Nous avons le plaisir d'accueillir M. Galdéric Sabatier, chef du bureau des contributions indirectes à la direction générale des douanes et droits indirects, et M. Guillaume Appéré, chef du bureau de coordination des projets de textes législatifs et réglementaires de nature fiscale et des relations avec le Parlement.
Alors que le régime fiscal pour le rhum traditionnel va évoluer, nous voulons aider le gouvernement dans ses négociations avec la Commission européenne en présentant une proposition de résolution, avec M. Jacques Gillot, président du conseil général de la Guadeloupe, et M. Gérard César, comme rapporteurs.
La direction générale des douanes et des droits indirects a récupéré le portefeuille des droits indirects qui était préalablement dévolu à la direction générale des impôts : ces droits indirects portent essentiellement sur les hydrocarbures, le tabac et les alcools. Leur produit est principalement affecté au financement de la sécurité sociale.
Initialement, les lois de financement de la sécurité sociale étaient des lois d'équilibre qui n'avaient pas vocation à lever l'impôt. À présent, nos vieux principes budgétaires ont volé en éclat et les taxes affectées se sont multipliées. Il en résulte une sorte de balkanisation des finances publiques, dorénavant construites en tuyaux d'orgue, avec un tuyau pour la sécurité sociale, un autre pour les collectivités locales et un dernier, plus petit, pour l'État, qui demeure le garant en dernier ressort.
Les impôts levés par la sécurité sociale échappent au contrôle de la direction de la législation fiscale (DLF) qui se concentre sur le budget de l'État. Nous travaillons en étroite concertation avec la Direction de la sécurité sociale (DSS), mais les initiatives partent souvent de cette direction et nous disposons généralement de très peu de temps pour les examiner avant qu'elles soient intégrées dans le projet de loi de finances ou le projet de loi de financement.
J'en viens au sujet qui vous occupe : tout a démarré en Charente avec le Pineau et sans doute avant, avec le Martini. Cette boisson intermédiaire mêlait naguère alcool fermenté et alcool distillé ; la fiscalité applicable se montait alors à 220 euros par hectolitre. Le processus de fabrication a changé et le Martini est entré dans la catégorie des vins : la taxe est désormais de 3,30 euros par hectolitre. Les producteurs de Pineau ulcérés ont déclenché une grève de l'impôt... qui dure depuis près de deux décennies ! Cependant, en 2011, les pouvoirs publics ont réduit la fiscalité pesant sur les produits intermédiaires, de 220 euros à 180 euros par hectolitre.
La fiscalité sur les alcools fermentés (le vin) est très faible, celle sur les alcools distillés, très élevée. Les producteurs ne comprennent pas toujours ces écarts. Une directive encadre cette fiscalité, si bien que les marges de manoeuvre sont étroites. Il serait judicieux de repenser la fiscalité sur les alcools, mais c'est un vaste travail.
Voulant trouver des ressources supplémentaires, la sécurité sociale a augmenté en 2011 la fiscalité sur les alcools forts tout en réduisant celle sur les produits intermédiaires, pour répondre aux attentes des producteurs de Pineau, Banyuls, etc. Le Premier ministre ayant indiqué en août 2012 que l'augmentation de cette fiscalité n'aurait pas d'incidence sur les produits locaux, nous en avons pris acte et sommes restés sur cette ligne.
La question des aides d'État découle de la cotisation sociale sur les alcools. Soit dit en passant, l'assiette reposait précédemment sur le volume, mais aujourd'hui elle est identique à celle des droits d'accise : faut-il maintenir deux taxes distinctes, alors qu'elles ont la même assiette et la même affectation ?
Le bureau des contributions indirectes n'a aucune compétence particulière en matière d'aides d'État. Nous avons donc travaillé avec le secrétariat général des affaires européennes, avec les ministères de l'outre-mer et de l'agriculture : dès lors que le Premier ministre s'était prononcé, on ne pouvait modifier la fiscalité sur le rhum dans le projet de loi de finances pour 2011 ; mais nous estimions possible de le faire dès 2012. Nous l'avons d'ailleurs proposé dans la première loi de finances rectificative de 2012, mais un député de la Drôme a fait capoter l'affaire.
Nous ne sommes pas des spécialistes des aides d'État mais nous tenons les comptes des rentrées fiscales du rhum. Nous mesurons tout l'intérêt pour l'outre-mer de cette économie de la canne et du rhum, mais le rôle d'impulsion en la matière appartient aux ministères de l'agriculture et de l'outre-mer.
Les professionnels souhaiteraient une seule taxe, au lieu des deux actuelles. Par ailleurs, le creusement du différentiel fiscal au profit du rhum traditionnel résultant du plafonnement de la vignette de sécurité sociale est considéré comme une aide d'État nouvelle par Bruxelles qui a fait l'objet d'une notification tardive, en août 2012, seulement. Sommes-nous en situation de contentieux, susceptible de donner lieu à remboursement ?
Cette question est d'autant plus délicate qu'existe à Bruxelles une procédure de double décision, relevant à la fois de la direction générale de la concurrence et de la direction générale fiscalité et union douanière (dite « Taxud »). En outre, on ne sait jamais si l'on parle en intensité ou en volume. La Commission européenne autorise-t-elle un abattement de 50 % sur la fiscalité applicable au rhum ou accorde-t-elle un volume d'aide de 100 millions d'euros ? On mêle allègrement les deux, sans concilier les problématiques de chacune des directions. Dès lors que nous avons l'autorisation d'accroître à la fois les volumes de production, en passant de 108 000 à 120 000 hectolitres, et la fiscalité, il est logique que le volume d'aide passe de 80 à 120 millions.
