Intervention de Jean-Pierre Vial

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 17 avril 2013 : 1ère réunion
Inscription de la notion de préjudice écologique dans le code civil — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Pierre VialJean-Pierre Vial :

Le rapporteur a accompli un excellent travail. Je ne peux d'ailleurs que convier mes collègues à se reporter à la remarquable synthèse qui a été établie en amont.

L'affaire de l'Erika a cumulé un très grand nombre de problématiques juridiques : droit maritime, identification des responsables, puis présentation trop rapide de l'arrêt de la Cour de cassation sous l'angle du dommage écologique. Constatons d'abord un échec de notre droit de l'environnement et félicitons-nous que la Cour de cassation en soit venue à reconnaître le dommage écologique. Les juristes se félicitent de cet arrêt et s'interrogent sur l'utilité de faire évoluer l'article 1382 du code civil. En effet, pourquoi ébranler un principe dont la Cour de cassation a montré la pertinence en le faisant évoluer ? En revanche, l'article 1386-19 créé par le texte que nous examinons, s'en démarque, et devrait s'inscrire dans la logique des articles 1383 et 1384.

Enfin, la réparation des dommages en nature me gêne. Après l'affaire Arcelor-Mittal en 2012, nous risquons de connaître en 2013 l'affaire Rio Tinto Alcan, l'ex-Péchiney. Mon département héberge un des deux sites d'aluminium dont l'avenir va se jouer dans les prochaines semaines. Péchiney représentait hier 80 000 emplois, plus de 100 sites en France ; Rio Tinto Alcan emploie 3 500 emplois dont Dunkerque et Saint-Jean-de-Maurienne.

Le Gouvernement se bat pour sauver ces deux sites, notamment celui de Savoie, menacé à court terme, et nous avons plus de cent sites pollués en France. J'ai contacté les maires concernés pour voir comment engager une action contraignante envers cet industriel, l'évaluation de la dépollution étant fixée à deux ou trois milliards d'euros. Or, à ma grande surprise, certains me répondent que la société leur propose de mettre gratuitement à leur disposition les sites, pour en faire des terrains de sport ou autre, ce qui lui évitera de débourser des milliards pour les remettre en état. Voilà les conséquences perverses de la réparation en nature.

De ce fait, je suis favorable à l'article 1386-19, à condition de le réécrire autrement que par référence à l'article 1382. Sur l'article 1386-20, je suis sceptique, car les effets pervers peuvent l'emporter sur l'apparente satisfaction d'une réparation.

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