Intervention de Xavier Ursat

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 26 mars 2013 : 1ère réunion
Energies marines renouvelables — Table ronde

Xavier Ursat, directeur délégué de la direction production ingénierie hydraulique d'EDF :

Je vous parlerai plus particulièrement du parc hydrolien de Paimpol-Bréhat, qui est le premier projet consacré par EDF à l'hydrolien. Pourquoi EDF s'intéresse-t-elle à l'hydrolien ? D'abord parce que nous avons une expérience et un savoir-faire avec l'énergie des marées : l'usine marémotrice de la Rance tourne depuis 1966, elle produit 500 GWh, ce qui correspond à l'électricité consommée par une ville comme Rennes et ce qui en a fait la plus puissante du monde jusqu'à l'an passé et l'ouverture l'usine marémotrice de Sihwa Lake en Corée du Sud. La mer, ensuite, est une source d'énergie tout à fait prévisible, ce qui rend l'hydrolien très intéressant pour notre mix, au-delà même de la part qu'il y prendra : on parle d'un potentiel de 10 à 15 TWh, nous y voyons d'abord, même avec une production bien plus modeste, un apport décisif à notre mix énergétique. Troisième facteur d'intérêt : l'hydrolien peut atteindre la maturité économique et industrielle dans un délai raisonnable. Nous pensons qu'à l'horizon d'une dizaine d'années, la convergence avec le prix du marché peut être atteinte, aux alentours de 100 euros le MWh : ce délai est également celui qu'il faut pour constituer une filière. Nous pensons que notre pays dispose de tous les éléments nécessaires à cette filière, depuis la recherche jusqu'à l'outil industriel : tout est réuni pour que nous ayons de l'avance lorsque l'hydrolien sera parvenu à l'équilibre économique, et c'est maintenant qu'il faut agir.

A Paimpol-Bréhat, nous installons la première hydrolienne d'un projet de ferme pilote composée de quatre hydroliennes et d'équipements permettant le raccordement au continent, avec la puissance équivalente à la consommation de deux à trois mille habitants. Le projet se situe à une quinzaine de kilomètres du littoral, dans une zone importante pour les crustacés et la pêche locale, ce qui implique une coopération étroite avec le comité des pêches. L'hydrolienne que nous développons est construite par Open Hydro, une société irlandaise entrée depuis peu dans le giron de la DCNS. Le coût de la première hydrolienne - un engin de quelque 900 tonnes, que nous devons transporter par un catamaran spécifique construit sur les chantiers STX à Saint-Nazaire - voisine 40 millions d'euros, dont 7,2 millions ont été apportés par subventions de la région Bretagne, de l'Ademe et du Feder.

Le respect de l'environnement est au coeur de notre cahier des charges, de même que la concertation avec les acteurs locaux. Nous avons choisi une technologie posée, plutôt qu'ancrée, c'est moins agressif pour l'environnement, nous veillons à faire passer le câble par l'itinéraire le moins perturbant et nous avons beaucoup travaillé sur l'intégration des bâtiments au paysage.

Le projet a des retombées économiques locales directes. L'emploi est intégralement européen, aux trois-quarts français et... pour moitié breton !

Nous avons mis à l'eau une machine pilote à l'automne 2011, nous l'avons remontée l'an passé et vérifié alors que le milieu marin est effectivement très difficile pour les machines. Nous avons lancé la construction de la première hydrolienne et posé le câble l'été dernier. Elle serait déjà raccordée s'il n'y avait pas eu une rupture de treuil lors d'un test en rade de Brest, qui nous a conduit à revoir la conception même des treuils et de la barge de transport : le prochain test est prévu à l'automne prochain, pour un raccordement en 2014.

Cette première ferme pilote doit jouer le rôle indispensable du démonstrateur, pour évaluer la faisabilité économique et environnementale de la filière. Je rejoins ce qui vient d'être dit sur le rôle de l'Etat : c'est bien à la puissance publique d'établir les conditions de développement de la filière, nous avons besoin d'un cadre réglementaire efficace et cohérent, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui - j'indique pour l'exemple que nous avons eu le plus grand mal à faire établir un permis de construire pour le raccordement de l'installation, du fait qu'elle était en mer... Il faut également évaluer l'acceptabilité sociale de la filière : notre projet a déclenché bien des questions, des inquiétudes ; nous avons travaillé avec les acteurs locaux, en particulier avec les pêcheurs, qui ont, je crois pouvoir le dire, été rassurés par notre démarche et par le respect que nous avons du milieu marin.

Le temps est effectivement venu d'organiser la filière, car l'hydrolien sera au stade industriel dans une dizaine d'années : nous pouvons avoir un avantage compétitif, ne ratons pas le coche !

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