Dans ce but, nous avons fait une série de propositions. Notre cap était fixé puisque la feuille de route du Président de la République vise à faire naître une agence française pour la biodiversité. Notre support sera la future loi-cadre pour la biodiversité. Au regard de ce que l'inspection générale des finances, le Conseil d'État et le comité interministériel pour la modernisation de l'action publique proposent, notre ambition est de faire en sorte que la construction de l'agence s'adosse à une stratégie nationale pour la biodiversité, et à une mission de protection et de valorisation des milieux naturels dans la proximité du terrain. Cette ambition doit être lisible en termes d'efficacité environnementale, et doit viser l'efficience budgétaire et fiscale. Dans notre rapport, nous avons essayé de rassembler des propositions de financement mais nous ne sommes pas allés au bout du sujet de l'efficience, qui pourrait aussi se mesurer en termes de mutualisation, et d'accès à l'information sur les ressources naturelles. L'objectif est également de contribuer à créer une certaine proportionnalité sur des sujets qui font débat en termes d'évitement, de réduction ou de compensation.
Nos objectifs pour promouvoir cette agence de la biodiversité étaient de plusieurs natures : prendre en compte un contexte économique et budgétaire difficile, faire en sorte que notre proposition se traduise en économies pour les opérateurs, garantir l'efficacité environnementale, travailler en partenariat, enfin, mettre la nature entre toutes les mains. La biodiversité ne doit pas être confinée dans des espaces protégés.
Nous avons travaillé sur la définition des futures missions de l'agence. Le modèle Ademe combine éducation et communication. Sur le sujet de la biodiversité et de l'ensemble des sciences du vivant, l'acquisition de connaissances et de savoirs n'est pas assez grande. Il faudra donc encourager la formation. La deuxième mission de l'agence pourrait être la veille et la prospective, c'est-à-dire développer la connaissance, sa collecte, son stockage, sa valorisation afin d'améliorer les savoir-faire des opérateurs territoriaux et nationaux. La professionnalisation de cette veille devrait permettre de prendre des décisions en meilleure connaissance de cause et à moindre coût. L'agence pourra également avoir une mission d'appui à la gestion des territoires, des aires protégées, des corridors écologiques, et aider à la création d'atlas locaux de la biodiversité.
La question s'est posée de savoir si l'agence aurait des missions de police. Nous avons proposé que l'agence ne soit pas une autorité environnementale. Elle n'aura pas une place d'autorité indépendante comme l'agence du médicament ou l'autorité de sûreté nucléaire et ne se substituera pas à l'autorité administrative du ministère ou des services déconcentrés. Nous proposons que l'agence soit un opérateur technique et non un opérateur administratif. Elle ne sera ni une tutelle sur des établissements publics comme les parcs nationaux, ni le pilote des services déconcentrés de l'État.
La question du rôle international de l'agence a également été traitée. La France a signé beaucoup d'engagements et de protocoles en matière de biodiversité. Nous avons proposé que l'agence ne soit qu'un soutien technique. Elle pourrait éventuellement être mandatée pour organiser un suivi des engagements internationaux, mais elle ne serait pas autorité de négociation internationale multilatérale. Nous avons proposé qu'elle ne se substitue pas à l'agence française de développement en matière de biodiversité.
En matière d'intervention financière, nous avons fait la proposition que l'agence fonctionne par appels à projets, sur le modèle de l'Ademe ou du fonds français pour l'environnement mondial.
L'agence française de la biodiversité sera ainsi une agence de services, d'aide au développement de capacités territoriales. Elle ne confisquera ni l'autorité ni l'engagement des acteurs de terrain.
Pour la gouvernance, ce pourrait être un établissement public à caractère administratif, regroupant des opérateurs existants, dont l'agence des aires marines protégées, qui représente cent quarante emplois, l'atelier technique des espaces naturels, pour une quarantaine d'emplois, et Parcs nationaux de France, pour quarante emplois également. L'effort est mis sur la mutualisation. Nous prévoyons aussi d'intégrer d'autres services financés à presque 100% par subventions du ministère.
Une de nos propositions a été interprétée, à tort, comme un démantèlement d'autres organismes : il s'agissait de rattacher l'office national de la chasse et l'office national de l'eau et des milieux aquatiques dans le cadre de missions communes, au sens du code de l'éducation, c'est-à-dire de travaux en commun, sans que l'autonomie de chacun de ces établissements publics ne soit menacée. La commande qui nous a été passée par la ministre est de continuer à travailler sur ces idées de rapprochements et de synergies. Devant la fédération nationale des chasseurs, la ministre a en tout état de cause rappelé son attachement au maintien de l'intégrité de l'office national de la chasse en tant qu'établissement public.
Pour la mise en place de l'agence de la biodiversité, nous proposons qu'elle monte en régime, depuis l'année 2015, où elle pourrait être créée, jusqu'à l'année 2020. Il faut prendre le temps de procéder aux divers regroupements d'institutions prévus, et d'ajuster les éventuelles superpositions de missions. Nous avons proposé que cette montée en puissance se fasse par l'intermédiaire d'un fonds d'intervention, sur le modèle du fonds français pour l'environnement mondial. Ce fonds est recapitalisé tous les trois ou quatre ans, au fur et à mesure de la consommation des crédits. Cela permet une programmation et une visibilité pluriannuelles.
Les cinquante premières interviews que nous avons conduites en décembre et en janvier nous ont montré qu'il y a une attente réelle de la part du réseau des collectivités, tant les intercommunalités que les communes, départements et régions, pour bénéficier des services de ce futur opérateur technique. Il y a aussi une attente des professionnels. Des programmes partenariaux avec les entreprises et les collectivités territoriales pourraient être bâtis, sous la forme d'appels à projets ou de contrats de partenariat.