Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur l’accès à l’assurance chômage pour les Français ayant travaillé dans un autre pays de l’Union européenne.
Selon les derniers chiffres de l’INSEE, publiés jeudi dernier, 10, 2 % de la population active était au chômage en France métropolitaine au quatrième trimestre de 2012. Un tel niveau n’avait pas été atteint depuis le printemps 1999. Même durant la crise des années 2008 et 2009, le taux de chômage n’avait pas franchi ce seuil.
Les jeunes sont les plus touchés. Plus d’un quart d’entre eux sont aujourd’hui au chômage. D’après un sondage Deloitte-IFOP publié il y a deux semaines, 27 % des jeunes diplômés cherchant un travail pensent que leur avenir professionnel se situe à l’étranger plutôt qu’en France. Bien souvent, ceux qui partent bénéficient non pas de contrats mirifiques, mais plutôt de contrats de volontariat international en entreprise ou de contrats locaux.
Dans ce contexte, nous sommes confrontés à deux impératifs : d’une part, favoriser la mobilité professionnelle, en particulier celle des jeunes ; d’autre part, assurer un filet social minimal à ces professionnels s’ils reviennent en France après avoir perdu leur emploi à l’étranger. Ces deux objectifs sont bien évidemment liés, puisqu’il est plus facile de partir lorsque l’on sait qu’une sécurité minimale est assurée au retour.
Faciliter la mobilité professionnelle est l’un des objectifs de l’Union européenne. Le principe de la libre circulation des personnes et celui de la non-discrimination du fait de la nationalité autorisent un individu à conserver ses droits aux allocations de chômage acquis dans un pays de l’Espace économique européen et à les faire valoir dans un autre pays.
Les règlements communautaires n° 883/2004 et 987/2009 visent à concrétiser ces droits en améliorant la coordination des systèmes d’assurance chômage. La législation européenne dispose ainsi que les périodes d’activité accomplies dans un autre État de l’Espace économique européen doivent être prises en compte par l’État de résidence pour le calcul des périodes d’emploi ouvrant droit à l’octroi de prestations.
Pourtant, un Français rentrant en France après avoir travaillé dans un autre État de l’Espace économique européen ou en Suisse et y ayant donc cotisé à l’assurance chômage semble ne pouvoir prétendre à une allocation chômage qu’à condition de pouvoir justifier d’une période minimale d’activité salariée sur le sol français postérieure à l’activité exercée à l’étranger. S’il ne satisfait pas à cette exigence, le demandeur d’emploi ne peut bénéficier, sous conditions, que d’une allocation forfaitaire : l’allocation temporaire d’attente. Seuls les travailleurs frontaliers bénéficient de dispositions particulières permettant de déroger à cette règle.
Monsieur le ministre, cette exigence française de justification d’une durée minimale de travail en France postérieure à l’activité exercée à l’étranger est-elle bien conforme au droit européen ?
Par ailleurs, le calcul du montant de l’allocation versée par Pôle emploi est établi sur la base des seules rémunérations perçues en France après le retour d’expatriation dans un autre pays de l’Espace économique européen. De ce fait, les rémunérations perçues au titre d’une activité exercée dans un autre État de l’Espace économique européen ne sont prises en compte que pour déterminer la durée des droits à l’allocation chômage, et non pour le calcul du montant de celle-ci, ce qui peut être fortement pénalisant pour les personnes de retour d’expatriation. Ne serait-il pas envisageable de modifier cette disposition afin de favoriser la réinsertion en France des personnes ayant travaillé ailleurs en Europe et d’encourager ainsi nos chercheurs d’emploi à tenter leur chance dans d’autres pays de l’Union européenne, puisqu’ils sauront alors qu’ils bénéficieront d’un filet de sécurité à leur retour ?
Enfin, je voudrais attirer votre attention sur la nécessité d’une meilleure information des travailleurs quant aux conséquences d’une expatriation sur leurs droits en matière d’indemnisation du chômage. Un salarié ayant travaillé sous contrat local dans un autre pays européen ne pourra bénéficier d’une indemnité chômage en France que si la cessation de son contrat répond à certains critères, variables d’un pays à l’autre, et s’il respecte un certain nombre de procédures. Monsieur le ministre, le Gouvernement pourrait-il prendre des mesures pour améliorer l’information de ces salariés ?