Le CNED accueille 1 167 professeurs affectés par la commission académique pour des raisons personnelles, souvent liées à une pathologie, un handicap ou un empêchement. Je n'ai pas accès aux dossiers médicaux. Les postes en réemploi, qui ne retourneront jamais dans le système éducatif traditionnel, ne sont plus que 80. Les textes de 2007 ont instauré deux types de postes : les postes adaptés de longue durée (PALD), de quatre ans renouvelables, et les postes adaptés de courte durée (PACD), d'un an renouvelable. Souvent, les PALD sont renouvelés et certains professeurs ont du mal à retourner dans le système dit classique. Certains basculent du PACD au PALD. Mais la philosophie est que l'affectation doit rester transitoire et ouvrir sur une nouvelle carrière.
Dans les centres de Toulouse ou de Rouen, 40 % des jeunes sont issus des populations de l'itinérance et des gens du voyage. Être affecté au CNED en raison d'un handicap personnel ne signifie pas que l'enseignant soit au fait des réalités des élèves ; il faut une formation au handicap des professeurs handicapés. Je présenterai un plan de formation des enseignants lié à leurs propres spécificités.
Historiquement, le CNED était marqué par l'anonymat, protecteur des uns et des autres. La ventilation aléatoire des copies visait précisément à empêcher le face à face. Or un tuteur apparaît nominativement, et les familles souhaitent connaître l'identité de l'enseignant. La formation est la vraie réponse, et nous avons présenté un dossier au ministère pour mieux former nos enseignants au handicap des élèves ou aux spécificités de certains publics. Nos contenus peuvent être excellents, emblématiques de la République, calqués sur ceux d'établissements haut de gamme, mais n'être pas adaptés aux besoins d'un public composé à 40 % de gens du voyage...
Les enseignants nommés seraient peu ou mal intégrés, a dit la Cour des comptes La critique est recevable. Nous ciblons l'adaptation des postes de travail sur les PALD, car un an, c'est trop court. La formation aux nouveaux métiers relève de la négociation syndicale, car il s'agit du statut de l'enseignant, du découpage horaire... Historiquement, le CNED avait une école d'ingénierie de la formation à distance, nous la réactivons.
La subvention de l'État représente 70 millions d'euros sur un budget global de 137 millions. Sur 1 167 enseignants, le CNED en rémunère 660, en PALD, à hauteur de 44,5 millions d'euros. Les enseignants en PACD demeurent rémunérés par les académies ; nous ne les inspectons pas, le suivi sanitaire et social est effectué par les commissions rectorales.
Il n'est pas question d'aller vers le zéro papier. Historiquement, le CNED comptait huit chaînes d'impression. Le papier régresse mais ne disparaît pas : nous sommes dans une logique d'hybridation, pour sortir de l'univoque du flux papier. Ceux qui le souhaitent peuvent commander l'impression. Nous conservons une structure papier, car il faut prendre en compte l'attente des inscrits. Historiquement, le CNED était un gigantesque centre de tri : 890 000 copies arrivaient à Rouen chaque année ! Aujourd'hui, 30 % des copies de collège et de lycée sont envoyées et corrigées en ligne, sur PDF. Nous pensons atteindre 50 % de copies dématérialisées d'ici deux ans. Cela donne lieu à un débat pédagogique, parfois très clivé, le centre de Toulouse ne voulant pas renoncer à l'écriture cursive.
À la rentrée, nous lançons un accompagnement à l'apprentissage de l'anglais dans le primaire, en ouvrant un espace pour les parents. Dans le premier degré, les familles peuvent bénéficier d'heures de présence de professeurs itinérants, sous forme de tutorat.
La question des compléments d'enseignement est la plus délicate. Notre conviction est que l'enseignement en ligne n'est plus uniquement dédié aux élèves du CNED, même si cela peut susciter interrogations et inquiétudes. Les élèves des établissements physiques sont de plus en plus équipés, connectés ; ils apprennent de plus en plus en ligne et accèdent aux contenus dans l'espace numérique de travail (ENT) de leur lycée. Cela ressemble furieusement à ce qui se passe chez nous.
Historiquement, le CNED permettait de suivre des enseignements dans des matières non proposées sur place : on peut suivre un enseignement de japonais en Ariège. Je serai toutefois prudent sur la question de l'hybridation, car ces choix relèvent de la tutelle et de la représentation nationale. Historiquement, le CNED n'a pas été conçu pour proposer des cours à la carte, même s'il le fait, notamment pour les enfants scolarisés à l'étranger dans des établissements locaux. Le CNED n'est qu'un outil. Quels enseignements en présentiel, quels enseignements en ligne, comment apprend-on en présentiel, comment apprend-on en ligne ? La technologie ouvre des perspectives, mais la réponse doit être politique. La question des absences est tout aussi politique. Technologiquement, nous pouvons suppléer aux absences des professeurs, mais s'inscrire dans une logique de substitution ou d'éviction risquerait d'entraîner des conflits.
La situation doit être analysée globalement. Le CNED, complément à l'enseignement public ? Dans le cas du soutien scolaire, oui. C'est l'un des défis posés par l'expérimentation, qui concerne 200 élèves, 45 enseignants et 9 établissements : les enseignants des établissements identifient les élèves ne maitrisant pas les acquis et les remettent entre les mains de mes tuteurs. Nous testons comment cette hybridation entre des enseignements présentiels et en ligne peut fonctionner, en préservant les cultures et les identités de chacun.
Nous venons en second après le monde physique ; nous n'avons pas vocation à l'inquiéter, mais à chercher la complémentarité. Mais cette évolution prendra du temps... Et la simple idée que des enfants soient scolarisés chez nous en soutien scolaire a donné lieu à de vifs débats, d'autant que certains estiment que c'est au marché de répondre à cette situation. Le fait que ce soutien soit assuré par des enseignants affectés au CNED a rassuré, mais il faut prouver que le travail en présence et en ligne profite à tous.
La notion de complément est donc délicate à manipuler : la décision n'appartient pas à un opérateur public, mais à la sphère politique ; je ferai la même réponse sur les absences.
L'Australie et la Nouvelle-Zélande, effectivement, offrent des exemples intéressants, mais dans un autre schéma caractérisé par l'autonomie des établissements et la communauté des enseignants de la même matière. L'établissement dispense des cours, mais c'est aussi un réservoir de contenus auquel la communauté des élèves peut accéder.
J'en arrive au périmètre de la gratuité. Les textes sont clairs : gratuité jusqu'à 16 ans, perception d'une redevance ensuite, afin de couvrir une partie des charges, comme l'impression des contenus.
La subvention s'élevait à 70 millions ; après le coup de rabot, elle atteint 69 millions. Elle couvre l'instruction obligatoire jusqu'à 16 ans pour les élèves scolarisés à Toulouse (école primaire), Rouen (collège) et Rennes (lycée). Au-delà, il y a toutes les préparations aux concours, qui sont désormais dans le champ concurrentiel, sauf pour certaines agrégations rares : les recettes ne couvriront jamais les coûts de certaines disciplines. Mais c'est la finalité de l'opérateur public...
Je n'ai pas répondu sur les jeux vidéo : toutes les études montrent que les coûts d'investissement sont très élevés pour un segment très court. Je ne suis pas contre, mais je n'ai pas les moyens aujourd'hui.