Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à remercier à mon tour Jean-Vincent Placé de nous offrir aujourd’hui l’occasion de débattre d’une question peu souvent abordée, mais tout à fait essentielle, en particulier dans le contexte actuel de crise économique, écologique et sociale.
L’obsolescence programmée est un sujet complexe, à facettes multiples.
Tout d’abord, elle recouvre des enjeux économiques évidents, en termes d’emploi, de commerce extérieur, de délocalisation de main-d’œuvre, de filières d’insertion, ainsi que de recherche ou d’innovation.
Ensuite, les enjeux environnementaux, liés à l’utilisation des ressources de la planète, à la consommation d’énergie, à l’émission de gaz à effet de serre, à la production de déchets, à la capacité de recycler ou non ces déchets, sont évidemment considérables.
Enfin, les enjeux de société se mesurent à l’échelle planétaire : le modèle désormais universel de fonctionnement de l’économie est celui de la consommation et de la satisfaction de besoins constamment renouvelés, du fait non seulement d’un vrai progrès technologique, mais souvent de simples évolutions très artificielles créées par le marketing ou la publicité.
Comment avons-nous pu, en l’espace de cinquante ou soixante ans, passer de productions de qualité, nécessaires pour répondre aux besoins de consommation « normaux » de l’être humain, à un système fondé sur la création de besoins nouveaux, par le biais d’une forme de marketing inventée dans les années soixante, lorsque l’on s’est rendu compte que c’était la meilleure manière de gagner plus d’argent ?
À titre personnel, je considère que l’obsolescence programmée est née de la concentration du système de distribution. En effet, les fabricants de ces objets obsolescents respectent des cahiers des charges et ils n’inventent pas des produits à durée limitée, non réparables ou dépourvus de pièces de rechange tout à fait par hasard.
J’y vois une volonté de créer des conditions toujours plus difficiles pour le consommateur tout en garantissant l’accroissement du chiffre d’affaires de la grande distribution. On tend à minimiser les conséquences de l’obsolescence programmée des produits en soulignant que ceux-ci peuvent être recyclés, mais qui paie pour le recyclage, sinon le consommateur ? En définitive, il s’agit de faire toujours plus de chiffre d’affaires et de bénéfices. La grande distribution est, à mon sens, l’une des principales responsables de la situation que nous connaissons aujourd’hui.
La réponse n’est pas simple, d’autant que les tenants de ce système économique invoquent volontiers la nécessité de permettre à la planète entière de consommer des produits bon marché. Certes, un tel objectif était noble, il fallait évidemment réduire le coût des produits, mais jusqu’à un certain niveau seulement, sans aller jusqu’à tromper l’acheteur sur la qualité. J’observe que, dans certains cas, la durée de la garantie du produit acheté, par exemple un téléviseur, peut être portée de deux à cinq ans si vous y mettez le prix ! J’y vois une forme…