Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 23 avril 2013 à 14h30
Débat sur la politique vaccinale de la france

Marisol Touraine, ministre :

Elle est à l’origine de décès, qui, pour n’être pas massifs, n’en sont pas moins effectifs. Les causes de cette augmentation sont clairement identifiées ; l’une d’entre elles est liée à une trop faible couverture vaccinale. Le sentiment que la maladie a disparu est tel qu’il ne paraît plus nécessaire de se vacciner contre elle. On oublie que, si l’on arrête de se vacciner, la maladie ressurgit parce qu’elle n’a pas disparu par magie !

Dans le même temps, la suspension de l’obligation vaccinale par le BCG, qui a peut-être été mal appréhendée par certains, a pu entraîner des cas graves de tuberculose chez des personnes pour qui la vaccination aurait dû être maintenue et qui n’ont pas été correctement protégées. Il faut noter néanmoins que l’InVS, qui suit cette évolution de près, n’a noté aucune augmentation de méningites tuberculeuses chez les enfants de moins de deux ans. Il n’empêche que des cas ont été identifiés, qui tiennent au fait que les préconisations apportées au moment du changement de la politique vaccinale en juillet 2007 n’ont pas été correctement respectées.

Par ailleurs, rappelons que onze millions d’enfants meurent chaque année de pathologies infectieuses à travers le monde. Plusieurs d’entre elles pourraient être combattues grâce à la vaccination.

Nous avons donc une responsabilité immense, celle de ne pas baisser la garde. Cela ne pourra pas se faire sans l’appui et la mobilisation des professionnels de santé, dont l’action est, évidemment, décisive en matière de politique vaccinale.

Nous devons en outre affronter des défis nouveaux dans le champ des politiques vaccinales.

Il nous faut d’abord faire face aux maladies émergentes, aggravées par la circulation rapide des personnes et des biens, par l’urbanisation, la dynamique démographique et le réchauffement climatique.

Nous sommes aussi confrontés à des cancers qui sont causés par des virus : c’est le cas des lymphomes, des cancers colorectaux, des leucémies ou des cancers du col de l’utérus.

Il nous faut également affronter certaines maladies infectieuses latentes, telles que la varicelle, où le virus survit dans l’organisme, mais menace de se réactiver à chaque instant. Des vaccins ont la capacité de prévenir ces réveils chez les sujets les plus fragiles.

Pour toutes ces raisons, la politique vaccinale est et doit rester une priorité de santé publique pour le Gouvernement.

Notre pays dispose, je le disais, d’une couverture vaccinale de qualité. Néanmoins, il existe de grandes disparités selon le type de vaccin.

La vaccination des nourrissons reste excellente, puisqu’elle dépasse le seuil des 97 % pour la primo-vaccination. Les vaccins les plus anciens sont également bien prescrits. Cependant, la couverture vaccinale tend à diminuer pour les vaccins introduits plus récemment et perçus comme « simplement recommandés », si j’ose dire. C’est le cas, par exemple, du HPV et du méningocoque C. On observe également de grandes différences de taux de couverture entre les jeunes et les adultes : on se vaccine moins au fur et à mesure qu’on avance dans la vie.

En outre, de grandes inégalités sévissent entre nos territoires. Le taux de vaccination pour le ROR – rougeole, oreillons, rubéole – est, par exemple, beaucoup plus élevé dans le nord que dans le sud de la France. De fait, on a vu réapparaître des cas de rougeole dans le sud de notre pays.

Comment expliquer ces dysfonctionnements ?

D’abord, il est indéniable que la réticence aux vaccinations s’amplifie. Elle se fonde sur des raisonnements non scientifiques, voire irrationnels, ou sur l’expérience personnelle. Dans le même temps, les débats qui ont pu accompagner la mise en place de nouvelles vaccinations ont été parfois à l’origine de désinformation. Nous devons donc garantir à nos concitoyens une information de qualité, transparente et objective sur les vaccins et les risques éventuels qui peuvent être liés à la vaccination, tout en rappelant les avantages individuels et collectifs de ces vaccinations.

Ensuite, les recommandations à suivre ne sont pas toujours lisibles. Leur lecture est difficile, autant pour les Français que pour les professionnels de santé, qui sont, au quotidien, confrontés à la nécessité de vacciner ou à la demande de vaccination. Pourquoi une vaccination, qui était jusque-là obligatoire, devient-elle subitement recommandée ? Comment suivre avec certitude et sur le long terme le nombre d’injections à réaliser, avec les phénomènes de rattrapage ? Je ne suis d’ailleurs pas certaine, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous seriez tous capables de dire, si nous procédions à un rapide test, où vous en êtes dans vos rappels de vaccinations, obligatoires ou simplement recommandées.

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