La France a une tendance à transposer avec trop de zèle. Alors, monsieur le Président, nous avons voulu éviter les défauts de la RGPP. Pour cela, nous avons diligenté une mission d'inspection ; nous nous sommes également beaucoup appuyés sur les rapports parlementaires, dont les évaluations sont extrêmement intéressantes - et le travail de la MAP sera mené avec les Assemblées.
Pour stabiliser en valeur les dépenses de l'État, comme le prévoit le budget triennal, nous disposons de deux leviers : stabiliser les emplois et ne pas prendre de mesures de revalorisation catégorielle. La création d'emplois pour les missions prioritaires - 9 300 postes dans l'enseignement s'ajoutant aux 16 789 emplois créés pour les rentrées 2012 et 2013, 1 000 postes supplémentaires pour la sécurité et la justice - est compensée par la diminution du nombre de postes ailleurs : 7 880 emplois supprimés au ministère de la défense en application de la loi de programmation militaire, 6 028 dans les autres ministères. C'est toute la difficulté de ma tâche, en particulier dans les territoires, comme vous le savez.
Depuis le 1er juillet 2010, aucune mesure générale de revalorisation des salaires de la fonction publique n'a été prise. Vous mesurez combien nous avons dû négocier avec les organisations syndicales pour que ces trois années consécutives de gel du point n'aboutissent pas à une paralysie des services. Elles savent que ce gel ne sera remis en cause que par une amélioration de la situation économique, sous réserve que notre trajectoire de redressement des finances publiques soit respectée : une hausse de 0,5 %, représente 890 millions d'euros de dépense publique supplémentaire, dont 390 millions d'euros pour la fonction publique d'État, 310 millions d'euros pour la fonction publique territoriale et 190 millions d'euros pour la fonction publique hospitalière.
Nous avons maintenu la diminution des enveloppes catégorielles attribuées aux ministères, qui représenteront 310 millions d'euros en 2013, 269 millions d'euros en 2014 et 228 millions d'euros en 2015 - alors le précédent gouvernement octroyait entre 500 et 550 millions d'euros par an. Les inégalités entre ministères sur les mesures catégorielles étaient patentes et la situation est tendue, et nous avons changé les modalités d'utilisation de ces enveloppes afin de les consacrer à des mesures collectives.
Nous sommes d'accord avec les organisations syndicales pour ouvrir des négociations sur les carrières et les rémunérations : remplacement de la prime de fonction et de résultat par des mesures plus justes, réforme de l'indemnité de résidence et du supplément familial de traitement... Les discussions seront difficiles, car les réformes se feront à coûts constants. Je souhaite que cela soit l'occasion d'une redistribution au profit des personnels les moins bien rémunérés : à deux reprises déjà en un an nous avons dû revaloriser par arrêté les rémunérations des fonctionnaires de catégorie C pour qu'elles ne se situent pas en deçà du SMIC. Mieux vaudrait donner, en amont, quelques point d'indices supplémentaires pour les plus bas salaires, qui correspondent souvent à des emplois très importants, comme par exemple l'accompagnement des personnes âgées.
Telle est la quadrature du cercle à laquelle je suis confrontée : maîtriser la masse salariale, repenser les trois catégories statutaires, remettre à plat les bases du système de rémunération de la fonction publique, fluidifier les carrières, simplifier la gestion des ressources humaines... Parce que ce chantier est délicat, et que nous avons réduit les moyens des cabinets, nous avons confié cette mission à une personnalité qui pourra y consacrer du temps.
Soyons prudents sur l'allongement des carrières, qui peut poser des problèmes de pénibilité et de retraite. Nous devrons aussi nous efforcer de mieux maîtriser le fameux glissement vieillesse technicité (GVT), comme nous le demandent les employeurs publics que sont les collectivités locales et les hôpitaux. Nous voulons simplifier et réduire les coûts de gestion des agents. Une évolution de l'Ecole nationale d'administration (ENA) et des Instituts régionaux d'administration (IRA) est en cours, afin de mieux adapter les formations dispensées aux enjeux de la fonction publique en France.