Avec cet amendement, nous demandons, en parfaite cohérence avec nos interventions depuis le début de ce débat, la suppression de l'article 2, qui vise à organiser la régulation d'un marché dont nous ne reconnaissons pas l'existence et encore moins le bien-fondé.
De nombreux points de cet article nous sont insupportables.
D'abord, il n'est pas normal que l'Etat et que le Gouvernement se défaussent littéralement de leurs responsabilités en faisant gérer par une autorité administrative indépendante, dénuée de toute légitimité démocratique, ce prétendu marché postal.
Les compétences données à cette autorité sont absolument colossales ; elles illustrent une nouvelle fois l'incapacité des autorités politiques à assumer les responsabilités pour l'exercice desquelles elles ont été élues. Nous restons résolument opposés à ces nouveaux modes de gouvernance.
Ainsi, cette autorité sera associée au Gouvernement pour préparer, dans le cadre des institutions européennes, la position française sur certaines questions. La dérive technocratique de l'Union européenne ne pourra qu'être confortée par de telles dispositions.
En outre, elle sera compétente pour interpréter la réalité de menaces à l'ordre public ou à la sécurité publique, sans qu'à aucun moment les juridictions administratives compétentes en la matière puissent avoir un quelconque droit de regard. C'est tout le dualisme de notre ordre juridictionnel qui est ainsi foulé aux pieds.
Par ailleurs, elle sera compétente pour déterminer l'évolution des tarifs du secteur réservé. C'est bien le Gouvernement qui, par ce texte, se défausse complètement de ses responsabilités en dépolitisant la question des tarifs du service public.
Vous me rétorquerez sans doute, monsieur le ministre, que c'est la directive de 2002 qui nous impose cette forme de régulation du marché postal. Toutefois, elle n'impose qu'une seule chose : que l'autorité qui va être mise en place soit juridiquement distincte et fonctionnellement indépendante des opérateurs postaux. De nombreux pays, comme l'Espagne, l'Italie, les Pays-Bas ou la Finlande, ont conservé la gestion, par le biais des ministères compétents, de ce prétendu marché postal.
L'expérience nous montre bien que ces autorités indépendantes des gouvernements comme des opérateurs historiques adoptent des positions idéologiques qui tendent à favoriser les concurrents de l'opérateur historique.
Ensuite, nous ne pouvons qu'être surpris par le choix fait par le Gouvernement de créer une autorité de régulation commune au secteur des télécommunications et des postes. Nous aurait-on menti, en 1990, lorsque l'on a imposé la scission des PTT sous prétexte que le service postal n'avait rien de commun avec celui des télécommunications ? La modernité consistait alors à séparer ce qui allait devenir France Télécom de ce qui est devenu La Poste ! Aujourd'hui, vous nous demandez - toujours au nom de la modernité, n'en doutons pas, monsieur le ministre -, de réunir les régulateurs de ces deux secteurs économiques.
Nous pourrions évidemment sourire devant l'ironie de l'histoire si cette évolution n'avait occasionné autant de fermetures de bureaux de poste, autant de gâchis financiers, autant de dégradations des conditions de travail pour les fonctionnaires des PTT.
Nous souhaitons démocratiser la composition et le fonctionnement de l'autorité de régulation en intégrant notamment l'intervention des représentant syndicaux et patronaux, des élus, ainsi que des représentants d'associations de consommateurs.
Le secteur postal relève d'un choix politique qui ne peut être laissé aux seuls experts. Les services publics sont des enjeux de société, et personne ne doit être écarté du débat sur leur avenir.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer purement et simplement cet article.