Intervention de Delphine Batho

Réunion du 21 février 2013 à 10h00
Débat d'étape sur les travaux du conseil national du débat sur la transition énergétique

Delphine Batho :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier Jean-Pierre Chevènement de son initiative. À un moment où les Français sont surtout préoccupés par la crise économique, la discussion qui a lieu ce matin au Sénat permet de donner de la visibilité à un débat national très important puisque les décisions qui en résulteront engageront la nation non seulement pour ce quinquennat, mais aussi pour les décennies à venir.

Je tiens également à saluer la qualité de vos interventions et à préciser qu’il n’a jamais été question ni pour moi ni pour le Gouvernement de ne pas respecter la souveraineté du Parlement. C’est bien lui qui aura le dernier mot lors de l’examen du projet de loi de programmation pour la transition énergétique. D’ailleurs, pour éviter la coupure que nous avons connue par le passé, notamment dans le cadre du Grenelle de l’environnement, avec, d’un côté, la démocratie participative et le processus de concertation avec les partenaires sociaux ou les associations environnementales, et, de l’autre, la démocratie représentative, j’ai souhaité associer les parlementaires tout au long du processus. Ainsi, un certain nombre de sénateurs, Roland Courteau, Mireille Schurch, Ronan Dantec, Raymond Vall, Jean-Claude Lenoir et Jean-Claude Merceron, participent au Conseil national du débat sur la transition énergétique, qui ne s’appelle plus désormais « Parlement ».

J’aimerais que les recommandations qui seront issues de ce débat national donnent lieu à un débat en séance publique au Sénat et à l’Assemblée nationale avant le dépôt par le Gouvernement du projet de loi de programmation à l’automne. En tout cas, sachez que les commissions parlementaires compétentes seront pleinement associées aux discussions sur l’ensemble des enjeux.

Ce débat national n’est pas un débat d’experts. Certes, nous avons besoin d’avis scientifiques, et je salue d’ailleurs le travail des économistes, rassemblés notamment autour d’Alain Grandjean, et les membres du comité de pilotage : Laurence Tubiana, Anne Lauvergeon, Michel Rollier, Georges Mercadal, Bruno Rebelle et Jean Jouzel. Quant à Thierry Wahl et son équipe, qui sont à mes côtés ce matin, ils assurent le secrétariat général.

Ce débat, je le répète, n’est pas un débat d’experts. Il va impliquer les corps intermédiaires et associer les citoyens. Au cours des six mois qu’il durera, il comptera des temps forts, comme les journées de l’énergie des 29, 30 et 31 mars prochain, au cours desquelles les entreprises productrices d’énergie, notamment, organiseront des journées portes ouvertes, ou la journée citoyenne du 25 mai, au cours de laquelle, dans toutes les régions, cent citoyens néophytes, par conséquent des gens qui ne sont pas experts en la matière, participeront à une sorte de jury citoyen sur le thème de la politique de l’énergie.

Seront également organisés des débats territoriaux associant, bien évidemment, les collectivités locales. Nous avons fait le choix, novateur, de nouer un partenariat avec les régions et de nous inscrire dans une logique de confiance vis-à-vis des collectivités territoriales. Pour ce faire, nous nous sommes inspirés de la démarche qui a été suivie pour l’élaboration du pacte électrique breton, qui peut servir de modèle pour l’organisation, partout sur le territoire, de conférences régionales de l’énergie avec l’ensemble des partenaires concernés.

Monsieur Chevènement, vous avez eu raison, en commençant votre propos, de citer longuement l’article du journal Les Echos consacré aux déclarations qu’a faites dernièrement la CRE sur la hausse du prix de l’électricité. Il faut savoir que, au cours du précédent quinquennat, l’électricité a augmenté de 14 %. Reste que ses prévisions ne sont pas récentes puisqu’elles ont été établies en janvier 2012, en pleine campagne présidentielle.

La hausse structurelle des coûts de l’énergie confirme, s’il en était besoin, la nécessité impérieuse d’organiser un débat national sur la transition énergétique et sur l’énergie. Il ne s’agit pas là d’un vague sujet : la hausse des factures d’énergie, l’explosion de la précarité énergétique, c’est une réalité ! Le déficit de 69 milliards d’euros de notre balance commerciale en raison des importations d’hydrocarbures, principalement de pétrole, c’est une réalité !

La France, pendant longtemps, a tiré un réel avantage du faible coût de l’énergie, mais, désormais, on ne sait pas où s’arrêtera cette hausse et, si l’on ne fait rien, nous ne pourrons que subir.

L’un des enjeux du débat national sur la transition énergétique, c’est de recouvrer notre souveraineté en matière énergétique. La France a bénéficié du modèle élaboré au sortir de la guerre par le Conseil national de la résistance, celui d’un grand service public de l’électricité et du gaz, basé sur des entreprises nationales. Ce modèle, il faut avoir l’honnêteté de le dire, a été malmené ces dernières années par différents processus de libéralisation. À cet égard, je me félicite que la Cour des comptes ait récemment décidé de rédiger un rapport dressant le bilan des processus d’ouverture à la concurrence, demande récurrente d’un certain nombre de parlementaires. Ce rapport sera utile pour le débat et nous permettra d’apprécier les conséquences des processus de libéralisation que nous avons connus ces dernières années.

Un autre enjeu du débat national sur la transition énergétique tel que je le conçois, c’est de renouer avec la maîtrise collective de l’énergie, de renouer avec une politique publique en la matière, de renouer avec ce que doit être le modèle français de transition énergétique ; j’y reviendrai.

Laurence Rossignol a eu raison d’insister, certes avec talent, mais de façon un peu provocatrice, …

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