L'important est de ne pas contrarier la Commission européenne pour éviter de menacer le régime actuel. Les années 2011 à 2013 constituent une phase transitoire - subie plutôt qu'anticipée. En décembre 2011, la Commission a alloué à la France un volume de 120 000 hectolitres pour 2011, mais nous l'avons su en décembre seulement ! Bien sûr, ces droits n'ont pas été utilisés. En 2012, le droit de tirage était également fixé à 120 000 hectolitres - pour 109 000 hectolitres finalement réalisés. En 2013, le volume sera peut-être plus important.
Certes, il ne faut pas fâcher la Commission, mais cette question pollue les négociations à venir sur le renouvellement du régime fiscal. Nous devons tout faire pour éviter d'aller au contentieux.
Le fait que nous n'ayons pas notifié dans les temps nous expose-t-il à un risque de remboursement ? La difficulté provient-elle seulement de cet oubli ou le régime fiscal est-il menacé pour la période 2014-2020 ?
Les ministères de l'agriculture, de l'outre-mer et le secrétariat général des affaires européennes seraient mieux à même de vous répondre que moi. Mon sentiment est que la France, dans cette affaire, n'a pas vu le problème venir. Elle n'a pas pris conscience assez vite que l'accroissement des volumes et de la fiscalité allait entraîner une explosion du volume des aides d'État. En outre, nous n'avions pas décidé si la cotisation de sécurité sociale, avec son plafonnement à 40 %, devait être intégrée au périmètre de l'aide. Reste à convaincre la Commission de notre totale bonne foi.
Qui vérifie si les dispositions que nous votons en loi de finances et loi de financement ne contredisent pas le droit communautaire ?
La DLF participe à la rédaction du projet de loi de finances, la DSS à celle du projet de loi de financement. Si cet article avait été voté en projet de loi de finances, notre direction aurait examiné sa conformité avec le droit européen - elle fait en général l'objet d'un développement dans l'étude d'impact. Pour le projet de loi de financement, les principes sont sans doute identiques, mais ce sont mes collègues de la DSS qui pourraient vous répondre.
Nous ne sommes manifestement pas à l'abri de mésaventures, lourdes de conséquences.
Je vous transmettrai le texte de la notification qui a été adressée par le secrétaire général des affaires européennes à la Commission et qui recense tous les impacts de cette mesure. Si la France soutient ce dispositif, c'est qu'elle est convaincue de son utilité économique. L'inspection générale des finances a commis un rapport il y a dix-huit mois sur les niches fiscales : elle n'avait pas forcément la même approche que nous sur la fiscalité du rhum mais elle s'était également penchée sur la fiscalité applicable au rhum dans les DOM, qui est une fiscalité dérogatoire.
Ce dossier est très complexe, mais nous voulons aider le gouvernement à bien négocier le régime fiscal applicable au rhum d'outre-mer, sinon ce sera, comme pour la banane, la chronique d'une mort annoncée pour cette filière. L'Europe passe des accords avec des pays tiers et ne se préoccupe pas des produits provenant de ses propres régions ultrapériphériques (RUP), pourtant si vulnérables.
Le corpus juridique sur les aides d'État est à présent assez élaboré et la Commission européenne estime qu'une subvention ou une moindre imposition constituent, l'une comme l'autre, une aide d'État au sens de l'article 107 du traité. Ces aides sont par principe interdites par le droit de l'Union mais la Commission accorde des dérogations en fonction de lignes directrices qu'elle a définies. S'agissant des RUP, le processus de décision est particulier, car il n'y a pas de ligne directrice spécifique à ces régions. C'est ici la ligne directrice « aides communautaires et régionales » qui s'applique, comme à toute région de l'Union en situation économique plus défavorable que la moyenne.
C'est parce que l'Europe ne veut pas mettre en application l'article 349 du traité de Lisbonne !
Les dérogations sont décidées par le Conseil, la Commission continuant à vérifier dans ces cas le respect de la réglementation en matière d'aides d'État.
Le ministère chargé de l'outre-mer défend actuellement auprès de la Commission européenne un projet de lignes directrices spécifiques aux RUP. Le Portugal et l'Espagne sont également concernés. Si ce projet aboutit, il ne restera plus qu'à convaincre la Commission.
Sur la récupération, la théorie est très sévère : une aide considérée comme illégale par la Commission doit être supprimée et l'État membre qui a accordé cette aide doit en obtenir remboursement jusqu'au dernier euro auprès des personnes qui en ont bénéficié. La pratique est tout autre. La France avait accordé une aide aux sociétés qui reprenaient des entreprises en difficulté : la Commission a considéré qu'il s'agissait d'une aide d'État illégale, à récupérer. La France l'a convaincue qu'il était impossible de déterminer les bénéficiaires ni le quantum des aides accordées, si bien qu'il n'y a pas eu de récupération. Cela conduit à relativiser les inquiétudes actuelles.
