Intervention de Leila Aïchi

Réunion du 14 mars 2013 à 15h00
Questions d'actualité au gouvernement — Gouvernance de renault

Photo de Leila AïchiLeila Aïchi :

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

Monsieur le ministre, nous prenons acte de l’accord de compétitivité signé ce mercredi entre la majorité des syndicats et la direction de Renault.

Toutefois, cet accord nous interpelle. Il pose la question d’un inquiétant déséquilibre en contrepartie du maintien en activité des usines sur le sol français. Cet accord prévoit notamment 7 500 suppressions nettes d’emplois d’ici à la fin 2016, une augmentation de 6, 5 % du temps de travail et un gel des salaires pour l’année 2013. À en croire la direction, ces sacrifices seraient inhérents à la conjoncture actuelle.

Monsieur le ministre, force est de reconnaître que ce sont toujours les mêmes, les salariés – ouvriers et employés –, les intérimaires et les contribuables qui paient le prix d’une inconséquence en termes de stratégie.

De telles conditions au maintien de l’activité de Renault en France sont inacceptables, car la direction du groupe s’est bel et bien engouffrée dans une impasse ! Celle-ci est le résultat d’une stratégie parfaitement orchestrée et non la conséquence imprévisible d’une conjoncture exceptionnelle. Les choix opérationnels de la marque ont été guidés par les seuls intérêts des actionnaires privés, sans vision de moyen et long termes pour l’avenir du groupe.

Les délocalisations massives ont été privilégiées au détriment de l’emploi dans l’Hexagone. En effet, depuis les débuts de l’alliance nouée avec Nissan, voilà une quinzaine d’années, Renault a progressivement transféré les enjeux du haut de gamme vers la marque japonaise, en délaissant les sites français.

Cette politique délibérée a conduit à une surcapacité des usines Renault sur notre sol. Voilà pourquoi les raisons conjoncturelles invoquées par la direction non seulement sont dénuées de fondement, mais s’apparentent à un déni de réalité, voire à de la mauvaise foi.

Ces choix stratégiques ont conduit à une autre conséquence tout aussi funeste : la désindustrialisation et l’appauvrissement du tissu économique français. Depuis des années, Renault, certes entreprise mondialisée, a délaissé les PME nationales pour privilégier des fournisseurs étrangers au nom d’une meilleure compétitivité-prix, laquelle est loin d’être démontrée. J’en veux pour preuve l’usine de Douai, qui importe des joints d’étanchéité de Turquie au même coût que ceux de son fournisseur historique de Normandie !

Et que dire, monsieur le ministre, de l’imprévoyance dramatique des grands stratèges de Renault, qui sont passés directement du véhicule thermique au tout électrique, ignorant la demande pour la voiture hybride ?

Avec 15 % du capital, l’État est le premier actionnaire de Renault. Il subventionne au prix fort la production et la vente en France des véhicules de la marque. Souvenez-vous du grand emprunt en 2009 et du prêt avantageux de 3 milliards d’euros accordé par l’État à la marque.

Monsieur le ministre, je n’en doute pas, vous avez pris la mesure des enjeux sociaux et environnementaux des choix de Renault. Nous, écologistes, sommes très attachés à la transition écologique de l’économie.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre, notamment en termes de gouvernance et d’éco-conditionnalité, pour ne plus faire supporter au contribuable l’inconséquence de la politique industrielle et commerciale du constructeur ? §

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