Intervention de Philippe Kaltenbach

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 mars 2013 : 1ère réunion
Protection pénale des forces de sécurité et usage des armes à feu — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

Je félicite Mme Virginie Klès pour la qualité de son travail et de ses propositions. Je partage ses conclusions. C'est un mauvais texte, qui ne tient aucun compte du rapport rendu en juillet dernier au ministre de l'Intérieur par le conseiller d'État Mattias Guyomar sur la protection fonctionnelle des policiers et des gendarmes : ce dernier écarte l'idée d'une présomption de légitime défense, exclut de modifier le cadre légal d'usage des armes à feu et propose de réfléchir à des moyens intermédiaires comme les armes non létales. Il invite enfin à codifier les exigences d'actualité de la menace, de nécessité et de proportionnalité, dégagées par la jurisprudence pour justifier l'usage légal des armes à feu.

Cette proposition de loi ne fait que répondre à des faits divers qui ont suscité, je le reconnais, une vive émotion. Elle ne répond toutefois pas aux questions de fond et apparaît contraire à la jurisprudence de la CEDH. Une proposition analogue a même été rejetée par l'Assemblée nationale. D'après l'exposé des motifs, « il est inacceptable qu'aujourd'hui en France un policier doive avoir été blessé pour être juridiquement en mesure de riposter » : son auteur n'a manifestement aucune connaissance du sujet. Ce texte n'est qu'un cadeau fait au syndicat de police Alliance, une réponse à une demande corporatiste.

Ce qui mériterait réflexion, ce serait un alignement des règles législatives applicables aux gendarmes sur celles des policiers. Les gendarmes sont en effet toujours soumis aux dispositions du code de la défense, qui leur permettent de faire usage de leurs armes hors légitime défense ou était de nécessité, mais la jurisprudence de la CEDH ne fait pas de différence entre policiers et gendarmes dans son appréciation des conditions de recours à la force armée. La réflexion doit donc plutôt porter sur une modification du code de la défense car la différence actuelle crée une insécurité juridique pour les gendarmes. Ils s'estiment juridiquement protégés : ils ne le sont pas.

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