Mme Laborde s’est demandé comment dynamiser notre réseau culturel. Elle a également abordé un sujet délicat, à savoir ce que j’appellerais la dialectique du diplomate et de l’artiste : faut-il que les artistes dirigent les choix culturels, ou cette mission revient-elle aux diplomates ? La bonne réponse consiste à établir un mélange harmonieux – et cette position n’est pas dictée par le fait que je suis Normand d’adoption ! Il n’est pas possible de mener une action culturelle sans faire appel aux artistes ni aux professionnels de la culture, mais je connais beaucoup de diplomates cultivés... §
Redevenons sérieux : c’est un bon brassage des diplomates et des artistes qui permet à notre politique culturelle extérieure d’avancer.
Enfin, comme beaucoup d’autres orateurs, Mme Laborde a soulevé la question de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis. Le Président de la République a demandé instamment que l’audiovisuel et la culture soient exclus de cet accord, car la Commission européenne ne l’avait pas fait spontanément, vous l’aurez peut-être noté. La position de la France – qu’elle n’est pas seule à défendre – mérite donc d’être soutenue avec force et nous avons l’intention de la maintenir dans toute cette discussion. Je crois comprendre que le même souci de préservation de la diversité culturelle s’exprime sur toutes les travées de votre assemblée, ce qui sera un atout pour défendre notre position.
M. Beaumont a souligné que la France était une puissance culturelle qui comptait, tout en se demandant jusqu’à quand, manifestant ainsi son inquiétude. Cette interrogation est légitime, mais je ne suis pas pessimiste. Étant, par profession, amené à faire un tour du monde à peu près tous les mois, je mesure que nous avons non seulement un réseau – essentiel ! –, mais aussi un rayonnement culturel qui reste absolument exceptionnel.
Bien sûr, nous devons rester vigilants, en raison non seulement des contraintes budgétaires, mais aussi de la concurrence. Les nouvelles technologies nous imposent de changer un certain nombre de nos méthodes, mais elles rendent également possible le maintien de notre rang de puissance culturelle. Il n’y a pas de fatalité négative dans ce domaine et la France, à condition bien sûr que nous réfléchissions ensemble et que nous prenions les bonnes décisions, peut tout à fait se maintenir à la pointe avancée du rayonnement culturel.
M. Le Scouarnec a insisté, au début de son propos, dans une énumération parfaitement exacte, sur la place tout à fait éminente dans le monde de notre réseau culturel et scolaire. D’une façon plus prudente, il a évoqué un risque de déclin, se demandant si l’usage de notre langue ne serait pas en recul. Il a également souligné la baisse d’un certain nombre de crédits, même s’il sait que le secteur de l’enseignement a été entièrement préservé.
Sur une question que nous nous posons tous quant aux orientations à donner à notre politique culturelle, j’ai apprécié qu’il exprime son choix en faveur de ce qu’il appelle les « pays d’avenir ». Bien sûr, j’imagine que si l’on posait cette question à chaque pays, peu d’entre eux s’excluraient de la liste, mais vous avez tout à fait raison, monsieur le sénateur. Il faut que notre réseau, sur le plan culturel comme sur le plan diplomatique, s’adapte : le monde de 2030 n’est plus celui de 1980.
Nous nous retrouverons donc facilement sur la nécessité d’être présents en Afrique, grand continent potentiellement francophone. Plusieurs d’entre vous ont indiqué que nous étions aujourd’hui environ 230 millions de francophones, les chiffres sont discutés, mais ils ne le sont pas pour le futur : d’ici à une trentaine d’années, avec le développement de l’Afrique, nous pourrions être 800 millions et voisiner le milliard. Nous devons donc y travailler.
Enfin, monsieur Le Scouarnec, vous avez également insisté sur l’exception culturelle. Je compte donc sur le rassemblement de tous les groupes politiques de votre assemblée pour nous aider à faire prévaloir cette notion extrêmement importante.
M. Christophe-André Frassa, avec force et humour, s’est désolé du recul de notre influence culturelle. Je ne suis pas aussi pessimiste que lui et je ne suis d’ailleurs pas sûr qu’il le soit lui-même, puisqu’il connaît très bien nos compatriotes de l’étranger. Même si la situation est difficile, il voit bien que notre influence reste très importante, même si nous avons affaire à une très forte concurrence de la part des États-Unis ou de la Chine.
M. Frassa a aussi évoqué, comme un reproche, l’attractivité que les autres pays exercent sur notre jeunesse. S’il s’agissait d’une fuite de nos jeunes, le phénomène serait préoccupant, et il faut tout faire pour éviter d’en arriver là. En même temps, nous devons nous féliciter du fait que nos jeunes aillent à l’étranger, car ils sont nos ambassadeurs et ils portent beaucoup d’espoirs – beaucoup d’intervenants ont parlé de « l’envie de France », il ne faudrait évidemment pas que ces départs expriment un « dépit de France ». J’estime cependant que nous devons nous réjouir de la présence de nombreux Français à l’étranger, notamment de jeunes.
Enfin, M. Frassa a rendu hommage à l’action de nos diplomates et de nos expatriés ; je pense que nous devons tous nous retrouver sur ce point.
M. Jean Besson, qui, lui aussi, connaît très bien ces questions, a souligné la concurrence culturelle des BRICS, Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Il s’est interrogé sur les opérateurs nouveaux, portant ce qui me paraît être un jugement positif. Mais il attire l’attention sur la baisse des moyens et il souligne que les gisements de ressources propres sont limités. Ils sont, certes, limités, mais ils ne sont pas nuls, loin de là ! Sans aller, bien évidemment, jusqu’à considérer que tout va se faire par autofinancement, il faut avoir à l’esprit, eu égard aux trajectoires budgétaires, dont il est improbable qu’elles deviennent spontanément merveilleuses dans les prochains mois, de faire flèche de tout bois.
J’évoquerai, dans le cours ultérieur de mon propos, l’Institut français, sur lequel il me paraît prématuré de porter un jugement. D’ailleurs, vous avez prévu, dans votre sagesse, de faire établir cette année un certain nombre de rapports et évaluations. De bonnes choses ont été faites. Ce qui reste en question, c’est l’opportunité d’une extension. En tout cas, nous disposons, grâce à vous, de premiers d’éléments d’évaluation, et je veux vous en remercier.
M. Vallini, qui connaît extrêmement bien notamment lessujets audiovisuels, m’a posé une série de questions. Faute de pouvoir répondre à toutes, ce dont je le prie à l’avance de bien vouloir m’excuser, j’en ai pris note. En effet, il y avait, comme souvent, d’ailleurs, la réponse dans la question