Intervention de Sophie Primas

Réunion du 8 avril 2013 à 14h30
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Article 1er

Photo de Sophie PrimasSophie Primas :

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, je veux ici vous faire part à la fois de mon profond malaise, de ma gêne, mais aussi de ma colère, après avoir entendu, cet après-midi, en début de séance, les propos de M. Assouline, qui semble nous rendre responsables des exactions commises ce week-end.

C’est bien évidemment faux et insultant ; nous condamnons formellement ces comportements. Je veux rendre hommage à Jean-Pierre Raffarin et à Mme le garde des sceaux pour leurs propos d’apaisement.

En nous présentant ce projet de loi, sous le prétexte bien sûr très louable de liberté, d’égalité et de progrès social, vous avez, involontairement, fait de la communauté homosexuelle un « objet » politique, sur lequel vous attendez désormais une victoire politique.

Pourquoi cette loi portant sur la famille, finalement, cette loi d’avancée sociétale, se restreint-elle au seul champ des homosexuels ? En isolant les familles homoparentales des autres types de familles, vous les exposez ainsi à la vindicte populaire, à ce que nous avons parfois de pire dans notre République. Elles sont devenues des cibles pour des propos injurieux, insupportables ; elles sont en proie à des comportements outranciers : ceux des homophobes, que nous condamnons, ceux des extrémistes religieux et politiques, dans l’idéologie desquels si peu de Français se retrouvent, et, enfin, ceux des individus qui nous menacent ouvertement, portant atteinte à la liberté du Parlement de façon inacceptable.

Pour renforcer la normalité, la banalisation des couples homosexuels, pourquoi ne pas avoir attendu cette grande loi que vous nous annoncez dans les prochaines semaines, et qui traitera, je l’espère, de toutes les nouvelles formes de familles, y compris des familles homoparentales ?

Ainsi, leur exception aurait été gommée et leur intégration aurait été une réalité, au moins dans nos débats.

Madame le garde des sceaux, madame la ministre, je ressens malaise et gêne, car j’approuve avec responsabilité, respect et enthousiasme, mais surtout avec la même flamme que la vôtre, ce désir d’égalité ; j’approuve la reconnaissance par l’État de l’union homosexuelle, son droit à la pérennité et à la sécurité, son accès aux mêmes droits et aux mêmes devoirs que les couples hétérosexuels, sa banalisation dans notre vie sociale. Car, vous avez raison, qui se souciera dans trois mois, dans six mois, dans un an de cette union ?

Oui, madame le garde des sceaux, oui, madame la ministre, j’approuve cette reconnaissance par l’État de la réalité de l’amour homosexuel. Je revendique également aux côtés d’eux leur capacité à désirer, à aimer, à élever des enfants dans le bonheur et dans l’équilibre.

J’aurais tellement aimé vous accompagner sur ce chemin, madame le garde des sceaux, madame la ministre, très au delà de nos différences politiques.

Aussi, ma colère est d’autant plus vive que ce projet de loi est aussi un mensonge par omission. Vous voulez nous faire croire que nous parlerons plus tard des sujets sensibles de filiation et de procréation artificielle, dont vous avez repoussé la discussion. Mais plus tard sera trop tard !

En vérité, en adoptant cet article 1er, nous acterons un statut unique du mariage. Ainsi, les couples mariés homosexuels disposeront, grâce à la Cour européenne des droits de l’homme, à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à tout l’arsenal juridique européen, de l’accès à la PMA.

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