Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 23 avril 2013 à 14h30
Débat sur la politique vaccinale de la france

Marisol Touraine, ministre :

Je veux donc améliorer la couverture vaccinale des Français. Une stratégie nationale de santé se met en place, qui repose sur une notion essentielle, celle du parcours. En matière de vaccination aussi, il s’agit de rendre plus simple, plus accessible, plus lisible le parcours vaccinal des Français.

Cette politique doit s’articuler autour de plusieurs mesures.

La première, c’est la simplification et la clarification du calendrier vaccinal. C’est chose faite, puisqu’un nouveau calendrier vaccinal a été annoncé voilà quelques jours, qui doit permettre de diminuer le nombre d’injections pour une efficacité équivalente.

S’agissant des nourrissons, la primo-vaccination comportera une injection en moins : elle sera composée de deux doses de vaccin, espacées de deux mois, et d’un rappel, au lieu de trois doses de vaccin et d’un rappel. Pour les enfants et les adolescents, le rappel de vaccination entre seize et dix-huit ans contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite est supprimé. Enfin, les rendez-vous vaccinaux seront fixés pour les adultes à âge fixe et non plus à intervalles fixes, c’est-à-dire à vingt-cinq, à quarante-cinq et à soixante-cinq ans, puis tous les dix ans au-delà de soixante-cinq ans : à soixante-quinze, à quatre-vingt-cinq, à quatre-vingt-quinze ans et, pourquoi pas, à cent cinq ans…

Cette simplification concourra à une meilleure adhésion aux schémas vaccinaux. Ce travail ne s’est pas fait sans les professionnels de santé : ils ont été informés, en amont, des évolutions du calendrier vaccinal et disposent des informations leur permettant de répondre aux questions concrètes de leurs patients, notamment en termes de rattrapage. Si je suis entre deux âges de rappel, dois-je me revacciner tout de suite ou attendre la prochaine échéance ?

Pour sensibiliser nos concitoyens à ces nouveaux changements, la semaine européenne de la vaccination, qui est actuellement en cours, est l’occasion d’informer les Français, dans chaque région, sur les évolutions du calendrier.

La deuxième mesure, c’est d’autoriser les centres d’examens de santé de l’assurance maladie, dans lesquels l’accès aux soins est gratuit, à réaliser des vaccinations. C’est d’ailleurs le sens de l’une de vos propositions, monsieur le rapporteur, à laquelle je suis très favorable. Cependant, dans son avis du 15 décembre 2012, le Conseil constitutionnel a censuré l’article 64 de la loi de financement de la sécurité sociale, considérant que cet article constituait un cavalier législatif.

Ce dispositif n’ayant pas pu entrer en vigueur, nous avons besoin d’un vecteur législatif. Je suis ouverte quant à la démarche législative qu’il convient d’adopter, monsieur le rapporteur : il peut s’agir d’une initiative parlementaire ou d’une disposition dans le projet de loi de santé publique annoncé par le Président de la République. Nous pouvons engager des discussions sur ce point. Cette mesure doit en tout cas permettre d’enrichir encore l’accès à la vaccination, en particulier pour les personnes en situation de précarité.

La troisième mesure à prendre pour améliorer la couverture vaccinale concerne le carnet de vaccination électronique.

Nous devons travailler au suivi des vaccinations et faire en sorte que ce suivi puisse se faire par le biais d’un carnet de vaccination électronique. Nous savons bien que toute la population ne sera pas concernée d’emblée de la même façon ; les parents des tout jeunes enfants sont sans doute aujourd’hui davantage sensibles à cette démarche que les personnes d’âge mûr qui ont déjà réalisé toute une série de vaccinations.

Cette démarche s’inscrit dans la perspective de la mise en place d’un l’outil interprofessionnel constitué par le dossier médical personnel de deuxième génération, sur lequel j’ai eu l’occasion de m’exprimer.

Une piste à expertiser concerne la possibilité d’utiliser, pour le suivi de la vaccination, le dossier pharmaceutique, au moins dans un premier temps. Cet outil, qui permet de suivre les délivrances de médicaments, a été développé, vous le savez, par l’ordre des pharmaciens. Mobiliser cet outil permettrait d’anticiper, sachant qu’il existe d’ores et déjà 23 millions de dossiers pharmaceutiques qui, réglementairement, ont vocation à alimenter le dossier médical personnel.

Enfin, la quatrième mesure vise à élargir le nombre de professionnels pouvant prescrire et réaliser des vaccinations.

Depuis 2008, les infirmières sont autorisées à prescrire la vaccination des personnes âgées contre la grippe saisonnière, à l’exception de la première injection. Il s’agit d’une première avancée.

Par ailleurs, le regroupement des professionnels au sein des maisons de santé pluridisciplinaires permet indiscutablement de fluidifier le parcours vaccinal.

Nous pouvons aller plus loin encore et renforcer les actions de proximité permettant d’augmenter significativement la couverture vaccinale. Plusieurs pistes sont aujourd’hui en cours d’expertise : il s’agirait, par exemple, de permettre aux sages-femmes de prendre en charge la vaccination de l’entourage d’une femme enceinte ou encore d’autoriser une vaccination par un infirmier au sein d’une pharmacie.

Il serait aussi envisageable, comme cela a été préconisé dans un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de juin 2011 sur les pharmacies d’officine, de permettre aux pharmaciens d’effectuer, sur leur propre initiative, des rappels de vaccination chez les patients adultes, comme cela est déjà possible au Portugal depuis plus de cinq ans. Dans ce pays, plus d’une vaccination contre la grippe sur cinq a été réalisée dans les pharmacies et 13 % des patients ainsi vaccinés ne l’avaient pas été par le passé. Naturellement, ces perspectives doivent être étudiées de manière concertée avec l’ensemble des professionnels de santé, médecins et non médecins.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons à garantir la qualité de la vaccination et à réaffirmer la nécessité, en matière de santé publique, de toujours améliorer la couverture vaccinale de notre pays. Raison pour laquelle, monsieur le rapporteur, je vous renouvelle mes remerciements et mes félicitations tant pour la qualité de votre rapport que pour votre initiative d’engager un débat sur ce sujet crucial.

Bien évidemment, je me tiens prête à répondre à l’ensemble des questions qui me seront posées au cours de ce débat.

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