Intervention de Martin Hirsch

Réunion du 24 octobre 2008 à 9h30
Revenu de solidarité active — Article 6

Martin Hirsch, haut-commissaire :

Nous avons cherché la meilleure solution pour progresser sur un sujet difficile.

Je vais donner quelques illustrations de cette démarche.

Quel est le problème ? Il consiste en ce qu’un certain nombre de droits étaient jusqu’à présent rattachés à un statut, tel celui, par exemple, d’allocataire du RMI. Ce statut disparaît au profit d’une prestation, le revenu de solidarité active, qui profitera à trois fois plus de foyers.

Le système précédent entraînait des effets pervers absolument indéniables. Ainsi, il existait des effets de seuil, que tout le monde a dénoncés. Qu’est-ce que cela signifie ? C’est très simple : lorsque vous gagnez dix euros de plus par mois, vous en perdez quarante par ailleurs. Vous êtes tous élus, je pense donc que vous avez tous reçu, comme moi, des courriers de personnes s’en plaignant. Certains de mes correspondants m’affirment même qu’ils souhaiteraient rembourser une partie de leur salaire pour redescendre sous un certain seuil et, ainsi, bénéficier de nouveau de la gratuité de telle ou telle prestation !

En élaborant cette réforme, nous avons donc cherché comment supprimer ces effets pervers. C’est ainsi que nous avons abordé successivement tous les sujets – CMU, taxe d’habitation, redevance audiovisuelle, prestations diverses – en nous demandant comment sortir de ce système pour mettre en place un dispositif lissé.

Nous avons arrêté un premier principe : le RSA, en tant que tel, est une prestation que nous n’intégrons pas aux seuils. Cela évitera par exemple à certains de perdre le bénéfice de la couverture maladie universelle.

Ensuite, passant d’une condition de statut à une condition de revenus, nous avons appliqué un deuxième principe : celles et ceux dont les revenus sont équivalents au statut valant actuellement exonération ne verront pas leur situation modifiée.

À cet égard, vous m’avez demandé si l’on était un nanti quand on disposait d’un revenu fiscal de référence de 4 877 euros par mois. La question était superflue ! Vous savez bien évidemment que non. Personne n’oserait prétendre cela !

Pourquoi ce seuil ? Il s’agit non pas de considérer qu’un individu devient un nanti en le franchissant, mais de conserver le bénéfice de la gratuité aux personnes qui en jouissaient au motif qu’elles étaient allocataires du RMI et dont les revenus sont inchangés. Au-delà, la contribution, au taux de 3, 45 %, devient proportionnelle au revenu de la personne. Certes, chaque fois que les revenus augmentent, on contribue un peu plus, mais cette progressivité de la contribution répond précisément à votre demande. Le dispositif est donc tout à fait juste.

Je vais maintenant vous donner deux exemples de situations injustes.

Premier exemple, je m’étais élevé contre l’instauration, voici deux ans, d’une gratuité des transports franciliens réservée aux allocataires du RMI. En effet, celui qui quitte le statut de RMIste pour reprendre un peu de travail est immédiatement exclu du bénéfice de cette mesure. Je ne protestais donc pas contre la gratuité des transports pour les personnes les plus démunies, mais il me semblait plus pertinent de privilégier un dispositif progressif, un système « en sifflet », pour reprendre le mot que me souffle le président de la commission des affaires sociales.

Madame Le Texier, je me rappelle d’ailleurs que l’une des premières bénéficiaires du RSA, originaire de votre département du Val-d’Oise, nous avait expliqué, participant au Grenelle de l’insertion, à quelle mauvaise surprise elle avait été confrontée lorsque, ayant repris du travail, elle avait pu améliorer sa situation grâce au RSA mais, dans le même temps, avait été privée de la gratuité des transports.

Nous appliquons à tout ce qui dépend de l’État les principes que nous prônons

Second exemple, la prime de Noël, mise en place en 1998 par le gouvernement de Lionel Jospin à la suite du rapport de Marie-Thérèse Join-Lambert et du mouvement des chômeurs, est l’un de ces droits connexes présentant des aspects qui me semblent négatifs. Je ne suis d’ailleurs pas seul à le penser.

En effet, la prime de Noël est réservée aux allocataires du RMI, ceux de l’API étant exclus de son bénéfice. On s’en souvient, elle avait été instaurée parce que les personnes concernées ayant des enfants à charge ne pouvaient même pas leur offrir un cadeau de Noël. Or la femme isolée avec un enfant à charge ne perçoit pas cette prime, tandis qu’un RMIste sans enfants pourra la toucher. Ce n’est pas normal !

Par ailleurs, celui qui perd son statut d’allocataire parce qu’il retrouve du travail le 31 octobre se voit privé de la totalité de sa prime de Noël. À l’inverse, celui qui a travaillé jusqu’en octobre et devient allocataire au cours des deux derniers mois touche l’intégralité de la prime. Ce système ne marche plus ! Ce n’est plus possible !

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