Intervention de Ladislas Poniatowski

Réunion du 21 février 2013 à 10h00
Débat d'étape sur les travaux du conseil national du débat sur la transition énergétique

Photo de Ladislas PoniatowskiLadislas Poniatowski :

… et par l’alourdissement des voitures pour des raisons de sécurité et de réduction des nuisances sonores, pour ce qui est du transport.

En d’autres termes, si nous devons mener une politique proactive pour réduire à la source notre consommation de combustibles fossiles, nous avons aussi le devoir de favoriser le basculement d’une grande part de la consommation d’énergie vers l’électricité.

Ce basculement sera bien sûr possible dans le secteur des transports avec le développement des véhicules hybrides ou, à plus long terme, strictement électriques. L’amélioration du rendement des moteurs thermiques, lorsqu’ils sont associés à la motorisation électrique des véhicules hybrides biénergie, sera ainsi un levier déterminant pour la transition énergétique. De même, les progrès que nous pouvons espérer en matière de batteries au lithium pour les véhicules fonctionnant exclusivement à l’électricité permettront, combinés avec le développement de transports collectifs électriques par la route et le rail, de réduire notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles.

De la même manière, le retrait des combustibles fossiles pour le chauffage des logements doit être accéléré. Pour ce faire, les solutions seront multiples : cogénération, bois, solaire thermique, pompes à chaleur… Madame la ministre, vous les avez d’ailleurs évoquées avant-hier en présentant des mesures en faveur de la réalisation d’économies d’énergie en matière d’habitat.

Pour en finir avec cette évocation d’une politique renouvelée de basculement de notre consommation des combustibles fossiles vers des combustibles renouvelables et l’électricité, j’indiquerai que nous avons sans doute ici de véritables marges de manœuvre. Leur mobilisation aura cependant un coût fiscal qu’il faudra assumer, pour pouvoir financer des dispositifs incitatifs : niches, crédits d’impôt, subventions… De plus, l’État devra prendre ses responsabilités en accompagnant et en protégeant les technologies de pointe qui permettront ce saut qualitatif.

En définitive, le premier enjeu de la transition énergétique est, et restera dans l’avenir, la limitation de notre consommation de combustibles fossiles.

C’est une fois cette tâche accomplie que nous pourrons arrêter des choix quant aux sources de notre production électrique. En effet, vous l’avez sans doute tous compris, en limitant le recours aux combustibles fossiles, nous engendrerons mécaniquement une hausse très significative de notre consommation électrique, en dépit de toutes les mesures prises visant à favoriser les économies d’énergie.

Certains experts, pour légitimer le discours selon lequel le nucléaire serait inutile, tentent de nous faire croire que la demande en électricité baissera de 200 térawattheures d’ici à 2050. Sur quels éléments se fondent-ils pour affirmer cela ? Mystère !

Or, si nous nous référons au niveau de notre consommation actuelle, qui stagne alors que nous sommes en pleine crise économique, ou au basculement mécanique des combustibles fossiles vers l’électricité, que nous devons favoriser, comme je viens de l’expliquer, nous constatons que notre demande d’électricité ne pourra pas diminuer à l’horizon 2050.

Certains experts nous prédisent une demande d’électricité flirtant avec les 900 térawattheures annuels, même en se fondant sur des hypothèses de croissance faible, en tablant sur le respect d’une partie des objectifs du Grenelle de l’environnement et en omettant de prendre en compte le report de la consommation de combustibles fossiles sur la demande d’électricité.

En d’autres termes, et je le dis sans aucune intention polémique, rien ne nous permet d’espérer une diminution de notre consommation d’électricité, et ce malgré toutes les mesures d’économie d’énergie que nous pourrons adopter.

Il existe bien sûr des économies possibles à court et à moyen termes. Je prendrai l’exemple de l’isolation, que vous avez évoqué avant-hier, madame la ministre. Sachez que le chauffage domestique représente environ la moitié de la consommation électrique de nos concitoyens. Il existe donc des marges de manœuvre dans ce domaine.

Toutefois, dans l’état actuel de nos connaissances sur l’évolution des cours des matières premières à trente ans et sur les avancées techniques escomptables à l’horizon 2030, il nous est impossible de quantifier notre future consommation électrique à 100 térawattheures près ; nous sommes en plein brouillard pour ce qui est de l’évaluation de notre consommation d’électricité à l’horizon 2050.

Dire cela ne constitue en rien un aveu d’impuissance ; c’est, je le crois, une information à très forte valeur ajoutée, et nous devrions, quel que soit l’enracinement politique et idéologique de nos formations respectives, garder ce constat bien en tête.

Madame la ministre, parce que l’avenir énergétique de la France et du monde est plus qu’incertain, nous nous opposons à toute décision susceptible de compromettre le champ des possibles qui s’offrira aux futurs responsables publics en matière d’approvisionnement énergétique. Concrètement, nous ne pouvons cautionner la volonté du Président de la République de faire passer la part du nucléaire dans le mix électrique de 75 % à 50 % d’ici à 2025.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion