Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lutte des travailleurs en France pour leurs droits n’a jamais été un long fleuve tranquille. Sans leurs combats, les enfants seraient toujours au travail, les congés payés n’auraient pas été conquis, et d’autres droits seraient aujourd’hui bafoués, comme c’est le cas dans de trop nombreux pays où les syndicats sont interdits.
La ville de Châteauroux, dès 1896, proclamait : « il est du devoir des municipalités républicaines d’encourager les syndicats ouvriers légalement constitués et d’aider à leur organisation et leur bon fonctionnement, afin de permettre de défendre utilement la cause de la classe ouvrière. » La bourse du travail était ainsi créée dans cette ville en 1901.
C’est aussi au nom de la reconnaissance par la nation pour l’action résistante menée par les syndicats contre le nazisme que nombre de municipalités ont mis gracieusement des locaux à disposition des syndicats.
Rendons hommage dans cette enceinte à tous ces militants qui ont payé, trop souvent de leur sang, le prix fort pour la défense de l’intérêt général, intérêt général que nous avons également le soin de défendre en tant que représentants de la nation. Ces droits de l’homme par excellence sont remis en cause régulièrement. Les syndicats, qui sont là pour les défendre et les promouvoir, sont d’une utilité sociale irremplaçable.
Mais comment ces syndicalistes pourraient-ils défendre aujourd’hui cet intérêt général si les moyens en locaux leur sont retirés ?
C’est ce que vivent, depuis septembre 2003, les syndicats castelroussins qui se voient menacés, comme des locataires ordinaires, d’être chassés de la bourse du travail. Je me félicite de la déclaration publique de M. le préfet de l’Indre, assurant qu’il n’accordera pas au maire de Châteauroux le concours de la force publique et qui, implicitement, récuse l’expulsion. Mais la prudence est de mise, et ces paroles, même si elles sont importantes, ne peuvent suffire à rassurer totalement les syndicalistes qui souhaiteraient que tout cela soit écrit noir sur blanc.
Le droit syndical ne peut être limité à la théorie, il faut qu’il soit sous-tendu par des mesures concrètes. C’est au nom de cette liberté fondamentale, de la tradition de gratuité existant depuis la création de la bourse du travail à Châteauroux, qu’il nous paraît temps de pérenniser dans leurs locaux les organisations de cette ville.
Monsieur le ministre, je connais votre attachement pour cette région, pour ce département, pour leurs habitants, votre attachement pour les droits des salariés.
Il y a urgence. On a tenté de couper l’eau, l’électricité et le gaz aux syndicalistes. L’ascenseur a été neutralisé, ce qui interdit tout accès à des personnes handicapées. On veut les déloger.
Je vous demande, monsieur le ministre, de faire cesser ces pressions et actes inacceptables. Les syndicats ont droit à plus de respect pour l’exercice de leur mission. Il faut immédiatement un moratoire en attendant que des mesures pérennes soient prises. Ce serait un minimum pour que la sérénité reprenne ses droits.
Reconnaître l’usage gratuit des locaux en faveur des organisations syndicales, en tenant compte des diversités des situations et des usages et en inscrivant au minimum, dans l’urgence, la pérennisation de l’existant sur un plan juridique, doit être notre objectif. Je ne doute pas qu’il soit également le vôtre.
Vous avez misé, monsieur le ministre, sur le dialogue social. Mais comment pourrait s’exercer ce dialogue social si les syndicats sont considérés comme des sans domicile fixe en puissance ?
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que nous puissions pérenniser, dans la loi, le financement des locaux syndicaux. Comment comptez-vous progresser sur ce dossier afin que la liberté syndicale soit effective ?