Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, la prostitution dite réglementée n’existe plus en France depuis que le Parlement a voté la loi du 13 avril 1946 tendant à la fermeture des maisons de tolérance et au renforcement de la lutte contre le proxénétisme, plus connue sous le nom de loi Marthe Richard.
Depuis lors, la prostitution a beaucoup évolué, dans ses effectifs comme dans son mode d’exercice ; son environnement juridique s’est également transformé, avec la pénalisation du racolage passif par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.
Dans notre pays, la situation légale de la prostitution est donc complexe : alors que la loi ne la sanctionne pas, la prostitution constitue la condition préalable du proxénétisme et du racolage, qui constituent jusqu’à ce jour des délits. Cette situation dans laquelle on cherche à réglementer sans punir tout en sanctionnant sans interdire est probablement à l’origine de l’évolution de la prostitution sur notre territoire. Aujourd’hui, ce phénomène pose de graves problèmes non seulement en termes de sécurité publique, mais également sur le plan sanitaire.
Nous ne devons pas non plus ignorer le respect de certaines valeurs morales auxquelles nombre de Français sont encore attachés, mais que notre société se charge de bousculer, voire de bafouer, sous le couvert d’un progrès social indispensable ou inhérent à l’évolution de notre société.
La prostitution d’aujourd’hui, qui n’est plus comparable à celle de l’après-guerre, concerne plus de 30 000 personnes – encore ce chiffre est-il probablement sous-estimé.
L’évolution concerne également son organisation. Nous savons que 90 % des professionnels du sexe sont recrutés par des réseaux mafieux, sans leur consentement et pour des raisons purement économiques : ces personnes cherchent à échapper à leur extrême pauvreté. Par ailleurs, nous ne pouvons que déplorer que l’immense majorité de ces travailleurs soient d’origine étrangère, venus essentiellement des pays de l’est et d’Afrique.
Très souvent aux mains de la criminalité organisée, nombre de prostituées sont victimes d’une forme d’esclavage et sont exposées aux maladies sexuellement transmissibles.
À côté de la prostitution de rue, qui est la plus répandue, la plus visible et donc la moins tolérable, il existe une prostitution fondée sur le recours à des professionnelles qui travaillent dans des milieux souvent plus aisés. Il y a également dans les grandes villes françaises certains salons de massage qui proposent implicitement des prestations s’apparentant à de la prostitution. N’oublions pas non plus la prostitution étudiante, qui conduit de jeunes femmes et, à une moindre échelle, de jeunes gens à financer leurs études en se prostituant par le biais de forums de rencontre.
Ainsi, la prostitution prend des formes variées, répondant aux besoins de consommateurs aux profils multiples ; elle s’exerce dans des lieux très différents et avec des modes opératoires modernes aussi bien que traditionnels.
Outre que les prostituées courent des dangers, qu’elles sont traitées avec une violence qui ne peut nous laisser indifférents et que des problèmes sanitaires se posent qui sont insuffisamment pris en compte, on ne peut pas faire abstraction de l’exaspération grandissante de nos concitoyens qui voient passer ou, pire encore, stationner sous leurs fenêtres des prostituées qui attendent leurs clients.
Dans ma ville, par exemple, des enfants sont témoins de relations sexuelles qui ont lieu dans des véhicules garés sur le parking du quartier.