Intervention de Philippe Kaltenbach

Réunion du 28 mars 2013 à 15h00
Abrogation du délit de racolage public — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

La position abolitionniste et le message de fermeté qui sont ceux de la France depuis l’après-guerre font que, comme l’a rappelé Mme la ministre des droits des femmes, il y a dix fois moins de personnes qui se prostituent dans notre pays qu’outre-Rhin. L’Allemagne est souvent citée en modèle, mais sûrement pas pour la prostitution. Peut-être faudrait-il plutôt considérer les cas de la Suède ou de la Grande-Bretagne.

Le 6 décembre 2011, l’Assemblée nationale a renouvelé ce message en adoptant à l’unanimité une proposition de résolution qualifiant « les violences inhérentes » à la prostitution et a fixé l’objectif d’atteindre « à terme, une société sans prostitution ». Mais revenons au texte qui nous intéresse aujourd'hui.

Il paraît indispensable au groupe socialiste d’abolir le dispositif introduit par M. Sarkozy, qui conduit à punir des victimes. Il repose sur une logique injuste de culpabilisation à outrance des victimes. Toutefois, il nous a fallu procéder à un arbitrage.

En effet, peut-on se contenter de supprimer simplement un dispositif sans être, dans le même temps, force de propositions ? La question pourrait d’ailleurs se poser pour d’autres mesures engagées par M. Sarkozy sur le plan pénal. Je pense non seulement aux peines plancher, auxquelles le président de la commission a fait référence, mais également à la rétention de sûreté ou encore aux tribunaux correctionnels pour mineurs. Le parti socialiste demande l’abrogation de ces dispositifs, et c’est ce que nous ferons, j’en suis convaincu, lors de l’examen du grand projet de loi pénale sur lequel travaille Mme la garde des sceaux.

Dans le cas présent, fallait-il inscrire cette abrogation dans le cadre d’une réflexion plus large sur l’ensemble des politiques publiques à conduire en matière de prostitution ou fallait-il abolir cette disposition sans attendre ?

Le groupe écologiste a privilégié cette seconde option. Après discussion, les sénateurs socialistes ont choisi d’apporter leur soutien à cette démarche. Cependant, nous proposons d’amender cette proposition de loi ; notre collègue Jean-Pierre Godefroy défendra un amendement visant à réintroduire la contravention de cinquième classe afin de punir uniquement le racolage actif, dont le dispositif a été supprimé en 2003. En effet, l’adoption de la présente proposition de loi conduirait à un vide juridique, avec l’absence totale de condamnation du racolage, ce qui, dans un pays ouvertement abolitionniste, pourrait paraître pour le moins contradictoire.

Toutefois, nous ne voulons pas stigmatiser de nouveau les personnes prostituées qui sont et demeurent des victimes. Nous entendons avant tout envoyer un message à celles et à ceux qui se livrent au proxénétisme et qui pourraient interpréter cette absence de réglementation comme une forme d’incitation.

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