Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 28 février 2013 à 9h00
Application de l'article 11 de la constitution — Adoption d'un projet de loi organique et d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur, rapporteur :

En effet, je revendique une attitude foncièrement et profondément républicaine.

L’article 11 de la Constitution a été modifié en 2008. Certains, ici, n’étaient pas d’accord avec la révision constitutionnelle votée cette année-là, et s’étaient en particulier opposés à cette modification de l’article 11. Toutefois, quelles qu’aient été alors nos convictions, il est désormais écrit dans notre Constitution, celle de tous les Français, qu’une loi organique est nécessaire. Dès lors, le législateur ne peut pas prétendre qu’il n’y a pas lieu de voter une loi organique. C’est cette attitude républicaine que je revendique.

L’article 11 nouveau de la Constitution est en trompe-l’œil. Beaucoup de nos concitoyens croient qu’il a instauré un référendum d’initiative populaire, or cela est faux : comme vous l’avez très bien dit, madame la ministre, il a en réalité instauré un référendum d’initiative partagée. Encore faut-il être prudent : vous avez à juste titre rappelé que Robert Badinter estimait que ce dispositif s’apparente davantage à un droit de pétition qu’à un référendum d’initiative partagée.

En effet, à la lecture de l’article 11 de la Constitution, il apparaît qu’un cinquième des parlementaires, députés ou sénateurs, doivent être à l’origine d’une initiative prenant la forme d’une proposition de loi. Le Conseil constitutionnel en est alors saisi : il est certes préférable de vérifier la conformité du texte à la Constitution avant que l’on ne cherche à obtenir le soutien d’un dixième de l’électorat, soit quelque 4, 5 millions de personnes…

Ensuite, toujours aux termes de l’article 11, « si la proposition de loi n'a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique, le Président de la République la soumet au référendum ». Cela signifie que les 4, 5 millions de signatures recueillies pour soutenir l’initiative d’un cinquième des parlementaires ont pour seul effet d’indiquer au Parlement qu’il doit examiner la question soulevée. Si la proposition de loi n’a pas été débattue par les deux assemblées dans le délai imparti, le Président de la République est alors tenu de la soumettre au référendum.

Parlons clair, mes chers collègues : il y a six groupes parlementaires au Sénat et autant à l’Assemblée nationale, chacun d’entre eux disposant de créneaux réservés dans l’ordre du jour ; il suffit donc qu’un groupe inscrive la proposition de loi à son ordre du jour réservé pour qu’elle soit considérée comme ayant été examinée, quelle que soit l’issue du vote… Une fois que le même processus se sera déroulé dans l’autre assemblée, le Président de la République ne pourra plus, en vertu de la Constitution, organiser de référendum ! En effet, aux termes de l’article 11 nouveau, il ne peut soumettre la question posée au référendum que si les deux assemblées n’ont pas examiné la proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion