Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur ce sujet – consensuel, si j’en juge d’après les interventions prononcées tant par les orateurs du groupe écologiste que par M. Henri de Raincourt, que je remercie d'ailleurs de ses propos, notamment sur le Mali –, je centrerai mon discours sur l’Afrique.
Quand le Président de la République, à Bamako, déclare : « Lorsque la France était menacée pour son unité territoriale, qui est venu alors ? C’est l’Afrique ! C’est le Mali... Nous payons aujourd’hui notre dette à votre égard », cela, un an après une série de discours prononcés en Afrique, il rompt publiquement et espérons-le, définitivement, avec cinquante années d’errements post-coloniaux, et cela jette les bases d’une collaboration dans l’égalité avec l’Afrique.
Cette doctrine moderne doit être étendue à tout ce qu’on appelle par commodité le Sud de la planète. Et ce Sud, qu’on nommait autrefois le tiers monde, n’est plus ce qu’il était il y a seulement trente, voire vingt ans. Il s’est diversifié par le développement des pays émergents, qui conduit désormais à ne plus le considérer comme un bloc homogène. À l’intérieur de la plupart des pays qui le composent, à côté de la pauvreté la plus extrême, est apparue – plus ou moins, mais plutôt plus que moins – une classe moyenne dynamique qui porte l’avenir de ces pays et, singulièrement, de l’Afrique.
Cette Afrique en plein développement, bénéficiaire d’une croissance économique moyenne annuelle de l’ordre de 6 à 7 %, encore que celle-ci soit diminuée par l’essor plus modéré de l’Afrique du Sud, déjà plus développée, cette Afrique dynamisée par sa progression démographique plus que par ses ressources naturelles, est même en train de trouver une croissance endogène.
Que cette croissance doive attirer les investissements français est une évidence qui, pourtant, semble bien avoir été négligée depuis une vingtaine d’années. Certes, des groupes puissants assurent la présence française. Chacun les connaît. Toutefois, dans le même temps, par peur de l’instabilité sans doute, la masse des nouveaux investissements français s’est orientée volontairement vers l’Asie, laissant en Afrique francophone de l’Ouest, en particulier, la place et même le champ libre à des concurrents européens – Anglais, Portugais, Espagnols, Grecs –, à des concurrents nord-américains et à des investisseurs issus de pays dits émergents : Brésil, Turquie, Corée, et, bien sûr, Chine.
En s’appuyant sur cette donne nouvelle qu’est la croissance, en s’appuyant sur le progrès que constitue une stabilité politique réellement améliorée, mesurée de façon précise, malgré d’inévitables soubresauts, en s’appuyant sur l’existence de cette classe moyenne en pleine progression, la France doit réinvestir par ses grandes entreprises, ses PME, ses banques actuellement tragiquement absentes : elle doit réinvestir le terrain économique africain.
Ce n’est pas là de l’aide au développement au sens humanitaire ou assimilé du terme, mais c’est le moyen le plus puissant pour permettre à l’Afrique d’émerger. Et l’État doit y veiller, dans le respect des droits humains, de même que l’État doit agir avec fermeté pour promouvoir cette croissance en agissant dans le même sens afin qu’elle soit respectueuse des bonnes règles du travail.