Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Depuis plus de deux décennies, l’exception culturelle est un principe fondamental de la politique culturelle de la France que nous avons constamment soutenu de ce côté-ci de l’hémicycle.
L’expression, souvent brocardée et qualifiée de « ligne Maginot », ne vise évidemment pas à affirmer une quelconque supériorité de la culture française. Elle traduit la volonté politique de considérer que les productions culturelles, les œuvres de l’esprit ne sont pas des marchandises comme les autres et ne peuvent pas être soumises aux seules règles du marché.
Dès l’après-guerre, ce principe s’est imposé pour le cinéma, avec la création à l’époque du Centre national de la cinématographie, le CNC, outil de soutien à la production originale française face à la puissance du cinéma américain.
Depuis, cette nécessité a été reconnue bien au-delà de nos frontières. Avec les autres pays francophones, la France a joué un rôle moteur dans l’adoption par l’UNESCO, en 2005, de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Jusqu’à maintenant, jamais l’Union européenne n’a mis en cause cette « exception ».
Aujourd’hui, sur l’initiative de la Commission, guidée par une vision ultralibérale du marché, s’annonce la négociation d’un accord de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne qui, pour la première fois, n’exclurait pas de son mandat de négociation les biens et les services culturels.
Alors que l’industrie cinématographique et audiovisuelle américaine n’a pas cessé de contester nos règlementations en la matière, tous ceux qui sont attachés à l’identité culturelle, à la vitalité de la création originale autant qu’à son poids économique en termes d’emplois ne peuvent qu’éprouver une grande inquiétude et une profonde indignation devant cette initiative de la Commission.
Fort heureusement, le Président de la République et le Gouvernement, par votre voix, madame la ministre, et par celle de la ministre du commerce extérieur, Nicole Bricq, qui sera en première ligne lors de cette négociation, ont affirmé sans réserve leur opposition à toute tentative de réintroduction de l’audiovisuel dans un accord de libre-échange.
Madame la ministre, face à la nouvelle donne du développement d’internet et du numérique, pouvez-vous nous dire quelle place tient l’exception culturelle dans votre politique et quelles initiatives vous comptez prendre avec vos collègues européens pour barrer l’initiative funeste de la Commission ?