Intervention de Catherine Génisson

Réunion du 28 février 2013 à 15h00
Maisons de naissance — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Catherine GénissonCatherine Génisson :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis pour débattre de l’expérimentation des maisons de naissance, à l’initiative de Mme Dini, dont je veux saluer la force de conviction. Je tiens également à souligner la qualité de son rapport, qui est très documenté.

Il semble légitime que les femmes qui le souhaitent puissent bénéficier d’un suivi de grossesse et de conditions d’accouchement raisonnablement médicalisés lorsque la grossesse se déroule normalement et que l’accouchement est physiologique, c'est-à-dire sans complication.

Je ne rappellerai ni le contexte national et international dans lequel se situent ces propositions, ni les péripéties qui ont précédé leur présentation aujourd'hui, Mme la ministre comme Mme le rapporteur l’ayant fait.

Je veux néanmoins souligner que ces propositions interviennent alors que le réseau des maternités s’est profondément transformé, en particulier depuis 1998 et leur classement en trois catégories, et qu’il a connu une profonde restructuration. Durant les quarante dernières années, 61 % des maternités ont été supprimées ; quant à celles qui ont été restructurées, elles ont globalement vu leur volume d’accueil augmenter.

Rien n’est plus naturel que de bénéficier d’un suivi personnalisé pendant la grossesse et de vivre son accouchement, quand celui-ci est physiologique, dans un environnement chaleureux. La grossesse et l’accouchement ne sont pas des maladies !

L’organisation de la maison de naissance doit relever de la responsabilité des sages-femmes et des maïeuticiens, qui ont compétence pour pratiquer des actes médicaux. À cet égard, je souligne que le Collège des gynécologues et obstétriciens français soutient ce projet.

Je me permettrai néanmoins quelques commentaires, assortis d’un rappel des obligations devant être respectées dans le cadre de l’expérimentation.

Il est légitime de ne pas surmédicaliser la prise en charge d’une grossesse et d’un accouchement, mais il faut reconnaître que les progrès médicaux ont été déterminants pour le suivi des grossesses pathologiques et pour faire baisser de façon très significative les taux de mortalité, même si l’on ne peut se satisfaire des taux actuels, en particulier dans les départements d’outre-mer et notamment en Guyane.

Sans oublier l’importance de la qualité de la relation humaine, nous devons nous poser la question du bon niveau, de la juste place que doivent avoir la technique et la médicalisation. Cette observation vaut d’ailleurs non seulement pour le suivi de la maternité, mais pour toute prise en charge médicale. Si nous devons rester conscients des risques d’une possible surmédicalisation, nous devons aussi être fiers de nos progrès médicaux !

Je souhaite redire ensuite à quel point il sera important, quel que soit le périmètre de l’expérimentation, de ne pas faire de discrimination en matière d’accueil des femmes dans les maisons de naissance, point sur lequel vous avez d’ailleurs insisté, madame la ministre. L’égalité d’accueil dans le secteur public comme dans le secteur privé doit être totalement respectée.

Je veux aussi souligner que le débat que nous engageons intervient dans un contexte où nos concitoyens s’inquiètent de la réduction de l’offre de proximité en matière de maternité. Loin de moi toute idée de ne pas défendre l’exigence de sécurité – je serais mal placée pour le faire ! – mais il faut clairement expliquer à nos concitoyens que l’expérimentation des maisons de naissance et la fermeture des maternités sont des sujets qui ne se recouvrent pas, et je vous remercie, madame la ministre, de l’avoir fait.

Madame le rapporteur, vous avez également insisté sur le fait que les maisons de naissance seraient attenantes à des maternités, pour garantir la sécurité, et qu’elles ne pourront donc en aucun cas se substituer à des maternités qui ferment.

Pour autant, l’aménagement de notre territoire en matière d’offre de soins est un sujet prégnant. Il est important d’affirmer avec force, comme vous l’avez fait, madame la ministre, que les fermetures de maternité ne répondent qu’à une exigence de sécurité.

Ces lieux de soins ne doivent être fermés qu’avec parcimonie. Dès lors qu’il n’y a plus d’accouchements, ils doivent pouvoir être maintenus pour le suivi des femmes tant en prénatal qu’en post-natal, suivi qui doit pouvoir être assuré par des professionnels de santé issus de maternités en activité.

Le sujet est très sensible. Dans ces conditions, il serait plus que maladroit de permettre l’implantation de maisons de naissance dans des territoires où l’on ferme des maternités.

Enfin, dans le registre des commentaires, il me semble important que soient précisées les conditions d’examen du nouveau-né au moment de sa sortie de la maison de naissance.

J’en viens maintenant aux obligations qui devront être respectées dans le cadre de l’expérimentation des maisons de naissance.

Vous l’avez rappelé, madame le rapporteur, les autorisations d’expérimentation relèveront de la décision du Gouvernement après avis de la Haute Autorité de santé, qui déterminera le cahier des charges. En outre, les autorisations d’expérimentation pourront être immédiatement interrompues si nécessaire.

Cette exigence qualitative est fondamentale, de même que le respect de la sécurité des femmes lors de leur prise en charge est incontournable. Le sujet a largement alimenté nos débats en commission, et la proposition à laquelle nous sommes parvenus me semble satisfaisante.

Deuxième obligation à laquelle nous devons souscrire, l’expérimentation ne doit ni peser sur le fonctionnement de nos hôpitaux, ni obérer leur budget, en particulier dans le contexte très contraint que nous connaissons tous.

Sur ce sujet, l’expérimentation peut être instructive. Elle doit d’abord acter la sanctuarisation de la prise en charge à 100 % de la grossesse, de l’accouchement et des soins de suite de couches, ce que souligne le rapport.

Puis elle doit permettre de définir les procédures qui ne pénaliseront pas financièrement nos hôpitaux. À ce titre, notre groupe souhaite que les MIGAC, les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, qui peuvent être sollicitées pour la réalisation de ces projets, restent dans le service public.

L’expérimentation doit enfin nous conduire à travailler sur les modalités de financement permettant la reconnaissance de l’intervention libérale des sages-femmes et des maïeuticiens qui animeront les maisons de naissance lorsqu’ils en revendiqueront l’autonomie de fonctionnement.

Au risque de me répéter, je dirai donc que cette proposition de loi est intéressante : la question de l’aménagement égalitaire du territoire en matière d’offre de maternités est traitée, le service public est respecté et la sécurité de la prise en charge est au cœur des préoccupations.

En conséquence, mon groupe accepte que les maisons de naissance expérimentales voient le jour, étant précisé que, comme vous l’avez vous-même indiqué, madame la ministre, des salles de naissance physiologiques peuvent également être mises en place au sein même des services de maternité. Mais attendons maintenant les résultats de l’expérimentation ! §

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