C'est grâce à lui que nous avons pu remonter, en quarante-huit heures, jusqu'aux Pays-Bas et la Roumanie. Nous avons rencontré le ministre de l'agriculture roumain et examiné les pièces remises par son administration : il apparaît que l'on a vendu, là-bas, du cheval pour du cheval. C'est chez nous que nous avons pris du cheval pour du boeuf ! Il s'agit donc moins d'un problème de prévention des risques sanitaires que de tromperie économique. Ce type de comportement est heureusement marginal, et multiplier les policiers et gendarmes ne changerait rien. Outre les efforts à faire en matière de traçabilité des produits transformés - et il y a là un avantage pour la filière viande française -, nous devons repenser la façon dont nous protégeons le secteur des tromperies de cette nature.
J'ai apprécié que d'anciens ministres, dont mon prédécesseur, saluent la façon dont cette crise a été gérée. L'opinion publique est très sensible, et un mince faisceau d'informations lui suffit parfois pour s'emporter. Cette crise eût été facile à transformer en panique sanitaire. La décision qu'a prise le ministre de l'agriculture de suspendre l'agrément de l'entreprise en cause était la bonne, en vertu du principe de précaution.
Le futur projet de loi sur la consommation devra tirer toutes les conséquences de cette affaire. Les peines applicables aux cas de tromperies économiques sont aujourd'hui de deux ans d'emprisonnement et de 37 500 euros d'amende. Comparés aux 550 000 euros de profit que l'on peut manifestement engranger en six mois, c'est bien peu. Le quantum peut toutefois être multiplié par deux s'il y a modification de la composition des aliments, ce qui ne semble pas être le cas ici. Dans le cadre du projet de loi, nous étudierons la possibilité de réévaluer ces sanctions pour les rendre plus dissuasives.
Deuxième élément, nous sommes devant un contentieux économique de masse, qui tomberait sous le coup d'une action de groupe - si nous votions la création d'un tel mécanisme - qui pourrait être portée par des consommateurs derrière une association les représentant, contre l'entreprise responsable du préjudice économique. En effet, si les produits incriminés ont été retirés, reste que ceux qui ont mangé du cheval en pensant manger du boeuf ont subi un préjudice. Nous examinerons les moyens de protéger plus efficacement les consommateurs et de définir les niveaux de réparation qui pourraient être décidés par le juge.
Je rappelle que l'affaire a été déclenchée par l'autocontrôle d'un industriel, qui a fait remonter l'information jusqu'à l'entreprise Comigel, qui a saisi les autorités luxembourgeoises à la demande des autorités britanniques, avant que nous en soyons à notre tour informés. J'observe que nous avons été bien inspirés de sanctuariser, dans la loi de finances pour 2013, les effectifs de la DGCCRF : dans l'Aude, la réforme de l'administration territoriale de l'État (RéATE) et la révision générale des politiques publiques (RGPP) avaient fait passer les effectifs de la direction départementale de 16 à 10, et en Moselle de 43 à 20. Menons la réforme de l'État et la modernisation de l'action publique (MAP) si l'on veut, mais tenons compte des limites à la polyvalence des agents de terrain. Si nous ne voulons pas voir éclater davantage de scandales, nous devons adapter nos moyens de contrôle aux nouvelles pratiques, qu'il s'agisse de surveiller la chaîne du froid, les derniers loisirs pour enfants ou les pratiques du cybercommerce - dont je rappelle qu'il a représenté 9 milliards d'euros pour la seule période de Noël en France.
En ce moment même, l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp), en lien avec le service national d'enquête (SNE) mène des auditions et des perquisitions chez Spanghero. J'ignore combien de temps prendra la procédure, mais j'observe que le parquet a été prompt à réagir.