Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, l'environnement économique et industriel dans lequel se situe notre pays est de plus en plus marqué par la concurrence, par une recherche constante de compétitivité, par une course perpétuelle à l'innovation, le phénomène le plus important résidant dans l'émergence de nouveaux pôles industriels dans le monde.
Pour résister à la concurrence actuelle et future, il est impératif de mener une politique industrielle de l'armement ambitieuse. C'est pourquoi il nous paraît nécessaire de favoriser la création d'un certain nombre de pôles industriels performants et de taille européenne.
Cela est vrai dans le domaine de l'industrie de l'armement, comme dans l'ensemble du domaine industriel et c'est dans cette perspective que je vous propose, au nom du Gouvernement, le présent projet de loi.
DCN dispose aujourd'hui d'atouts majeurs, qu'il s'agit de faire valoir sur le plan tant européen que mondial, grâce non seulement à ses personnels et à leur savoir-faire, mais aussi aux redressements qui ont été réalisés au cours des dernières années ; je pense tout particulièrement au changement de statut de l'entreprise, qui se révèle aujourd'hui une réussite. Celle-ci se traduit par une avance de deux ans sur le plan à moyen terme, par un retour à un équilibre financier durable, par des carnets de commandes qui sont pleins, par la satisfaction des clients et, en particulier, de la marine. D'ailleurs, on peut constater une différence entre ce qui se disait à mon arrivée au ministère, voilà deux ans et demi, et ce qu'affirment aujourd'hui les responsables de la marine.
De plus, en votant la loi de programmation militaire, puis les lois de finances successives en parfaite conformité avec celle-ci, vous avez, mesdames, messieurs les sénateurs, donné à l'entreprise une vraie visibilité en lui assurant un solide carnet de commandes.
Ainsi consolidée, l'entreprise peut franchir une nouvelle étape qui lui permettra de développer ses savoir-faire et de devenir un véritable lieu d'entraînement pour l'industrie navale militaire européenne.
Comme je l'avais annoncé voilà deux mois, j'ai souhaité lever les contraintes qui pénalisent encore actuellement DCN en matière d'alliances et autoriser l'ouverture du capital de la société-mère et de ses filiales, dans le cadre d'un projet de loi équilibré.
D'ailleurs, dès 2001, vous aviez tracé la voie en votant un amendement permettant une détention majoritaire, et non pas totale, du capital par l'Etat, mais cet amendement n'avait finalement pas été retenu en deuxième lecture.
Aujourd'hui, je vous propose cette évolution dans le contexte plus global du présent projet de loi.
Il s'agit là - soyons-en tous conscients - d'une décision politique forte. En effet, ma première ambition est de doter la France d'une industrie navale de l'armement qui soit solide, compétitive et audacieuse à la fois pour la France et pour les personnels de DCN, dont je rappelais tout à l'heure la qualité et le savoir-faire.
Ainsi, en rendant DCN plus dynamique, en lui permettant des alliances qui la renforcent, nous confortons l'emploi, y compris sur le long terme, surtout si l'on tient compte de la concurrence, en particulier d'origine sud-asiatique, à laquelle il faudra rapidement faire face.
Ce faisant, nous assurons aux personnels, outre le fait qu'ils pourront conserver leur emploi dans la durée, les garanties qui leur ont été accordées au moment de la transformation de DCN, ainsi qu'un certain nombre d'avancées sociales.
Offrir à DCN la possibilité d'ouvrir son capital est une décision industrielle, en même temps qu'un signe politique fort.
DCN doit pouvoir rapidement nouer des partenariats industriels. Nos industries européennes ne peuvent, compte tenu de la concurrence, s'offrir le luxe de morceler leurs implantations.
La situation actuelle fragiliserait à terme notre industrie, et ce malgré les succès technologiques et commerciaux ; d'ailleurs, plusieurs rapports parlementaires ont mis l'accent sur cette urgence.
Il ne s'agit certainement pas de réduire les capacités de production européenne. Au contraire, ce que nous voulons - cela va d'ailleurs dans le sens de la philosophie qui a présidé à la création de l'Agence européenne de défense et de l'armement - c'est rationaliser à la fois l'offre commerciale, la recherche et le développement, afin de renforcer la position de notre industrie sur le marché intérieur européen, d'abord, sur le marché mondial, ensuite. Je veux que DCN soit au coeur de cette consolidation.
Les clients souhaitent une offre plus intégrée, autour du navire armé ; c'est ce qui ressort de tous les contacts que l'on peut avoir avec les clients potentiels.
Par ailleurs, DCN doit être plus présente à l'international.
Ne nous faisons aucune illusion. Certains diront sans doute qu'il convient d'abord de satisfaire notre besoin national. Mais il faudra alors diviser l'entreprise par deux, trois, voire quatre. C'est l'exportation qui nous apporte la solidité dans la durée et qui nous impose d'avoir des entreprises de cette taille.
La consolidation européenne passe par un rapprochement avec des industriels privés de la défense, systémiers et européens, permettant d'élargir l'offre au-delà du seul secteur naval.
Ce dont je suis persuadée aujourd'hui, c'est que la bonne santé économique et industrielle de DCN lui permettra d'aborder ces évolutions avec confiance.
Ces derniers mois, DCN et Thales ont travaillé ensemble à un projet industriel. Il s'agit là d'une première étape qui me semble aller dans le bon sens.
Il ne serait toutefois pas souhaitable de se limiter à cette seule perspective. C'est la raison pour laquelle j'ai d'emblée exclu d'attendre la conclusion d'un projet industriel achevé. Car tout texte trop restrictif ou trop ciblé sur un partenaire précis ne correspondrait pas à une réalité industrielle évoluant de façon permanente et rapide.