Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les graves problèmes posés par les pratiques de sous-traitance en cascade impliquant des entreprises étrangères, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, ainsi que dans celui du transport routier de marchandises.
Le principe de la liberté de prestation de services inscrit à l’article 49 du traité instituant la Communauté européenne a permis le développement des interventions sur le sol français d’entreprises étrangères et de leurs salariés.
Afin d’encourager l’exercice du principe de la liberté de prestation de services dans un cadre bien défini, de garantir une concurrence loyale entre les entreprises et de mieux protéger les travailleurs, les États membres de l’Union et le Parlement européen ont adopté, le 16 décembre 1996, la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services.
Malheureusement, au mépris complet de cette directive, de véritables réseaux ont été organisés afin d’offrir à des entreprises françaises une main-d’œuvre à bas coût. Une telle pratique bafoue les droits élémentaires normalement garantis par la législation, tant européenne que française, en matière de détachement de travailleurs étrangers.
En conséquence, de nombreux salariés travaillent sur le territoire français tout en étant soumis à un contrat de travail conclu dans leur pays d’origine et ne respectant pas les minima sociaux imposés par la législation française et les conventions collectives étendues.
Je peux citer, à cet égard, l’exemple d’un grand chantier du centre-ville de Clermont-Ferrand, où les activités de ferraillage ont été sous-traitées à des entreprises spécialisées dans le dumping social qui emploient des Africains ayant fui la misère de leur pays en transitant, le plus souvent, par le Portugal. Des ouvriers polonais travaillent aussi sur ce chantier.
En 2012, l’une de ces entreprises a été placée en redressement judiciaire, et les personnels intérimaires n’ont pas été payés pendant trois mois. En fait, les salariés sont rémunérés à la tonne de ferraille posée. En cas d’intempéries, ils ne sont donc plus payés… Aucune qualification n’est reconnue et les déplacements sont très faiblement indemnisés.
Cette situation porte préjudice à l’ensemble des travailleurs du secteur du bâtiment. Elle est difficilement supportable pour les salariés soumis aux règles de droit françaises, qui se sentent mis en concurrence, dans leurs entreprises, avec ces travailleurs à bas coût, au mépris des règles du détachement fixées par la directive européenne précédemment citée.
De telles dérives ne devraient pas exister. Plusieurs mesures sont nécessaires pour remédier à cette situation : il convient, en particulier, d’assurer la transparence sociale par la mise à disposition des fiches de paie et des contrats des salariés employés sur un chantier, et de vérifier le respect des règles légales et conventionnelles pour tous les salariés employés en sous-traitance ou en intérim.
Monsieur le ministre, ces pratiques, qui nuisent aux professions concernées, sont créatrices de chômage et ne respectent pas l’être humain. Je compte sur le Gouvernement pour les faire cesser.