Intervention de André Gattolin

Réunion du 26 mars 2013 à 21h30
Débat sur les enjeux et les perspectives de la politique spatiale européenne

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Pourtant, à bien y réfléchir, il s’agit d’un élément essentiel pour nous qui nous fixons comme ligne de conduite de penser global et d’agir local.

L’espace est en effet le lieu le plus absolu de cette pensée à l’échelle globale – et, ajouterais-je, inscrite dans le temps long – que nous appelons de nos vœux.

Nous nous efforçons d’agir en cohérence avec notre souci de préserver la planète, ses ressources, son équilibre et ses dynamiques.

De ce point de vue, l’espace nous donne à voir un spectacle singulier : celui d’un globe fini, fragile, isolé… et finalement pas tant que cela.

L’espace nous fait prendre conscience de notre propre finitude et en même temps, par la fascination qu’il exerce, nous fait rêver et nous aide à comprendre que ces limites ne demandent qu’à être surmontées.

En disant cela, je pense notamment à un article publié en une du journal Le Monde le 21 mars dernier. On y voyait un ovale coloré de multiples taches aux tons bleus et ocrés. Il s’agissait d’une image représentant l’univers à son stade le plus jeune jamais observé, soit 380 000 ans. C’était il y a 13, 8 milliards d’années.

Ce cliché offre aux chercheurs du monde entier une gigantesque mine d’informations à analyser. Il a été rendu possible grâce à la politique spatiale européenne ; ce sont en effet des scientifiques travaillant pour l’ESA, l’Agence spatiale européenne, qui l’ont réalisé à partir des données transmises par le satellite Planck. Il pourrait justifier à lui seul, je crois, l’existence de cette politique.

Elle connaît pourtant actuellement une période difficile, en raison, d’abord, du contexte économique et, ensuite, du contexte institutionnel.

Sur le plan économique, elle risque de pâtir, comme toutes les autres politiques, des restrictions budgétaires engagées dans toute l’Europe. Quand les Américains consacrent 48 milliards de dollars à l’espace, les Européens n’en consacrent que 6.5 milliards.

Et si cette politique ne représente « que » 35 000 emplois à travers l’Europe, ses retombées sont difficilement quantifiables. Elles vont des satellites météorologiques à l’aide à la navigation, en passant par les études qu’une telle politique rend possibles en matière d’environnement ou de changement climatique.

La concurrence est vive, en provenance des États-Unis mais aussi de la Russie, de la Chine ou de l’Inde, pays qui cherchent à engager ou à renouveler une politique de prestige et de puissance peu commune.

Sur le plan institutionnel, nous sommes face à une redéfinition, au moins partielle, de la politique spatiale européenne et de son organisation.

Depuis 1975, l’ESA, qui fonctionne sur un mode intergouvernemental, est l’organe européen de cette politique, soutenue pour l’essentiel par deux États membres, la France et l’Allemagne.

Mais depuis le traité de Lisbonne et l’article 189 du traité sur le fonctionnement de l’Union, cette politique est devenue un domaine de compétences partagé entre l’Union et les États membres. Ce n’est pas un problème en soi, car des programmes comme Galileo ou GMES, Global Monitoring for Environment and Security, ont besoin de nouveaux financements, d’une impulsion permanente et d’une collaboration toujours plus forte.

Cependant, des ajustements sont nécessaires, ne serait-ce que pour éviter que les industries des deux pays que je citais à l’instant ne soient dépossédées de leurs outils, sans que de nouvelles dynamiques se mettent en place par ailleurs.

Parmi ces outils, ces richesses, ces moyens dont disposent la France et l’Europe, je pense en particulier au centre spatial guyanais. C’est un dispositif essentiel de cette politique en raison de sa localisation géographique, au niveau de l’équateur. De nulle part ailleurs aujourd’hui la mise en orbite de satellites géostationnaires n’est aussi fiable que depuis Kourou, quels que soient le type de lanceurs ou l’altitude visée, ce qui explique la très forte compétitivité du site.

Les écologistes soutiennent l’existence d’une politique spatiale européenne ambitieuse.

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