Nous allons maintenant auditionner Mme Claudine Neisson-Vernant (Martinique), M. Jean-Bernard Derly (Guadeloupe), M. Jérôme Isautier (La Réunion) et M. Ernest Prévot (Guyane), dirigeants de distilleries indépendantes. Je leur souhaite la bienvenue au Sénat. Nous cherchons à aider la filière, plus encore les indépendants, en pesant sur les négociations actuelles entre le gouvernement et la Commission européenne.
Merci de nous donner cette occasion de faire entendre notre petite musique.
En Martinique, il existe deux opérateurs indépendants, la Favorite et Domaines Thieubert qui produit le rhum Neisson. Ces deux unités disposent d'une seule cannière de 96 hectares, 49 pour l'une, 47 pour l'autre, soit de très petites unités.
La Favorite produit environ, en rhum agricole, 3 200 hectolitres d'alcool pur (HAP) par an, et Neisson, 1 800. En 2012, Neisson a exporté 496 HAP, soit une quantité inférieure au contingent alloué, du fait des aléas climatiques. Nous sommes notre propre producteur de canne et n'en achetons pas à l'extérieur pour des raisons de terroir et de techniques propres. La production aidée a atteint en 2011 2 542 HAP pour la Favorite, soit 163 250 euros, et 1 730 HAP pour Neisson, soit 111 110 euros.
Le montant total de l'aide du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité des départements français d'outre-mer (Poseidom) pour la Martinique est de 4 millions d'euros, dont moins de 7 % bénéficient à nos deux distilleries.
Sur le plan social, Neisson est un opérateur de référence dans le nord-Caraïbes, région de grand dénuement économique. Il emploie une main d'oeuvre manuelle, de 15 personnes jusqu'à 38 durant les campagnes. Cependant certaines fonctions ont été modernisées. Sur le plan environnemental, la distillerie Neisson a été récompensée par le ruban bleu de l'environnement en 1998 : elle n'a pas recours au brûlage et pratique une agriculture durable, avec une quantité restreinte d'intrants.
Le coût de revient en 2009 était de 2,49 euros pour un litre à 55 degrés, de 3,44 euros hors subventions. Pour 2012, le coût s'est établi à 3,49 euros avant subvention, 2,82 après, l'évolution s'expliquant par des aléas climatiques. Pour le broyage de la canne, le différentiel, avant ou après les aides, est du même ordre. Ces chiffres montrent toute l'importance du dispositif financier d'accompagnement de la production.
Les frais de personnel représentent près de 30 % de nos charges ; les emballages et autres matières consommables, pour l'essentiel importées, un quart. Les coûts de production augmentent aussi en raison des normes environnementales et de sécurité, dont nous ne discutons pas la légitimité mais dont nous déplorons le poids financier.
Pour Neisson, les surcoûts sont liés à quatre grands facteurs : la faible superficie du territoire de production ; la topographie des parcelles, petites et en pente ; la difficulté de dégager des économies d'échelle ; enfin, l'importance du coût du fret, lié à la quantité de matière première, ce qui rend indispensable le maintien de l'aide au fret mise en place par l'Union européenne.
L'accès aux mécanismes d'aides publiques relève parfois d'un parcours complexe, long et aux résultats incertains. Les aides au titre de certaines mesures du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ou l'allocation de compensation des surcoûts liés au fret en sont une illustration concrète. Depuis peu, nous n'avons plus guère d'accès direct à l'aide au fret.
Oui. L'aide, de 50 % pour la période 2007-2013 a été portée à 75 % ; mais fin 2011, on a annoncé que ce serait 35 % en 2012 et rien en 2013. Le dispositif ne s'applique plus à toutes les entreprises et les critères de choix ne nous ont pas paru limpides.
En 2012, Neisson a vendu 1 231 HAP de rhum blanc en Martinique, 477 en métropole ; et 72 HAP ont été exportés. L'accès au marché métropolitain est de plus en plus difficile du fait des exigences de la grande distribution, notamment en matière de remises arrière. Nous avons été déréférencés par deux enseignes car notre produit était trop cher.
Le régime fiscal dérogatoire est essentiel à la survie de la filière. Dès février 2012, le Conseil interprofessionnel du rhum traditionnel des DOM (CIRT-DOM) a appelé l'attention du gouvernement et des parlementaires sur le risque que l'article 27 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 faisait peser sur le régime fiscal du rhum traditionnel. Une décision du Conseil du 27 juin 2007 a en effet autorisé en tant que régime d'aide un différentiel de taux de 42,41 %. Il est impératif de sauvegarder ce dispositif, et regrettable que l'article 27 de la loi de financement pour 2012 ait pu être adopté sans qu'en aient été pesés les effets sur le régime fiscal particulier.
Nous suivons avec attention les arguments développés par le gouvernement. Le régime d'aide se justifie notamment par les surcoûts liés à la production : augmentation de la matière première, de la masse salariale, coût des transports et de l'énergie, mais aussi conditions d'accès au marché. Autant d'arguments classiques mais réels. Les caractéristiques du rhum traditionnel répondent à une volonté de l'Union européenne de développer les produits ancrés dans les territoires et de maintenir sa diversité patrimoniale, y compris immatérielle. Faut-il rappeler combien les distilleries Neisson et Favorite sont ancrées en Martinique ? C'est grâce à l'amour des Martiniquais que nous continuons à nous battre et à produire un rhum de qualité. Nous souhaitons que prospère la démarche de justification du nouveau dispositif fiscal, avec des dispositions spécifiques pour les petites distilleries. C'est une condition de survie de la filière.
