Je remercie tous les intervenants pour l'éclairage qu'ils apportent sur la réalité des jeux en ligne, et je rends hommage à François Trucy, rapporteur de la loi en 2010, et fortement impliqué dans son suivi. Le chantier n'est pas achevé. Le premier objectif de la loi était de légaliser les jeux en ligne : c'est chose faite. Je souhaiterais en revanche voir plus clair sur un deuxième objectif : celui des rentrées fiscales. Les jeux rapportaient, jusqu'en 2010, 4,7 milliards d'euros de recettes publiques. L'assiette et le taux retenus devaient éviter toute perte de recettes. Les joueurs et les mises ayant augmenté, y a-t-il eu davantage de rentrées fiscales ? La réponse apportée à la question écrite que j'ai adressée au Gouvernement indique qu'elles ont stagné autour de 4,6 milliards d'euros. Le législateur doit être attentif à la préconisation de modération fiscale recommandée par M. Cacheur, mais on ne peut décemment baisser les taux que si l'on est certain qu'au bout du compte, la recette totale ne diminuera pas.
L'opérateur historique semble avoir plutôt bien vécu l'ouverture du secteur à la concurrence. C'est rassurant pour lui, moins pour les nouveaux entrants sur le marché...
Un mot sur les addictions. Chaque Français qui joue dépense 50 à 60 euros par mois. Mais les jeunes joueurs dépensent en moyenne 164 euros mensuels : ce sont précisément les nouveaux joueurs attirés par les jeux en ligne. Les deux tiers des joueurs ont en moyenne trente-six ans, un revenu estimé entre 1 500 et 2 000 euros par mois, un niveau Bac+2, et vivent en concubinage sans enfants. Quelles conséquences l'ouverture du secteur a-t-elle eu sur cette catégorie de joueurs ? Les dispositions adoptées dans la loi destinées à diminuer l'exposition des jeunes publics aux publicités agressives pour les jeux ont-elles été efficaces, lorsque l'on sait par ailleurs que les jeunes passent de plus en plus de temps sur Internet ?
Par ailleurs, la corruption est un problème qui inquiète tout le monde. Nous nous sommes tous émus du scandale déclenché à l'occasion du match de handball Cesson-Montpellier de la saison 2011-2012, ainsi que de celui révélé par l'enquête d'Europol sur les 680 matchs de football truqués. Le dispositif existant, qui s'appuie notamment sur le délit de corruption sportive créé l'année dernière, est-il efficace ? Il apparaît que 90 % des mises sont le fait de 5 % des plus gros joueurs. Cela conforte les soupçons de blanchiment d'argent que l'on peut avoir. La presse a récemment révélé que 30 % des dirigeants sportifs disaient avoir déjà fait l'objet de pressions voire de violences pour modifier un résultat, sans parler des joueurs, encore moins des arbitres... La loi a-t-elle suffisamment pris les devants dans ce domaine ?
En 2010, la France s'est appuyée sur l'expérience italienne. L'Allemagne restait en retrait, comme les États-Unis, réticents à l'idée de modifier leur cadre juridique, même si des contournements de celui-ci ont été rendus possibles. La situation a-t-elle évolué vers une plus grande harmonisation ?