Merci de vous associer à la nôtre, cher collègue !
Par ailleurs, la création d’un « fonds de pénibilité », sur le modèle de celui qui existe pour l’amiante, permettrait de financer les départs anticipés liés à une pénibilité non compensée tout au long de la vie du travailleur, entraînant une baisse anormale de son espérance de vie. Ce fonds serait alimenté par les branches professionnelles qui exposent le plus leurs salariés à la pénibilité comme par celles qui ne respectent pas – ou ne parviennent pas à respecter – les directives relatives à la santé au travail.
Nous proposons également de faire diminuer en douceur le taux de décote entre 65 ans et 67 ans, de manière à faciliter le départ à la retraite même si le taux plein n’est pas atteint, afin que la réforme n’ait pas un effet couperet. Les dispositions de cet amendement présenteraient aussi l’avantage de répondre au problème des femmes, donc de remédier à l’injustice de cette réforme, qui pénalise, peut-être, ceux qui gagnent le moins.
Concernant l’annulation de la décote, nous demandons également l’ouverture de la retraite à taux plein à 65 ans aux assurés ayant eu trois enfants ou plus et ayant interrompu leur activité professionnelle pendant un temps jugé suffisamment long – celui-ci pourrait être défini par décret, et j’ai proposé pour ma part une durée de trois ans –, au titre du congé parental d’éducation, ainsi qu’aux personnes s’étant consacrées, pour une période d’une durée identique, à aider une personne handicapée.
Par ailleurs, afin de prendre en compte la situation des femmes, nous souhaitons que les travailleurs effectuant moins de 200 heures de travail par trimestre puissent, sous certaines conditions, valider des trimestres d’assurance vieillesse. Enfin, le principe d’équité impose, pour le moins, que les rentes versées au titre des retraites chapeaux soient soumises aux charges sociales de droit commun.
Voilà ce que nous proposons à court terme. Toutefois, le rôle des hommes politiques est aussi de regarder plus loin et de trouver des solutions durables. Le manque d’ambition n’est-il pas la pire des imprudences ? « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire », écrivait Corneille. De même, à réformer à trop courte vue, on n’obtient qu’un faible bénéfice politique et on ne règle pas durablement les problèmes.
Mes chers collègues, les membres du groupe centriste veulent vous inviter à revoir vos ambitions à la hausse et à mener ces politiques de long terme dont le pays a besoin.
Régis Debray écrit justement dans Le Plan vermeil : « La vieillesse en Europe est une idée neuve, et le déclin de l’esprit prospectif dans nos pays a de quoi inquiéter. Quand le long terme disparaît sous l’urgence, le civisme aussi, sous le despotisme douceâtre des bons sentiments. »
À l’évidence, ce projet de loi, qui se contente de faire évoluer certains paramètres, comme si l’architecture d’ensemble du système était satisfaisante, et qui s’est fixé pour horizon financier l’année 2020, ne peut constituer qu’une première étape, certes importante, sur le chemin d’une réforme plus globale, ne serait-ce que parce qu’il se fonde sur l’hypothèse d’un retour du taux de chômage à 4, 5 % d’ici à 2018, une situation que nous n’avons pas connue depuis plus de trente ans.
Il nous faudra donc discuter de nouveau, un jour, de l’équilibre financier du régime des retraites et réfléchir à remplacer le système d’annuités par un régime unique par points ou en comptes notionnels. Ce ne serait pas complètement un saut dans l’inconnu, puisque bon nombre de Français relèvent déjà d’un système de retraite par points à travers les régimes complémentaires.
Le système par points est beaucoup plus adapté que les annuités au fonctionnement d’une répartition moderne, et il n’est pas moins solidaire : la valeur du point constitue une variable de commande, qui permet de ne pas distribuer aux retraités plus d’argent que les cotisations des actifs n’en font rentrer dans les caisses, sans avoir à augmenter indéfiniment les cotisations ou à recourir à l’emprunt ; ainsi, le système apparaît constamment équilibré. Les assurés pourraient liquider leurs pensions quand ils le souhaitent, en quelque sorte à la carte, avec des coefficients qui leur feraient peser le pour et le contre. Chacun pourrait retarder la liquidation de sa pension de façon à bénéficier d’un coefficient plus élevé.
Ce sera, le jour venu, un système plus juste, plus souple et plus simple, qui assurera une véritable équité entre les générations et rendra justice aux carrières longues. Ce sera aussi un régime unique en lieu et place de la quarantaine que nous connaissons aujourd’hui.
Voilà donc une solution novatrice et simple, susceptible de modifier le système en profondeur. Les auteurs du septième rapport du Conseil d’orientation des retraites ont d’ailleurs montré, en janvier 2010, qu’il était possible de passer des annuités aux points. Plusieurs pays l’ont fait, d’ores et déjà : ainsi, l’Allemagne, la Suède et les États-Unis disposent d’un tel système.
Chacun le sait : ce projet de loi ne permet pas d’assurer définitivement la pérennité de notre régime de retraites.