L'amour, c'est le plus important. Nous partageons votre amour pour le rhum de qualité !
Merci d'écouter la voix des petites distilleries. Je préside le Comité d'organisation et de défense du marché du rhum (Coderum), syndicat guadeloupéen de rhumiers et distillateurs agricoles. Le rhum agricole, spécificité des Antilles françaises, ne représente que 2 % de la consommation mondiale. Nous sommes à l'ombre des grands groupes internationaux, dont les coûts de revient sont bien inférieurs aux nôtres. La concurrence provient aussi des pays émergents, Îles Vierges ou Guatemala, des productions dans les pays ACP qui bénéficient en outre de l'aide des États-Unis - sachant que l'appellation générique « rhum » recouvre toute une nébuleuse de produits. Nous voulons continuer à produire des rhums exclusifs, à forte typicité. Les aides européennes sont indispensables à notre survie, d'autant que nos rhums à fort degré sont pénalisés par la vignette sécurité sociale : sur un litre à 50 degrés, l'aide représente 4,20 euros.
Nous rencontrons un succès mérité - dont témoigne la médaille d'or que j'ai reçue hier au Salon de l'agriculture pour mon rhum vieux -, les importateurs demandent toujours plus, mais le système, qui date de 1995, n'est plus vraiment adapté. À l'époque, faute d'investissements et donc de production, mes prédécesseurs préféraient échanger le contingent export contre du contingent local pour fournir d'abord la clientèle locale. Le contingent export de Bologne a ainsi diminué de moitié. Depuis, nous avons beaucoup investi, notamment dans la valorisation des déchets : biomasse grâce à la combustion de la bagasse, biogaz grâce à la méthanisation des vinasses. Bologne a investi 7 millions d'euros en 2005-2006. Malgré la demande des distributeurs, nous restons limités par le système.
Chacun ici représente un cas particulier au sein de son département. Il faut nous aider dans ce combat ; parmi mes adhérents, deux distilleries sont en redressement. Merci de nous prêter main forte, nous saurons gagner des parts de marché !
Notre soutien vous est acquis. La réputation de votre rhum a traversé les océans : j'ai du Bologne chez moi !
La Réunion a une particularité : elle a su préserver une industrie du sucre dynamique. Elle n'a que du contingent de mélasse. La distillerie Isautier produit du rhum de mélasse mais également du rhum agricole - le meilleur sinon du monde, du moins de l'hémisphère est ! Isautier possède une sole cannière importante, de 300 hectares. Nous fournissons nos cannes à l'usine de sucre et rachetons du jus broyé et de la mélasse, ce qui nous permet d'obtenir des prix raisonnables sur les matières premières. Nous produisons 5 000 hectolitres d'alcool pur par an en moyenne, dont la moitié va à l'exportation : le contingent export est de 2 300 hectolitres. Sur le reste, les trois quarts sont vendus sur le marché local sous forme de dérivés - punchs, liqueurs, rhums arrangés, qui nous ont valu des médailles - le quart restant sous forme de rhum blanc, de sucrerie ou agricole.
Notre prix de revient moyen est de 2,50 euros par litre d'alcool pur. Les volumes sont contraints par les débouchés, il faut amortir les machines. En outre, la distillerie Isautier ne fonctionne que cinq mois par an, car nous ne pouvons plus épandre la vinasse une fois que les bourgeons de canne à sucre ont émergé. Nous n'avons pas la surface financière pour investir dans la méthanisation. Notre solution, plus agricole, est onéreuse mais préserve des emplois. La moitié de l'équipe est salariée à l'année, l'autre est composée de saisonniers, qu'il nous faut former. Le vrai danger vient de la concurrence des ACP et des PMA : le Smic réunionnais est de 1 400 euros, contre 200 euros à l'île Maurice et 50 euros à Madagascar...
Les Mauriciens voudraient utiliser les accords de partenariat économique (APE) pour entrer sur le marché réunionnais et exporter leur rhum. Or c'est le marché local qui fait vivre nos sociétés ; le contingent est un plus, mais si les conditions de production ne sont pas protégées, il deviendra inutile, car nous serons déjà morts. Le soutien à l'investissement, la défiscalisation sont indispensables, tout comme le soutien aux intrants industriels et aux productions sortantes. En 2013, le coût du fret a explosé : 12,5 % d'augmentation. Enfin, la fiscalité locale sur les alcools importés est également déterminante pour nous aider à maintenir la place du rhum dans la consommation locale. Il faut préserver ces facteurs de l'équilibre financier de nos sociétés.
Nous avons eu l'occasion d'apprécier votre rhum lors de notre déplacement à La Réunion en 2009. Votre rhum vieux n'est pas mal !
Le groupe Isautier fait la promotion de l'ensemble des rhums de La Réunion, alors que nous sommes la plus petite distillerie de l'île : 5 000 hectolitres de rhum traditionnel par an seulement, contre 50 000 pour les plus gros.
Vous avez évoqué la défiscalisation, nous en parlerons dans un autre atelier.
