Intervention de Didier Casas

Commission des affaires économiques — Réunion du 13 mars 2013 : 2ème réunion
Aménagement numérique du territoire et feuille de route « très haut débit » — Table ronde avec des représentants des opérateurs télécoms

Didier Casas, secrétaire général de Bouygues Telecom :

Le marché du fixe en France est un marché peu fluide. La meilleure preuve en est que, malgré une stratégie agressive, avec une croissance très significative, nous n'avons pu prendre que 7 % de ce marché en cinq ans. Bouygues Telecom regroupe 2 millions de clients fixes, avec une forte croissance sur l'année passée. Nous sommes le dernier opérateur à entrer sur le marché du fixe, en 2008. Nous avons 300 000 clients très haut débit, ce qui fait de nous le deuxième opérateur sur le parc très haut débit.

Le très haut débit est une composante essentielle de notre stratégie dans le fixe. Nous mettons l'accent sur l'innovation et la valorisation des services. En tant que dernier entrant sur le marché, nous devons nous comporter en investisseur avisé et sélectif. Cela nous a conduits en particulier à ne pas déployer d'infrastructure FttH en propre. Nous avons privilégié la location avec notre partenaire Numericable ou le co-investissement avec Orange et SFR.

Nous investissons 74 millions d'euros par an pour financer les projets de très haut débit sur la zone très dense, en co-investissement avec SFR et Orange. En zone AMII, l'accord de co-investissement signé ce dernier sera activé concrètement lorsque nous disposerons d'une visibilité suffisante, à la fois sur la couverture cible, le rythme et la localisation précise des déploiements FttH. Par ailleurs, nous participons à l'opération pilote de Palaiseau et sommes également présents dans les RIP. Ces quelques remarques vous permettent de mieux situer le positionnement de Bouygues sur ce marché du très haut débit.

En ce qui concerne la gouvernance du déploiement, je ferai une triple distinction. Tout d'abord, au niveau central, Bouygues Telecom approuve les orientations de la feuille de route qui visent à renforcer les prérogatives de l'État en matière de coordination. Nous estimons qu'elles auront des effets bénéfiques en matière de structuration professionnelle et de soutien opérationnel aux projets des collectivités par la définition d'un cadre commun de financement des réseaux d'initiative publique (RIP).

Nous nous réjouissons de la proposition de mise en place de conventions de programmation et de suivi des déploiements. Toutefois, compte tenu des objectifs très ambitieux qui sont affichés, il nous semble que des dispositifs plus contraignants auraient pu être définis au cas où les opérateurs ne respectent pas leurs engagements. Je rappelle que la piste des sanctions financières a été évoquée au cours des auditions conduites par Pierre Hérisson et Yves Rome. Il est également prévu qu'une collectivité puisse se subtituer à un opérateur défaillant mais les modalités de ce dispositif mériteraient d'être précisées.

En ce qui concerne la gouvernance des RIP, nous constatons, malgré d'indéniables avancées, une excessive hétérogénéité de la taille et des types de ces derniers, ce qui peut obérer leur développement. Nous estimons donc souhaitable de favoriser l'émergence de structures de portage régional, avec des guichets uniques.

S'agissant du basculement du cuivre à la fibre optique, nous pensons tout d'abord que l'extinction du premier est nécessaire à la sécurisation des investissements dans le second. La feuille de route a souligné, à juste titre, qu'il n'était pas pertinent de maintenir les deux infrastructures mais l'exigence de pragmatisme amène à constater que l'abandon brutal du cuivre pourrait susciter des difficultés pratiques et juridiques. C'est pourquoi nous approuvons la solution qui a été proposée, de recourir à une évaluation préalable par une personnalité reconnue. L'idée qui nous semble pertinente consisterait à dissocier dans le temps l'extinction du cuivre et l'arrêt de la commercialisation du DSL.

Enfin, il nous semble hautement souhaitable d'encadrer et de cibler strictement l'usage des technologies de type VDSL qui permettent d'augmenter artificiellement le débit et la durée de vie du cuivre, sans quoi on se tire une balle dans le pied en favorisant, de manière générale, une technologie dont on prévoit par ailleurs l'extinction.

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