La direction générale des douanes et des droits indirects a récupéré le portefeuille des droits indirects qui était préalablement dévolu à la direction générale des impôts : ces droits indirects portent essentiellement sur les hydrocarbures, le tabac et les alcools. Leur produit est principalement affecté au financement de la sécurité sociale.
Initialement, les lois de financement de la sécurité sociale étaient des lois d'équilibre qui n'avaient pas vocation à lever l'impôt. À présent, nos vieux principes budgétaires ont volé en éclat et les taxes affectées se sont multipliées. Il en résulte une sorte de balkanisation des finances publiques, dorénavant construites en tuyaux d'orgue, avec un tuyau pour la sécurité sociale, un autre pour les collectivités locales et un dernier, plus petit, pour l'État, qui demeure le garant en dernier ressort.
Les impôts levés par la sécurité sociale échappent au contrôle de la direction de la législation fiscale (DLF) qui se concentre sur le budget de l'État. Nous travaillons en étroite concertation avec la Direction de la sécurité sociale (DSS), mais les initiatives partent souvent de cette direction et nous disposons généralement de très peu de temps pour les examiner avant qu'elles soient intégrées dans le projet de loi de finances ou le projet de loi de financement.
J'en viens au sujet qui vous occupe : tout a démarré en Charente avec le Pineau et sans doute avant, avec le Martini. Cette boisson intermédiaire mêlait naguère alcool fermenté et alcool distillé ; la fiscalité applicable se montait alors à 220 euros par hectolitre. Le processus de fabrication a changé et le Martini est entré dans la catégorie des vins : la taxe est désormais de 3,30 euros par hectolitre. Les producteurs de Pineau ulcérés ont déclenché une grève de l'impôt... qui dure depuis près de deux décennies ! Cependant, en 2011, les pouvoirs publics ont réduit la fiscalité pesant sur les produits intermédiaires, de 220 euros à 180 euros par hectolitre.
La fiscalité sur les alcools fermentés (le vin) est très faible, celle sur les alcools distillés, très élevée. Les producteurs ne comprennent pas toujours ces écarts. Une directive encadre cette fiscalité, si bien que les marges de manoeuvre sont étroites. Il serait judicieux de repenser la fiscalité sur les alcools, mais c'est un vaste travail.
Voulant trouver des ressources supplémentaires, la sécurité sociale a augmenté en 2011 la fiscalité sur les alcools forts tout en réduisant celle sur les produits intermédiaires, pour répondre aux attentes des producteurs de Pineau, Banyuls, etc. Le Premier ministre ayant indiqué en août 2012 que l'augmentation de cette fiscalité n'aurait pas d'incidence sur les produits locaux, nous en avons pris acte et sommes restés sur cette ligne.
La question des aides d'État découle de la cotisation sociale sur les alcools. Soit dit en passant, l'assiette reposait précédemment sur le volume, mais aujourd'hui elle est identique à celle des droits d'accise : faut-il maintenir deux taxes distinctes, alors qu'elles ont la même assiette et la même affectation ?
Le bureau des contributions indirectes n'a aucune compétence particulière en matière d'aides d'État. Nous avons donc travaillé avec le secrétariat général des affaires européennes, avec les ministères de l'outre-mer et de l'agriculture : dès lors que le Premier ministre s'était prononcé, on ne pouvait modifier la fiscalité sur le rhum dans le projet de loi de finances pour 2011 ; mais nous estimions possible de le faire dès 2012. Nous l'avons d'ailleurs proposé dans la première loi de finances rectificative de 2012, mais un député de la Drôme a fait capoter l'affaire.
Nous ne sommes pas des spécialistes des aides d'État mais nous tenons les comptes des rentrées fiscales du rhum. Nous mesurons tout l'intérêt pour l'outre-mer de cette économie de la canne et du rhum, mais le rôle d'impulsion en la matière appartient aux ministères de l'agriculture et de l'outre-mer.