La Guyane est souvent oubliée quand on parle de rhum. Elle comptait naguère dix-sept distilleries ; fils de rhumier, je suis le dernier à survivre. Je tiens à laisser ce patrimoine à la Guyane ; avec le département et la région, nous y avons consacré un livre : Les Rhums Saint-Maurice. Reprendre et développer la distillerie familiale fut un long labeur, qui a exigé bien des sacrifices, mais les résultats sont là. Nous sommes reconnus au sein de la filière, même si nous représentons moins d'1 % du contingent des DOM ; membre de l'interprofession depuis dix ans, je mène le combat pour que la Guyane obtienne ce qui est accordé aux autres départements. La qualité de notre rhum est reconnue : j'en veux pour preuve notre prix d'excellence au concours général agricole en 2009, en 2012 et à nouveau en 2013.
Depuis 2004, je me bats pour obtenir les aides européennes. Nous étions partis sur un investissement de 5 millions d'euros, nous en sommes aujourd'hui à 8 millions, dont 4 financés par l'Union européenne. Les investissements seront finalisés en juin ; à cette occasion, j'ai invité le conseil d'administration de l'interprofession à siéger pour la première fois en Guyane. Vous êtes bien sûr les bienvenus !
Il s'agit de faire valoir notre nouveau procédé de production. Tout l'outil d'extraction a été rénové. Les services de l'État sont plus exigeants en termes de normes quand on est seul : l'arrêté préfectoral nous autorisant à exploiter comporte quinze pages de contraintes ! Le projet a traîné, les autorités voulaient nous éloigner du centre-ville de Saint-Laurent, sans indemnisation... Il a fallu se bagarrer. Bref, tout cela est derrière nous. Cette année, nous avons remporté deux médailles d'argent.
Difficile de mesurer l'impact d'une nouvelle fiscalité sur les rhums de Guyane. Ce département constitue le gros de mon marché : 1 million de litres en moyenne. Le prix a son importance, mais quand la qualité est là, il ne suffit pas à dissuader le client. Étant donné l'augmentation de mes coûts de production, mes prix ont augmenté de 40 %, sans que les ventes ne baissent. Pourtant, les multinationales vendent du rhum antillais en Guyane à moins de 4,50 euros - moins cher qu'en Martinique. C'est de la folie !
Il faut valoriser les rhums agricoles et de mélasse des DOM. Je ne crains pas la concurrence de la cachaça à 37,5 degrés : nous, nous consommons du rhum à 50 degrés et plus. Ce n'est pas le même produit, il n'est pas bu de la même façon. Avec un produit de qualité, nous avons un avenir sur le marché national. Il faut valoriser notre différence, sensibiliser les consommateurs. Le but n'est pas de faire plus de rhum - que jamais nous ne pourrons proposer au prix des producteurs ACP - mais de faire un produit de qualité.
Nous préparons un argumentaire pour accompagner le gouvernement dans ces négociations européennes sur le rhum. Avez-vous, au nom des petites distilleries, des particularités à défendre ?
Nos coûts de production n'ont rien à voir avec ceux des grosses distilleries. Le différentiel n'est pas corrélé au surplus de production. Nos difficultés financières ne sont pas comparables. J'ai évoqué le problème de l'accès au marché métropolitain, du rapport inégal avec la distribution. Je remercie M. Prévot d'avoir insisté sur la qualité ; le rhum agricole de Martinique est le seul à bénéficier d'une AOC. Nous ne survivrons qu'en nous positionnant sur le haut de gamme et donc en étant intransigeants sur la qualité.
Nous sommes connus pour nos rhums à fort degré ; le prix élevé de nos produits va aussi dans le sens de la protection de la santé publique. Nous sommes les seuls à faire un rhum à 70 degrés, l'Esprit de Neisson ; c'est un produit de niche, à déguster rafraîchi, à toutes petites gorgées.
Nous soutenons la démarche du Centre interprofessionnel des rhums des départements d'outre-mer (CIRT-DOM), mais nous souhaitons une aide différenciée pour les petites productions. Les petits producteurs de bière bénéficient, me semble-t-il, d'une fiscalité différenciée en fonction de la taille de l'entreprise ?
Un autre surcoût vient du fait que nous vendons notre contingent en bouteilles. Faute de verrerie dans les régions ultrapériphériques, les bouteilles voyagent deux fois, vides puis remplies. Les gros rhumiers industriels font voyager le rhum de sucrerie fort en vrac, la réduction du degré et l'embouteillage se faisant en métropole. Or nous ne pouvons répercuter ce surcoût sur le prix de vente, sachant que ce sont les Bacardi et autres Havana Club qui fixent le prix de marché.
À La Réunion, le modèle économique favorise les grands opérateurs, qui bénéficient de l'essentiel du contingent, et fragilise les petits. Comment faire pour que ces derniers accèdent au marché national ?
Vous nous avez conviés dans notre diversité, nos situations sont différentes. Ce qui nous réunit, c'est notre taille modeste. La note du gouvernement à Bruxelles propose une différenciation fondée sur la taille et non sur la matière première. Les aides POSEIDOM visant pour leur part à réduire le prix du rhum agricole pour le rapprocher du rhum de sucrerie, la démarche du gouvernement est raisonnable.
Le CIRT-DOM défend la profession. C'est le contingent qui nous permet de venir à Paris, de faire du marketing. Évidemment, ceux qui sont plus structurés tirent la couverture à eux. Les dérives de la répartition contingentaire n'ont été que partiellement rectifiées.
