Je vous prie d'excuser ce retard ; il est d'ailleurs assez coutumier dans ma façon d'être.
Ce texte a pour objectif la réussite de nos enfants. Les travaux réalisés ces dernières années ont permis d'aboutir à un diagnostic partagé sur les difficultés : le nombre trop élevé des décrocheurs, la hausse des inégalités, etc. Dès lors que le consensus prévaut, des réformes sont possibles, à l'image de la loi de 2004 interdisant le port des signes religieux à l'école, votée par l'ensemble des groupes, sur laquelle le Conseil d'État vient de s'appuyer pour revenir sur la décision du tribunal de Melun.
Priorité au primaire, tel est le maître mot. L'enjeu n'est pas négligeable, au vu de l'histoire de notre système éducatif, même si entre une loi et les réalités, l'écart est parfois grand. Est-ce simplement une affaire de moyens ? Certes il manque des enseignants : nous créons 27 000 postes supplémentaires. Nous manquons comme jamais de professeurs en primaire, notamment en cours préparatoire. Les postes créés à la rentrée 2013 serviront souvent à reconstituer le vivier de remplaçants. Mais notre réforme traduit aussi le principe du « plus de maîtres que de classes ». Elle s'accompagne d'un changement de la pédagogie et de la relation maître-élève. La priorité au primaire englobe la maternelle et les conditions spécifiques de l'accueil des petits.
Deuxième objectif : la formation des enseignants. Comme pour la réforme du temps scolaire, il ne s'agit pas de revenir à la situation antérieure. La création des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) s'appuie sur les bonnes pratiques. Elles permettront une entrée progressive et professionnalisante dans le monde enseignant. Mon ministère travaille à l'élaboration, non seulement des maquettes de ces écoles, mais aussi de nouveaux référentiels de métiers, et à la refonte des concours. Ces écoles doivent porter notre ambition en matière de pédagogie : outre les disciplines fondamentales, la psychologie des enfants, la didactique, le numérique, la laïcité que doivent connaître les enseignants du XXIe siècle.
Cette loi inclut aussi un volet de programmation ; elle octroie des moyens, détermine leur affectation dans le temps en fonction des priorités affichées.
La réforme des rythmes scolaires, d'ordre réglementaire, ne relève pas de cette loi, mais participe du même esprit d'ambition pour la réussite.
La loi se donne aussi comme ambition de mettre en place un service public numérique éducatif, facteur de réussite éducative et élément important dans la compétition internationale. D'autres pays le font très bien. Si nous n'y parvenons pas, le secteur privé s'en chargera.
La réforme de l'orientation constitue le dernier chantier. Cette loi a-t-elle accouché d'une souris, comme certains l'ont affirmé à l'Assemblée nationale ? Il ne s'agit pas de reconstruire la maison de la cave jusqu'au plafond, mais de poser des jalons consensuels. L'instauration d'un parcours d'orientation et d'information dès l'entrée au collège, pour surmonter le clivage entre l'école et l'entreprise, n'est-ce pas une réforme importante ? De même, le parcours d'éducation artistique et culturelle, l'enseignement de la morale, l'enseignement des langues étrangères dès le CP, la généralisation des conseils pédagogiques entre l'école et le collège constituent autant d'avancées.
Nous nous inscrivons à cet égard dans la continuité. L'idée des cycles, introduite par la loi Jospin de 1989, est reprise par tous. De même, nous faisons nôtre l'idée du socle commun de connaissances, défini par la loi Fillon de 2005, mais qui en réalité n'a pas été mise en oeuvre. La loi, avec la modification du socle, le Conseil supérieur des programmes, ou le Conseil national d'évaluation des programmes, nous donne les instruments nécessaires à la réussite, à l'évolution des pratiques, sans déclencher de polémique. Nous avons ainsi ajouté, après de nombreuses discussions, la culture au socle : tout le monde soutenant cette initiative, elle sera mise en oeuvre, loin des critiques qui avaient entouré cette notion lors de sa définition. Nous avançons de manière pragmatique !
Je n'assisterai pas aux travaux en commission. Il est important que la France parle de l'école. L'école n'appartient à personne car elle appartient à tous. Peu de débats parlementaires ont eu lieu, même si le Parlement compte des spécialistes. Je souhaite que le débat soit riche au Parlement. La procédure accélérée n'a pas été engagée sur ce texte ; tous les points de vue pourront s'exprimer, et seront les bienvenus.