Quel schéma économique pour les sociétés de taille intermédiaire ? Pour qu'une marque existe et dure au niveau national, il faut 1 million de cols au minimum. Il faut des marques structurantes pour faire des marques exclusives. En entretien, cela suppose de consacrer 10 à 15 % du chiffre d'affaires au marketing, 30 % pour lancer une marque ex nihilo sur le marché métropolitain. Aujourd'hui, nous perdons de l'argent sur le rhum Isautier en bouteille car le budget publicitaire est supérieur à notre marge ; c'est le vrac qui assure un équilibre global. Une solution serait d'attribuer un contingent individuel significatif, de l'ordre de 5 000 hectolitre par unité.
La modification des dispositions fiscales en 2011 a-t-elle eu un impact sur vous ?
Que pensez-vous de la proposition du gouvernement français de réserver une aide de 2 millions d'euros aux petits producteurs ?
Ne faudrait-il pas profiter de l'occasion pour dire que 2 millions ne suffiront pas ?
Nous avons besoin de plus d'aides directes, POSEIDOM ou autres, pour notre fonctionnement et notre trésorerie. Pour une petite entité comme Neisson, qui fait tout depuis la plantation jusqu'à la distribution, l'embouteillage sur place se justifie pour des raisons d'image, de contrôle de la qualité et surtout de maintien et de création d'emplois sur place. Je ne sais pas si la Commission est sensible à cet argument...
Un million de cols, c'est 5 millions d'euros de chiffre d'affaire. Un budget publicitaire de 30 %, c'est 1,5 millions d'euros par an. Il faut une aide revolving et non pas one shot. Aujourd'hui, seuls quatre rhums des DOM dépassent le million de cols, sur 27 distilleries : Old Nick, racheté par La Martiniquaise, est le premier.
Pour faire émerger des marques, il faudrait des aides à la commercialisation. La dérogation fiscale est une aide à la mise en marché. Pourquoi ne pas prévoir une aide variable en fonction du volume, assortie d'une aide pour la mise en marché qui serait réservée aux plus petits ?
Je comprends l'attachement des producteurs à la qualité, mais pour croître, il faut aussi s'adapter au marché. Or le marché européen demande des rhums moins forts, à 35 degrés, qui entrent dans la composition de cocktails à la mode comme le Mojito. Un rhum cubain de ce type est commercialisé en France par Pernod-Ricard. Or nous sommes totalement absents de ce segment, dominé par les pays d'Amérique latine. Comment attaquer ce marché ?
J'ai entendu votre demande d'aides au fonctionnement et à la trésorerie.
Madame Neisson, percevez-vous l'aide régionale à la balance, servie aux planteurs par le département et la région ?
Non, elle est réservée aux planteurs livrant à la sucrerie du Galion.
La Martinique est le seul département d'outre-mer à ne pas bénéficier d'aide d'État à la balance...
Je demande depuis trois ans au ministère de l'outre-mer d'étudier ce dossier. C'est François Fillon qui a instauré la prime à la bagasse à La Réunion : 10 euros reversés au planteur dans le cadre de la création d'énergie à partir de la bagasse. Du coup, certains planteurs ne veulent plus livrer les distilleries agricoles, car alors ils ne touchent pas l'aide ! Pour ma part, je fabrique de l'énergie à partir de la biomasse et du biogaz mais je n'ai pas droit à cette prime, et ne peux donc la reverser aux planteurs, car elle est réservée au processus sucrier. C'est un handicap de plus.
Une aide de ce type existait avant la Lodeom. Ne pourrait-on servir une aide pour la canne livrée aux petits producteurs ? Nous allons soulever la question.
L'aide illégale serait passée de 78 à 111 millions d'euros. Le gouvernement négocie pour que la Commission accepte 103 millions. Craignez-vous que l'on vous demande de restituer les sommes perçues en 2012 ?
En effet, c'est l'État qui est fautif, c'est à lui d'assumer. Comme pour le chlordécone !
En tout état de cause, cette taxe est payée par le distributeur. Si un problème se pose, ce sera au niveau de la distribution.
La délégation vous soutient. Nous savons tous le rôle que vous jouez dans nos territoires. Mais le contexte budgétaire est contraint... Avez-vous anticipé cette période difficile ? Quelle est votre stratégie pour maintenir votre activité ?
La durabilité repose sur les marques. Neisson a beau produire très peu, tout le monde connaît sa marque. Notre démarche est l'excellence, l'exclusivité, le soutien aux marques. Nous prônons au maximum le maintien de la valeur ajoutée au plan local, mais pas au détriment de la cohérence économique. Si l'embouteillage coûte deux fois plus cher dans les DOM, nous irons en métropole. Nous accompagnons l'idée de durabilité : comment passer du vrac à la marque, voilà l'enjeu.
Sur nos créneaux, nous défendons une qualité, un patrimoine. Difficile pour nous d'être présents sur le segment du rhum à 37,5 degrés, quand le cahier des charges de l'AOC nous impose un minimum de 40. Nous nous retrouverions en concurrence frontale avec les rhums des pays émergeants, dont les coûts sont dix fois inférieurs aux nôtres.
Notre seule possibilité de survie, c'est la niche de la qualité, au plan local, national et international. Nous sommes une goutte d'eau dans l'océan des rhums. Les micro-niches au plan international absorberont toute la production des DOM. C'est ce même raisonnement qui a conduit les rhumiers de Martinique, Jean-Pierre Bourdillon, mon père et d'autres, à demander l'AOC, qu'ils ont obtenue au bout de 22 ans. Il s'agissait de protéger un savoir-faire, un lien au terroir, un produit dont ils étaient amoureux... et leur île !
Nos alcools sont une exception culturelle, nous résistons tant bien que mal à l'invasion des alcools étrangers. Regardez ce que font les autres pays européens, l'Espagne, le Portugal ou la Grèce, qui ont des îles à production alcoolique typique : tous ont adopté une législation spécifique pour se protéger contre les alcools internationaux. Ne soyons pas des enfants de coeur !
Voilà tout juste un an que notre délégation a commencé ses travaux puisqu'elle avait défini son programme de travail le 23 février 2012 : je voulais donc faire le point avec vous sur ce qui a déjà été réalisé et sur ce que nous avons en perspective, avant de recueillir vos observations.
Le bilan tout d'abord.
Notre délégation a été très active, ce que le président du Sénat n'a pas manqué de souligner lors de ses voeux.
Au-delà des deux grands thèmes d'étude encore « sur le métier » que sont « la vie chère dans les outre-mer » et « les enjeux des zones économiques exclusives », nous avons su saisir des sujets plus ponctuels, en prise directe sur l'actualité, ou répondre à des demandes qui nous étaient adressées.
Ainsi, nous avons à mettre à notre actif :
1) Deux propositions de résolution européenne : l'actualité européenne a été particulièrement riche pour les outre-mer en 2012 et nos deux initiatives ont pesé utilement dans les négociations à Bruxelles. Je vous rappelle qu'elles ont donné lieu à deux débats en séance publique : l'un le 12 juillet sur la pêche et l'autre le 19 novembre sur la stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques dans le nouveau cadre financier pluriannuel, ce dernier débat ayant été couronné par un vote à l'unanimité !
Je remercie encore une fois les rapporteurs de chaque binôme, Maurice Antiste et Charles Revet, d'une part, et Roland du Luart et Georges Patient, d'autre part, pour leur implication dans ces dossiers de première importance pour nos départements.
Je me félicite également de l'excellent esprit de coopération avec la commission des affaires économiques et la commission des affaires européennes qui a prévalu au cours de ces travaux. Nous avons travaillé la main dans la main, ce qui est tout à fait conforme au mode de fonctionnement que nous avions imaginé pour optimiser la portée de nos actions.
2) Une participation active aux États généraux de la démocratie territoriale des 4 et 5 octobre 2012 : les outre-mer y ont tenu toute leur place ; un des quatre ateliers leur était dédié.
Je remercie nos 4 rapporteurs, Aline Archimbaud, Joël Guerriau, Robert Laufoaulu et Thani Mohamed Soilihi, pour le brio avec lequel ils ont porté les couleurs de nos outre-mer en mettant en évidence problématiques communes et singularités des situations de nos collectivités.
3) Quatre colloques :
- une rencontre « Mémoires croisées », le 9 mai 2012, sur les mémoires coloniales, organisée en collaboration avec le Comité pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage (CPMHE) ;
- une autre rencontre, le 12 novembre 2012, sur le thème des mémoires audiovisuelles des outre-mer, organisée avec l'Institut national de l'audiovisuel (INA) qui a entrepris une vaste opération de sauvetage des fonds de RFO
- une conférence-débat organisée le 23 novembre 2012 avec l'Agence française de développement sur le thème du développement humain et de la cohésion sociale dans les outre-mer
- un colloque, le 17 janvier 2013, sur les perspectives de la présence française en Océanie, organisée avec le ministère des affaires étrangères et le ministère des outre-mer, qui a réuni près de 40 intervenants sur la journée et plus de 200 participants. Un beau succès !
Les actes de deux de ces événements ont déjà été publiés sous forme de rapports d'information de la délégation ; les actes de la rencontre organisée avec l'INA devraient être mis en distribution dans le courant de la semaine prochaine et vous seront adressés ; ceux relatifs au colloque du mois de janvier sont en cours d'élaboration.
Tous ces travaux nous ont conduit à auditionner de nombreuses personnes, une soixantaine au total sans prendre en compte les colloques, dont Madame Sophie Élizéon après sa nomination comme Déléguée interministérielle pour l'égalité des chances des français d'outre-mer. Cela représente quelques 70 heures de réunion.
Je souhaite enfin souligner certaines spécificités dans l'organisation et les modalités de fonctionnement de notre délégation :
- des outils modernes pour une meilleure visibilité de la délégation et de ses travaux : tous les rapports consignant les actes des événements que nous organisons sont assortis d'un DVD audiovisuel ce qui permet de donner une représentation plus vivante de nos travaux. Il nous reste à développer le site internet de la délégation, à y mettre en valeur les travaux de contrôle relatifs aux outre-mer, les questions posées au gouvernement par exemple, et à créer des liens avec d'autres sites informatifs sur les problématiques ultramarines (INSEE, IEDOM ...)
- un fonctionnement économe : il ne vous a pas échappé qu'en dépit de la densité de nos travaux, aucun déplacement outre-mer en 2012 n'avait été organisé.
Cela ne veut pas dire que nous y renonçons, bien entendu, car la crédibilité de nos travaux et propositions est tributaire du contact avec les réalités du terrain. Mais ce contact peut parfois être noué autrement que par un déplacement : ce fut le cas lorsque nous avons reçu les présidents des comités régionaux des pêches de Guadeloupe, Guyane, Martinique et de La Réunion ; ce sera également le cas ce matin puisque des représentants des distilleries indépendantes de ces quatre départements viennent à nous à l'occasion du salon de l'agriculture.
Je tiens également à relever l'organisation par notre délégation d'une visioconférence avec le gouvernement polynésien. C'était un véritable défi technique étant donnée la distance à parcourir pour le signal numérique, et le dispositif a très bien fonctionné pendant une heure environ. Il me semble que le Sénat devrait se doter d'un équipement de visioconférence, peu onéreux à l'achat, et qui pourrait, en ces temps de vache maigre, produire des économies budgétaires et éviter des déplacements chronophages !
- un fonctionnement en synergie avec les commissions : c'est tout à fait essentiel !
L'année 2012 a été placée sous le sceau d'une collaboration soutenue et fructueuse avec la commission des affaires économiques et la commission des affaires européennes, mais également la commission des affaires étrangères (auditions communes avec le groupe de travail « maritimisation » sur la dimension géostratégique des ZEE) et la commission des lois (États généraux de la démocratie territoriale).
Nous approfondirons ces bonnes relations en 2013 et nous aurons l'occasion de solliciter d'autres commissions car les sujets de préoccupation sont légion et les demandes affluent.
Les perspectives et le calendrier :
1) Concernant les études de fond en cours sur la vie chère et les potentiels des ZEE ultramarines, les rapporteurs progressent, notamment au gré des cycles d'audition que nous organisons régulièrement.
Pour le thème de la vie chère, Éric Doligé et Michel Vergoz entendent procéder par étapes successives : notre rapport d'information prendrait la forme d'une série de cahiers thématiques afin de prendre en compte la complexité du phénomène de la vie chère. Le premier cahier aurait pour objet de faire le point sur la question des niveaux de vie et des revenus dans les outre-mer, les suivants porteraient sur la formation des prix dans différents secteurs (grande consommation, énergie, communications...). Le premier cahier pourrait nous être présenté au cours de la seconde quinzaine d'avril.
Pour le thème des enjeux des ZEE ultramarines, des auditions complémentaires sont à prévoir. Un nouveau cycle vous sera proposé les 27 et 28 mars qui permettra la présentation, après l'étude de législation comparée sur l'exploration et l'exploitation pétrolières offshore, d'une autre étude portant sur les ressources minérales marines profondes. Il serait opportun d'aboutir sur cette étude à l'été.
2) Concernant les opérations plus ponctuelles, j'en compte deux pour le moment :
La première est d'ores et déjà engagée et nous réunit aujourd'hui : il s'agit du nouveau projet de PPRE sur la fiscalité du rhum. L'objectif est d'aboutir fin mars pour permettre à la commission des affaires européennes, puis à la commission des finances, de s'en saisir ensuite utilement.
La deuxième opération concerne la question de l'impact de la défiscalisation pour les économies ultramarines.
L'avenir des dispositifs de défiscalisation spécifiques aux outre-mer a alimenté les débats sur le projet de loi de finances pour 2013. L'article 79 de la loi de finances prévoit ainsi le dépôt par le Gouvernement, avant le 1er mai 2013, d'un rapport visant notamment à étudier l'opportunité et la possibilité de transformer en dotations budgétaires tout ou partie des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission « Outre-mer ».
Dans ce contexte, Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques, et moi-même avons jugé utile de proposer la constitution d'un groupe de travail commun à notre commission et à la délégation, qui aurait la charge d'étudier l'impact économique des dispositifs de défiscalisation spécifiques aux outre-mer.
Les membres de ce groupe de travail seraient désignés après la semaine de suspension parlementaire, une partie étant issue de la commission et une autre de la délégation.
Deux auditions sont enfin d'ores et déjà programmées :
- l'une le 19 mars après-midi : l'audition de M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, qui nous rendra compte des négociations en cours à Bruxelles concernant l'octroi de mer et la fiscalité du rhum. Il devrait également nous entretenir des réflexions gouvernementales sur la défiscalisation ;
- l'autre le 3 avril après-midi : l'audition de M. Dominique Baudis, Défenseur des droits, pour nous entretenir des actions qu'il mène dans les outre-mer et, en particulier, de la situation des enfants à Mayotte.
3) Concernant le volet « événementiel » :
- 2013 sera marquée par la célébration du bicentenaire de la naissance d'Aimé Césaire et la délégation pourrait s'associer à cette célébration par l'organisation d'une conférence.
- Nous avons reçu une demande de l'Université des Antilles et de la Guyane en vue de l'organisation d'un colloque sur la notion d'autonomie locale. Ce colloque pourrait se tenir la première quinzaine d'octobre.
- Dans le cadre des expositions d'été à l'Orangerie, notre délégation a soutenu le projet d'un historien sur les peintres du bagne de Cayenne. La tenue de cette exposition en septembre pourrait également être l'occasion d'un colloque dont il faut encore préciser les contours.
Ce tour d'horizon était un peu long mais s'explique par la densité de notre activité.